Alors que près de 80 % des grains destinés à produire de la moutarde dans le monde proviennent de l’Ouest canadien, l’entreprise La Morin, qui pigeait jusqu’à tout récemment dans le grenier du pays, a décidé de se tourner vers les champs québécois pour produire le populaire condiment jaune.

L’entreprise

La moutarde, Julien Morin est littéralement tombé dedans quand il était petit. « J’ai grandi dans une famille où tout le monde parlait de moutarde. Mon père amenait des pots de moutarde chez mon grand-père. Les dimanches, c’était comme un concours pour savoir qui allait trouver la meilleure. Pour mon grand-père, ce n’était jamais la bonne, ce n’était jamais de la vraie moutarde. »

Ainsi, un peu avant la pandémie, Julien Morin a commencé à s’amuser et à faire des tests dans sa cuisine pour créer la sienne. La COVID-19 s’est pointée et celui qui travaillait comme pilote de ligne a perdu son emploi. Il s’est donc lancé tête première dans son projet d’entreprise. Plus de deux ans plus tard, les différentes gammes de moutarde La Morin ainsi que la vinaigrette se retrouvent sur les tablettes de 500 points de vente. Le produit a même reçu le sceau d’approbation de son grand-père maintenant décédé.

Et depuis peu, les moutardes de Julien Morin ont quelque chose de différent. Elles sont préparées avec des grains de moutarde québécois, cultivés par Les Grains Côté, dont les champs sont situés près de Drummondville. Les étiquettes, affichant fièrement le logo québécois et la provenance locale des grains, sont en cours d’impression.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Julien Morin

« Avant, on prenait des grains qui venaient de l’Ouest canadien. Ce sont 80 % des grains de moutarde dans le monde qui sont cultivés en Saskatchewan, précise l’entrepreneur âgé de 37 ans. L’année dernière a été l’une des pires récoltes depuis les 40 dernières années, ce qui a créé une pénurie mondiale de moutarde. Et moi, ça faisait un bout de temps que je cherchais un cultivateur québécois qui était prêt à embarquer dans l’aventure. » La famille Côté a sauté dans le train.

« On a décidé d’allier nos deux familles pour faire une première moutarde québécoise à grande échelle, ajoute-t-il. Ça pousse très bien ici. La moutarde qu’on fait actuellement est faite avec des grains québécois. C’est même bien meilleur que les grains qu’on a eus de l’Ouest. »

À raison de 1500 pots par semaine, le précieux condiment jaune est produit et emballé à Montréal, rue Notre-Dame. « Les grains arrivent dans des sacs et ils ressortent en pots de moutarde. »

L’entreprise compte actuellement sur une petite équipe de quatre personnes.

L’avenir

Pour les années à venir, Julien Morin ne s’en cache pas, il souhaite que chaque Québécois ait son pot de « vraie moutarde » dans le frigo. « On veut vraiment être la moutarde des Québécois. Il y a beaucoup de moutardes qui sont importées, qui sont faites dans des usines, on y ajoute des sulfites, des agents de conservation, ça fait le tour du monde avec nos grains de moutarde. On aimerait sensibiliser les gens à consommer local. »

D’autres produits comme de la mayonnaise ou encore des croustilles à base de moutarde pourraient voir le jour. « Et mon rêve serait de boucler la boucle en ayant notre moutarde québécoise sur les tablettes en France. »