Quand on entend PME, on comprend petites entreprises. Mais dans PME, il y a aussi moyennes. Quelles sont-elles? Comment le deviennent-elles? Quels sont leurs défis? La Presse présente le septième sujet d'une série de neuf parutions sur ces méconnues.

Paradoxalement, c'est le pédalo qui a fait passer Pelican à la vitesse grand V. Le pédalo mû par l'innovation, en fait. «C'est ce qui a propulsé l'entreprise», affirme Christian Élie, copropriétaire du manufacturier lavallois avec son frère Antoine.

En 1970, l'entreprise fondée par leur père Gérard Élie se spécialisait dans le thermoformage en sous-traitance. Elle a alors fabriqué le premier pédalo moulé avec ce procédé, qui consiste à aspirer et former contre un moule une feuille de plastique ramollie par la chaleur. Deux ans plus tard, l'entreprise fabriquait le premier canot en plastique thermoformé. En 1974, une première embarcation de pêche s'ajoutait au catalogue.

«Tous ces produits étaient fabriqués auparavant en fibres de verre, explique Christian Élie. Notre procédé nous permet de fabriquer beaucoup plus rapidement.»

En cinq ans, l'entreprise avait entièrement délaissé la sous-traitance pour se concentrer sur la fabrication de ses propres produits.

En 1995, les deux frères Élie ont racheté l'entreprise à leur père et lui ont donné un nouvel élan. Ils ont alors fait appel à des designers industriels pour concevoir des jouets de jardin et des luges.

«Mais la vraie innovation des 10 dernières années, ce sont les kayaks», lance Christian Élie.

Il a eu l'idée d'appliquer au kayak la technique de thermoformage en double coque, dite Twin-sheet, qui permet de mouler simultanément deux feuilles de plastique et de les assembler en une pièce creuse.

Pélican a conçu un premier modèle avec le réputé designer industriel Koen de Winter et l'a proposé sur le marché... avant même de savoir le fabriquer. «Je pensais donner la fabrication en sous-traitance, mais pendant mes vacances, j'ai vu dans un magazine sur le plastique qu'il y avait une machine d'occasion à vendre et je l'ai achetée», narre M. Élie.

Six mois plus tard, Pelican avait lancé la production. «En moins de 10 ans, Pelican est devenue la marque la plus répandue au monde dans le kayak», assure-t-il.

L'entreprise de quelque 375 employés a maintenant constitué une équipe interne d'une douzaine d'ingénieurs, designers et techniciens. «On cherche toujours ce qui va nous différencier de la concurrence. On n'aime pas faire des me-too products.»

Dans cet esprit, Pelican a lancé en 2011 la nouvelle marque Élie, pour commercialiser des kayaks thermoformés plus performants, avec un hydrodynamisme avancé. «C'est une prouesse, s'exclame Christian Élie. Nos designers ont travaillé 10 ans pour nous amener là!»

Des risques

Pelican fabrique toujours son produit emblématique, mais le petit esquif mû par une roue à aubes n'a jamais été synonyme de bolide à la fine pointe de la technologie. Sur les pédalos Pelican, l'innovation se trouve ailleurs. La configuration de l'embarcation a été étudiée pour réduire les importants coûts de transport. «Nous mettons 70 pédalos dans un camion, indique l'entrepreneur. Nos concurrents en mettent 53.»

Ce n'est pas faute d'avoir tenté des innovations plus radicales. Pelican a déjà conçu un pédalo à hélice qui pouvait atteindre 16 km/h. «Mais le prix était trop élevé et ça demandait trop d'efforts pour le peu de satisfaction. Pour tenir 16 km/h plus que 15 minutes, il faut être ultra musclé.»

En innovation, il est risqué de naviguer plus vite que son marché.