Au Québec, l'amateur de points et cartes de fidélisation de tout genre a de quoi être comblé! Comme les programmes affluent, les entreprises doivent multiplier les efforts pour accrocher les consommateurs et les garder. Voici quelques tendances et nouveautés.

Si vous êtes comme la grande majorité des Québécois, vous avez fort probablement dans votre portefeuille quelques cartes de fidélisation qui vous permettent d'amasser des points pour avoir droit à des cadeaux sous différentes formes.

Au Canada, 93,6% des gens participent à au moins un programme de fidélisation, alors qu'au Québec, c'est 92,4%.

«D'après ces chiffres de la firme internationale spécialisée en programme de fidélisation Colloquy, qui datent de 2009, le Canada est un des pays qui semblent les plus actifs dans le domaine», affirme Nadine Labbé, directrice, solutions aux particuliers, Master Card, Banque Nationale Groupe financier.

Profil des consommateurs

Jean-Charles Chebat, professeur au service de l'enseignement du marketing à HEC Montréal qui travaille sur la question des programmes de fidélisation depuis des années, remarque toutefois que des segments de la population sont plus sensibles que d'autres à ces primes. D'abord, il y a une question de proximité.

«Pour qu'une personne utilise sa carte de fidélité, elle doit pouvoir le faire près de chez elle. Généralement, les gens ne feront pas d'immenses détours pour aller dans un commerce où ils pourront accumuler des points», remarque-t-il.

Aussi, contrairement à ce que plusieurs peuvent penser, ce ne sont pas les plus pauvres qui courent le plus après les points, d'après le professeur Chebat.

«Ce sont les gens qui ont des revenus plus élevés que la moyenne, sans nécessairement être très riches, qui sont les plus sensibles aux attraits des cartes de fidélité. Ces gens consomment plus, alors on leur donne par exemple une carte platine avec plus de récompenses et d'avantages. Ces gens sont aussi très intéressants pour les entreprises parce que ce sont les plus fidèles. Lorsqu'ils adoptent une entreprise, ils y sont fidèles dans 96% des cas.»

Bases de données

Pour les entreprises, mettre sur pied un programme de fidélisation peut représenter un important investissement.

Selon Jasmin Bergeron, professeur de marketing à l'École des sciences de la gestion (ESG) UQAM, cela peut aussi rapporter gros.

«Et pas seulement pour les raisons les plus évidentes de fidélisation de la clientèle, affirme-t-il. Le gros avantage caché de ces programmes, ce sont les bases de données.»

Il donne l'exemple de Costco.

«C'est l'un des piliers en la matière. Pas moyen de rien acheter chez Costco sans acheter leur carte! Pour l'avoir, il faut remplir le formulaire et par la suite, Costco peut voir tout ce qu'on achète. Pour une entreprise, savoir quel genre de personne achète ses produits, ça vaut de l'or! Elles peuvent donc acheter ces informations à Costco et par la suite, s'en servir pour mieux cibler leur stratégie de marketing», explique M. Bergeron.

Pour multiplier ses points, le consommateur qui porte tous ses achats à une seule carte de crédit qu'il ne rembourse pas complètement à la fin du mois peut aussi donner beaucoup à l'institution financière en intérêts.

Avantage: entreprise

Le consommateur doit également être conscient, affirme M. Chebat, qu'en achetant toujours ses produits dans les mêmes endroits, il perd en variété.

«C'est certain qu'on manque alors certaines promotions intéressantes faites par des concurrents», précise-t-il.

Les consommateurs peuvent toutefois tirer profit de leur fidélité lorsqu'ils ont accès à des primes. Mais encore faut-il y arriver!

«J'ai lu dans un article de 2007 du Journal of Marketing que 82% des gens qui ont des cartes de fidélité ne dépensent pas suffisamment pour avoir droit à des récompenses. C'est quand même substantiel comme pourcentage!», indique M. Chebat.

Le professeur en conclut donc que généralement, si un programme de fidélisation est payant pour le consommateur, il l'est aussi pour l'entreprise qui le met en place.

«Pour bénéficier des avantages, le consommateur doit dépenser beaucoup tout en restreignant son horizon de magasinage, rappelle-t-il. C'est un peu comme dans le mariage, finalement!»

PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Contrairement à ce que plusieurs peuvent penser, ce ne sont pas les plus pauvres qui courent le plus après les points, explique le professeur Jean-Charles Chebat.