Des ingénieurs du Québec montrent des lacunes quant à la compréhension exacte du code de déontologie de leur Ordre.

C'est ce qui ressort d'un sondage et de «focus groups» encore en voie d'analyse et menés par l'Ordre lui-même ces derniers mois.

Le coup de sonde portait sur les perceptions du code de déontologie et sa compréhension par les membres.

«Certains de nos membres présentent des manques quant à la connaissance et à la compréhension du code de déontologie, reconnaît Maud Cohen, présidente de l'Ordre.»

Pourtant, Mme Cohen estime que le code est très clair, surtout quant au soin que l'ingénieur doit prendre pour que les intérêts et la santé du public soient bien servis.

«Le code est clair là-dessus, autant que l'est le Code des professions du Québec. Le professionnel doit exercer son jugement en tout temps dans le meilleur intérêt du public.»

Code clair ou pas, l'Ordre a décidé d'offrir une formation spéciale à ses membres sur ces questions dès l'automne prochain. Et Mme Cohen jongle présentement à la pertinence de rendre cette formation obligatoire pour tous les membres de l'Ordre des ingénieurs du Québec.

Quant au code lui-même, Maud Cohen estime «qu'il va probablement faire l'effet d'une nouvelle rédaction» même si cette révision n'est pas prévue pour le court terme.

En attendant, quelques contrevenants sont dans l'eau sinon chaude, au moins très tiède. L'Ordre envisage des poursuites judiciaires bien réelles contre des individus spécifiques. Les dossiers ont d'ores et déjà été soumis à la syndic de l'Ordre.

Révision du code

À l'Association des ingénieurs-conseils du Québec, on salue avec bienveillance l'idée d'un cours de musculation éthique des ingénieurs.

«Je ne suis pas surprise que certains ingénieurs ne soient plus très familiers avec le code de déontologie, concède Johanne Desrochers, présidente de l'Association. C'est très bien qu'on leur offre un cours là-dessus et je ne m'opposerais pas si on le rendait obligatoire.»

Quant à la révision du code de l'Ordre, si Mme Desrochers ne s'aventure pas dans cette direction, elle rappelle que l'an dernier l'Association des ingénieurs-conseils a procédé à la révision du sien.

«Nous voulions nous aligner sur les meilleures pratiques internationales. Nous avons donc regardé le code de déontologie de la Fédération Internationale des ingénieurs-conseils, ce qu'ils nomment leurs «lignes directrices». Nous avons réécrit notre code, nos propres lignes directrices et nous avons donné une formation là-dessus à nos membres.»

Collusion ou concentration?

Johanne Desrochers sait que les firmes d'ingénieurs-conseils sont sous la loupe, voire le microscope du public depuis plus d'un an.

«On a beaucoup parlé de collusion, du fait que les noms des mêmes firmes revenaient constamment d'un contrat de travaux publics à un autre.»

La présidente de l'Association des ingénieurs-conseils affirme ne pas vouloir se substituer au jugement du public, mais tient à rappeler certains faits.

«Quand je suis arrivée à l'Association en 1987, il y avait 167 firmes de génie-conseil au Québec qui employaient au total 7 000 ingénieurs. Aujourd'hui, on ne compte plus que 40 firmes, mais qui emploient 23 000 personnes au Québec même. De plus, 10 firmes embauchent à elles seules 90% de la main-d'oeuvre disponible. Cette concentration fournit à elle seule un début d'explication au fait que les mêmes noms reviennent sans cesse.»

Mme Desrochers insiste aussi sur le fait que les firmes spécialisées se sont aussi consolidées.

«Ça explique que quand un appel d'offres s'adresse à une grande firme généraliste entourée de quelques spécialistes, on voit réapparaître les mêmes noms.»

Quant aux coûts qui étonnent à tout le moins le public, Mme Desrochers rattache leur ascension premièrement au boom subit des travaux d'infrastructures et deuxièmement au petit nombre de joueurs.

«On n'a pas étalé la construction ni la réfection des ouvrages d'art sur une longue période, dit-elle. Les pouvoirs publics ont plutôt donné un subit coup de collier. Ces pressions énormes de toutes parts sur une main d'oeuvre en nombre fini ont créé une rareté qui peut expliquer partiellement les coûts.»