Automne 2007. Les marchés boursiers sont à leur sommet, un sommet de tous les temps. On se préoccupe peu de la tolérance au risque.

Au cours des deux trimestres suivants, les bourses montrent des signes de faiblesse, mais la confiance demeure. Après tout, les marchés ne peuvent pas toujours monter, se dit-on. Le risque ne fait pas encore partie des préoccupations.

Mais à l'été 2008, c'est la crise de liquidité. Le Québec n'y échappe pas. En août, les PCAA implosent. Arrive septembre, la crise de liquidité se transforme en crise financière. Le grand courtier américain Lehman Brothers déclare faillite. On craint alors pour tout le système bancaire américain. Les bourses dégringolent. En mars 2009, elles ne valent même plus la moitié de leur valeur d'il y a 18 mois.

Pour plusieurs, c'est la découverte de la tolérance au risque. Cette capacité de supporter la situation, d'encaisser le coup sans réagir, comme le décrit Martin Dupras, président du Conseil d'administration de l'Institut québécois de la planification financière (IQPF). «Plus simplement, la tolérance au risque, c'est la capacité de continuer à dormir lors des périodes de grande volatilité des marchés», dit-il.

Lorsqu'un client se présente dans une institution financière ou devant un conseiller financier pour établir une stratégie d'investissement, on lui demandera d'abord de répondre à un questionnaire dont l'objectif est de déterminer sa tolérance au risque.

Il n'existe pas de questionnaire uniforme. Chaque institution a le sien, mais ils se ressemblent. Les questions visent à établir les placements avec lesquels vous vous sentirez à l'aise. Elles visent également à établir comment vous réagirez devant différentes situations de baisse de votre portefeuille. «Les conseillers ont la responsabilité de mesurer votre tolérance», dit le président de l'IQPF.

On voudra aussi savoir si vous êtes parieur. Vous devrez, par exemple, choisir entre un gain assuré de 500$ ou le risque d'en gagner 1000$ ... avec la moitié des chances de tout perdre, peut-on lire dans le questionnaire de l'IQPF.

Le but est de placer les clients devant les situations qu'ils vivront, et les états d'âme qu'ils traverseront, explique Patricia Domingo, planificatrice financière chez RBC Gestion de patrimoine. On propose aux clients différents scénarios afin qu'ils évaluent leur zone de confort.

Les réponses permettront d'évaluer leur tolérance au risque. Mais attention, car tout cela demeure théorique. «C'est uniquement par l'expérience que vous découvrirez votre vraie tolérance au risque», prévient Martin Dupras.

Le risque du manque à gagner

Lorsque l'on évalue le résultat de ses placements en fonction de ses objectifs, il ne faut pas se contenter de regarder les rendements des différents titres qui composent le portefeuille. Il faut aussi se questionner sur le manque à gagner que l'on a peut-être subi, à cause d'une stratégie mal adaptée.

C'est pourquoi le risque doit se mesurer en fonction du rendement qu'il procure, explique Martin Dupras. Le risque n'est pas étranger au rendement. Dans les faits, le rendement est généralement proportionnel au risque que l'on a accepté de prendre. "Avoir une aversion trop grande envers le risque devient un risque en soi, car il pourrait vous priver de réaliser vos objectifs à plus long terme", dit M. Dupras.

C'est pourquoi il faut éviter de gérer ses placements de façon émotive. En 2009, après deux ou trois trimestres de baisse, le risque était de ne pas tenir le coup, de vendre ses actifs plus risqués et d'adopter une approche beaucoup trop conservatrice.

Une bonne compréhension du risque est essentielle au succès des investisseurs. "La pire erreur est de ne pas avoir prévu le changement d'environnement, de paniquer, et d'apporter des changements inappropriés à son portefeuille", dit Patricio Domingo, de RBC Gestion de patrimoine.

Les objectifs d'abord

Bien que la tolérance au risque demeure en tout temps un facteur important, bâtir un portefeuille commence d'abord par l'établissement des objectifs.

Les objectifs, c'est ce que le conseiller voudra d'abord connaître. Les définir permet entre autres de déterminer l'horizon de temps et les restrictions inhérentes à la composition du portefeuille, explique Martin Dupras, président de l'IQPF.

Les contraintes seront différentes selon ses objectifs. Si on vise l'accumulation du capital pour la retraite, l'horizon de placement est assez long pour ne pas avoir à se soucier d'éventuels décaissements. Le portefeuille doit inclure des titres de croissance pour assurer un rendement intéressant à long terme. Toutefois, si on souhaite épargner pour acheter sa première maison, l'horizon de temps est beaucoup plus court et l'échéance des placements doit l'être également. Le portefeuille doit donc être composé de titres peu risqués et encaissables à leur pleine valeur.

Dans la plupart des cas, les investisseurs ont plus d'un objectif. Le défi sera alors d'atteindre l'équilibre entre l'ensemble des objectifs et le risque que l'on sera prêt à accepter. Une des façons d'y arriver est de fractionner le portefeuille en fonction de chacun des objectifs, suggère Patricia Domingo, de RBC, Gestion de patrimoine. Un portefeuille pour chaque grand objectif facilitera la compréhension et la détermination du risque.