Premier Tech célèbrera cette année 90 ans d'histoire, mais surtout, 30 ans d'innovation. À une époque où le mot innover n'était guère en vogue, l'entreprise de Rivière-du-Loup a choisi de miser sur la R-D. Résultat: d'un simple exploitant de tourbière, elle est devenue un leader mondial de l'emballage et a conçu des systèmes de traitement des eaux usées, de même que des produits destinés aux secteurs de l'horticulture et de l'agriculture.

L'entreprise québécoise, propriété de la famille Bélanger, possède 24 usines dans 14 pays, dont le Sri Lanka, la Thaïlande et la Chine. Elle compte plus de 2300 équipiers (et non employés...), dont 800 à son siège social de Rivière-du-Loup, lequel a été baptisé «Campus Premier Tech». Son chiffre d'affaires, actuellement de 450 millions, devrait atteindre le milliard à l'issue d'un plan quinquennal qui vient de commencer.

La conquête du monde

Pour paraphraser Pierre Talbot, vice-président Innovation, «Premier Tech a conquis le monde du fond d'une tourbière». Le plus ironique, c'est que des banquiers ne donnaient pas cher de la peau de l'entreprise à une certaine époque. «On s'est déjà fait dire: vous voulez attirer des doctorats à Rivière-du-Loup? Bonne chance!», se souvient Jean Bélanger, président et chef de l'exploitation.

MM. Bélanger et Talbot sont aujourd'hui les gourous de l'innovation chez Premier Tech. L'entreprise dispose d'une équipe de quelque 200 personnes affectées à la R-D partout dans le monde, de même que d'un budget annuel de 17,5 millions. Son portefeuille contient une centaine de brevets.

Si le tandem Bélanger-Talbot sait où il s'en va, c'est en grande partie grâce à Bernard Bélanger, père de Jean et propriétaire de l'entreprise depuis la fin des années 1970. C'est lui qui, au milieu des années 1980, a décidé de structurer l'innovation chez Premier Tech. Bien sûr, la PME de l'époque comptait déjà quelques projets de R-D à son actif, notamment sa collaboration avec l'Université Cornell pour la création du célébrissime Pro-Mix, l'un des produits horticoles les plus utilisés. Mais Bernard Bélanger a mené l'entreprise plus loin afin d'en assurer la pérennité.

Depuis 1997, Premier Tech met en place de rigoureux processus d'innovation et de R-D. Elle vient d'entamer son quatrième processus quinquennal. «La R-D est liée au développement stratégique de l'entreprise. C'est dans notre ADN. On ne se demande même plus où elle se situe», dit Jean Bélanger, un ingénieur industriel de 46 ans.

Dans la conception de nouveaux produits, toutes les divisions de Premier Tech sont donc mis à contribution, plus particulièrement les équipes commerciales (qui connaissent bien les clients) et stratégiques (au fait des capacités novatrices de l'entreprise). Jean Bélanger insiste: «On veut faire du top down au lieu du bottom up. C'est-à-dire qu'on identifie un produit et qu'on le décline au complet. On se demande si on a les compétences pour le créer, le budget nécessaire «, explique-t-il.

Premier Tech ne veut plus uniquement se concentrer sur la fabrication de produits et la mise au point de nouvelles technologies. Elle veut élargir la portée de ses innovations. Le service et l'offre client sont désormais dans sa mire. «La science de l'innovation est actuellement à l'étape d'identification des principes et concepts sous-jacents. Il nous faut maintenant structurer l'intangible», affirment les deux gourous.

Les ressources humaines

Dans la foulée, l'entreprise a d'ailleurs mis sur pied le programme IPSO, un acronyme signifiant: Innovation, produits, procédés, services et offres. «On se repositionne et on bonifie notre procédé d'innovation. À partir des années 1970, les entreprises ont misé sur la qualité. En 1990-2000, ça a été le service. Depuis 10 ans, on s'intéresse au client. Il faut le surprendre, faire en sorte qu'il ait une expérience gratifiante», soutient Jean Bélanger.

Au fil du temps, l'entreprise a également innové dans plusieurs autres secteurs, notamment dans les ressources humaines. Non seulement prend-elle un soin jaloux de ses troupes par le biais de différents programmes, mais Premier Tech est passé maître dans l'embauche de nouveaux employés.

«À une certaine époque, nous avons dû embaucher 200 personnes, ce qui était énorme. Pour accélérer le processus de sélection, nous avons fait des entrevues de groupe où nous installions une boîte de Lego et demandions aux candidats de construire une maison. On voyait deux qui était les leaders, les gens d'équipe, les solitaires, les créatifs, les rébarbatifs. Aujourd'hui, ça nous aide quand vient le temps de construire des équipes de travail», dit le président.