Christian Kamel et Gilles Brisson ont vécu l'âge d'or de l'industrie des sciences de la vie au Québec. Puis, ont été les victimes collatérales de sa restructuration. Aujourd'hui, ils ont décidé de profiter de la fermeture du laboratoire où ils travaillaient... pour lancer le leur.

«L'avion s'est écrasé en mille morceaux, lance Christian Kamel en parlant de l'industrie pharmaceutique. Maintenant, les morceaux, on veut les recoller.»

Les deux associés viennent de créer Laboratoires BNK, une boîte qui veut faire de l'analyse spécialisée en détectant dans des échantillons de sang et d'urine des composants qui échappent aux laboratoires traditionnels.

Sans clients et un siège social officiellement enregistré au domicile de l'un des fondateurs, Laboratoires BNK est une vraie entreprise en démarrage. Mais s'il est encore embryonnaire, le rêve des fondateurs illustre au moins une chose: l'idée de bâtir des entreprises en science de la vie n'est pas morte au Québec.

«Ce projet, j'y tiens mordicus», dit Gilles Brisson. À 65 ans, ce biochimiste clinicien aurait pourtant pu rêver de retraite lorsque le laboratoire montréalais de l'ancienne Anapharm qui l'employait a fermé ses portes l'an dernier. Une fermeture qui, à l'image de l'industrie, découlait d'une série d'acquisitions et de restructurations.

Mais la situation a ravivé la flamme entrepreneuriale de M. Brisson. Il a convaincu Christian Kamel, 36 ans, également mis à pied par Anapharm où il avait occupé plusieurs postes de direction, de créer un labo de pointe. Ce laboratoire aurait pour mission de détecter des composants que des compétiteurs comme Laboratoires Biron ou Gamma-Dynacare ont renoncé à traquer.

Perte d'expertise

«Il n'y a plus personne qui fait de l'analyse spécialisée au Québec, dit M. Brisson. Les grands laboratoires font des analyses de routine à grand volume. Quand ils ont une demande plus spécialisée, ils envoient les échantillons à d'autres laboratoires aux États-Unis, qui les analysent ou les renvoient à leur tour à d'autres laboratoires.»

Selon M. Kamel, cette situation a provoqué une perte d'expertise au Québec, ce qui fragilise l'industrie de la recherche clinique vouée à tester des médicaments expérimentaux sur des patients et qui a d'énormes besoins en analyse de sang.

Les collègues ont donc créé une entreprise, près des clients québécois, capable d'assurer un suivi étroit et rapide. Ils se sont entourés d'un comité scientifique consultatif et se sont lancés.

«Ce n'est pas qu'une idée en l'air, précise Gilles Brisson. On a fait nos devoirs et on l'a présentée à des clients éventuels. Et ils nous ont confirmé qu'il y a un besoin pour ce type de laboratoire au Québec.»

Les fondateurs ont toutefois beaucoup de pain sur la planche. Ils estiment avoir besoin d'environ 450 000$ pour s'équiper et se lancer en affaires. Ils négocient actuellement auprès d'anges financiers et de connaissances pour récolter 150 000$, une somme qui leur permettrait d'obtenir un prêt pour combler le reste.

L'équipe est aussi en discussion pour s'installer dans des locaux montréalais du Conseil national de recherches Canada, avenue Royalmount. Elle prévoit pouvoir commencer à servir des clients dès avril 2013.

«On va toujours avoir un volet de recherche et développement parce qu'on veut inventer nos propres tests, dit aussi Gilles Brisson, qui a déjà fait des découvertes du genre. Notre but est simple: nous imposer comme un laboratoire de référence au Québec dans l'industrie du diagnostic médical.»

Qui

Gilles Brisson et Christian Kamel, deux anciens d'Anapharm.

L'idée

Un laboratoire d'analyse spécialisé capable de détecter des composants dans le sang que les grands laboratoires ont renoncé à traquer.

Ils y croient et y ont misé de l'argent

Le groupe est en discussion avec des investisseurs privés pour récolter 150 000$.

L'ambition

Devenir un laboratoire de référence au Québec dans l'industrie du diagnostic médical.