Les négociations sont en cours entre Severstal, géant russe de l'acier, et diverses instances québécoises pour l'établissement d'une usine de purification du minerai de fer à Sept-Îles. Si, comme l'espère Serge Lévesque, maire de la ville, ces tractations aboutissent, un premier projet verrait le jour au Québec.

On sait que le Plan Nord de Jean Charest a reçu quelques salves bien ajustées. Les critiques lui reprochent de se concentrer principalement sur l'extraction du minerai sans faire une place importante à la transformation du minerai, source première de la valeur. Reproches adressés aussi notamment par Jacques Parizeau lors du congrès Québec Exploration 2011.

Le syndicat des Métallos (FTQ) a aussi exigé que le Plan Nord ne décolle qu'après l'inclusion des seconde et troisième transformations du minerai chez nous. «Il faut que ce soit une structure obligatoire dans tous les accords se rapportant au Plan Nord», réclame Alain Croteau, coordonnateur des Métallos pour la Côte-Nord.

Le projet de Severstal, d'une valeur de plusieurs centaines de millions de dollars, pourrait répondre aux critiques. L'aciérie multinationale veut raffiner le minerai à Sept-Îles en le faisant passer d'une pureté de 65% à 98%. Pour ce faire, on utiliserait une nouvelle technologie testée en Afrique du Sud où une usine traitera des volumes équivalant à 50 000 tonnes annuelles. La production expérimentale dans cette usine commencera l'été prochain. Si on est satisfait, selon M. Lévesque, on construira une usine grandeur nature à Sept-Îles pour purifier jusqu'à 2 millions de tonnes par an.

On négocie déjà

Le maire de Sept-Îles a eu cinq rencontres avec les dirigeants de Severstal, la plus récente il y a trois semaines. «Ils ne se contentent pas de construire l'usine expérimentale en Afrique du Sud. Ils sont très actifs au Québec. Ils ont commencé à négocier la location d'un terrain pour établir l'usine chez nous.» Ces discussions immobilières se font entre Norestal et le Port de Sept-Îles qui est sous la gouverne d'un conseil d'administration local. C'est le plus important port minier au Canada ouvert à l'année.

Severstal, toujours selon le maire Lévesque, discute aussi avec Hydro-Québec pour lui fournir l'énergie, et aurait également déjà pris contact avec les promoteurs miniers qui lui fourniraient l'indispensable minerai de fer. «Ils mettent en place les ingrédients locaux qu'il leur faut, résume M. Lévesque: minerai, port et électricité. Sept-Îles a tout cela.»

Et quels débouchés pour le fer pur à 98%? On en fera des rondelles qu'on expédiera à ces aciéries qui, pour l'instant, travaillent avec des rebuts de fer.

Baie-Comeau aussi

Christine Brisson, mairesse de Baie-Comeau, n'est pas insensible elle non plus aux charmes de la transformation à valeur ajoutée. «C'est la solution évidente. Nous voulons bonifier le port déjà ouvert à l'année. Nous avons aussi le traversier-rail qui nous relie à Matane et au réseau ferroviaire nord-américain.»

Mme Brisson assure que des projets concrets d'aciérie sont passés de l'étape conception à l'étape discussions. «Nous parlons actuellement avec plusieurs promoteurs. Les conditions n'ont jamais été aussi bonnes.»

Il n'y a qu'une barrière objective restante à ces développements: la capacité actuelle des aciéries occidentales n'a pas encore saturé. Les aciéries européennes fonctionnent, par exemple, à 60 à 65% de leur capacité. D'où une certaine circonspection. Mais comme la demande mondiale a atteint des sommets, cette capacité pourrait s'engorger bientôt.

En amont des usines de transformation, la preuve est là. À Fermont, sur les sites d'extraction du fer québécois, le boom atteint des proportions incontrôlables. «Nous accueillerions des usines de seconde ou troisième transformations les bras grand ouverts, confirme la mairesse de Fermont, Lise Pelletier. Nous avons tout intérêt à le faire. Mais tout va tellement vite! Juste avec l'extraction minière, notre population va doubler! Nous faisons déjà face à une pénurie de logements!»