L'invitation d'utiliser l'équité de sa propriété pour financer la retraite peut sembler intéressante, mais il importe de bien mesurer les coûts.

C'est en 1986 dans l'Ouest canadien que la firme Board Home Equity, devenue Banque Home Equity, a commencé à offrir le produit de financement que l'on surnomme l'hypothèque inversée, soit le Programme de revenu résidentiel.

Le programme consiste en prêts hypothécaires qui ne nécessitent aucun remboursement de capital ou d'intérêts avant que le propriétaire de la maison vende ou décède. Le prêt avec intérêt couru peut toutefois être remboursé en tout temps, sauf que des pénalités seront encourues si le remboursement survient durant les trois premières années après l'octroi du prêt.

Le programme s'adresse aux personnes de 55 ans et plus dont le principal actif est leur résidence dans laquelle ils veulent rester, mais qui n'ont pas les revenus suffisants pour s'acquitter de leurs obligations financières ou maintenir le rythme de vie qu'ils souhaitent.

Banque Home Equity est la seule institution au Canada à offrir ce type de financement. Toutefois, elle le fait en partenariat avec les banques et les différents agents de services financiers, tels les planificateurs et les conseillers financiers, qui lui réfèrent contre rémunération environ 60% de sa clientèle, explique Éric Bisaillon, directeur général et vice-président régional de Banque Home Equity.

Des conditions

Les prêts ne peuvent pas excéder 50% de la valeur de la propriété, et les emprunteurs se qualifient en fonction de critères tels l'âge, la localisation et le type de propriété. Aucune enquête de crédit n'est faite puisque la propriété sert de garantie et que la capacité de rembourser le prêt est sans objet, étant donné qu'aucun paiement n'est exigé.

En moyenne, les prêts consentis par Banque Home Equity portent sur 35% de la valeur de la propriété et sont remboursés après 10 ans, révèle M. Bisaillon. Toujours selon la firme, les emprunteurs récupèrent plus de 50% de la valeur de la maison lorsque celle-ci est vendue et que le prêt est remboursé.

Trois formes

L'hypothèque peut prendre trois formes. Dans la grande majorité des cas, l'emprunteur prend tout le montant qui lui est consenti. Souvent parce qu'il doit rembourser un solde d'hypothèque. Comme le prêt consenti par la Banque Home Equity est une hypothèque de premier rang, un autre prêt hypothécaire de même rang ne peut coexister. Certains emprunteurs se contentent plutôt d'une partie du prêt et prendront le reste plus tard. Enfin, d'autres choisiront de recevoir des paiements périodiques.

S'assurer de bien estimer les coûts

Ce type de financement peut être très coûteux, prévient Nicolas Fréchette, conseiller principal, financement hypothécaire chez Desjardins. D'abord, le taux d'intérêt est plus élevé. Actuellement, on ajoute 1,75% pour une hypothèque inversée par rapport à un prêt hypothécaire, soit 5,25% comparativement à 3,50%. Ensuite, comme aucun remboursement n'est effectué, les intérêts composés finissent par constituer un montant important.

À cela, deux risques s'ajoutent. Premièrement, que les taux d'intérêt montent, ce qui ajoutera au solde dû. Deuxièmement, que les prix des maisons restent stables, ce qui affectera le solde disponible à la vente de la maison.

Pourquoi les banques n'offrent-elles pas d'hypothèque inversée? Parce que ce marché est encore trop petit, répond Éric Bisaillon, qui indique qu'une valeur de 240 millions de nouveaux prêts hypothécaires inversés est consentie par année.

Mais aussi parce que le principal critère selon lequel les banques consentent du crédit, soit la capacité de remboursement de l'emprunteur, n'est pas présent, explique Éric Chamelot, vice-président adjoint, gestion des produits de financement à la Banque Laurentienne. «Ce n'est tout simplement pas le mode de fonctionnement des banques», dit-il.