Qu’on soit un athlète, un artiste ou un entrepreneur, on se vante publiquement davantage de nos bons coups que des mauvais. Et que dire de nos gaffes ?

En avril dernier, alors qu’il travaille sous le soleil de la République dominicaine, Bruno Renaud passe un drôle de lundi de Pâques. La sueur coule sur ses tempes, mais pas parce que la température est tropicale. Il vient d’envoyer un courriel. Une formalité en d’autres temps, d’autres cieux. Mais le cofondateur de Jameo, une PME de vêtements personnalisés, a choisi la mauvaise liste de destinataires…

« Je devais envoyer ma communication aux investisseurs avec nos résultats d’affaires, raconte Bruno Renaud. Je l’ai envoyée à 4600 personnes, plutôt que 23, dont des clients. » Quelques secondes plus tard, il reçoit des messages qu’il ne devrait pas recevoir en temps normal. « Mon premier réflexe a été de relire ce que je venais d’envoyer, poursuit-il. C’était au moins un bon mois, mais je parlais d’augmentation de nos prix. »

Un miracle en ce lendemain de la résurrection du Christ ! La gaffe n’a jamais été catégorisée d’impardonnable. Au contraire, elle a motivé l’entreprise à être davantage transparente avec ses employés et ses clients. « Des gens nous ont félicités pour notre croissance, affirme Bruno Renaud. Trois personnes nous ont même envoyé leur CV en nous écrivant : “Si jamais vous avez un poste à pourvoir.” ! »

Une nouvelle section sur le site de l’entreprise de Sherbrooke, baptisée Développement durable, est plutôt née de la gaffe. En cette période de crise de main-d’œuvre, où les organisations ouvrent grand leurs bras pour attirer des employés, cette section a des airs de liste d’arguments pour convaincre les gens de postuler !

On y lit notamment que des employés ont tout le loisir de travailler à distance, jusqu’en Amérique du Sud si ça leur dit. Que la douzaine d’employés de Jameo est impliquée dans le plan d’affaires de l’entreprise. Qu’ils ont la possibilité de devenir actionnaires. Que l’entreprise est certifiée carboneutre par LCL Environnement. Et, surtout, que les vêtements de Jameo sont créés au Québec, mais conçus au Pakistan.

Ainsi pouvons-nous lire : « Nous avons développé une relation de confiance et d’amitié avec notre fournisseur. En voici une preuve [photo à l’appui] : nous avons été invités au mariage du propriétaire de notre usine de production et notre PDG, Bruno, était garçon d’honneur. Depuis nos débuts, nous travaillons en étroite collaboration avec notre fournisseur et lui rendons visite régulièrement. »

« Pendant la pandémie, à l’heure du Panier bleu, bien des entreprises se sont dites québécoises, mais elles achètent en Chine, par exemple, constate Bruno Renaud. Tout ne peut être fait au Québec. Mais est-ce que les conditions sont adéquates ? »

Notre mot d’ordre est donc la transparence. Et notre but est d’avoir un plan de production durable. On veut éviter, par exemple, de fabriquer des vêtements promotionnels cheaps, afin que ceux qui les reçoivent ne s’en servent pas juste comme pyjama !

Bruno Renaud, cofondateur de Jameo

Le site indique aussi quelle part de la facture des clients est consacrée à la recherche et au développement, aux profits et aux salaires. « On n’a pas peur de partager le bon et le moins bon à nos investisseurs, par exemple », indique Bruno Renaud.

Une nouvelle plateforme

Jameo a récemment reçu un financement de 1,1 million de dollars d’anges investisseurs ainsi que de la BDC et d’Investissement Québec pour la création et la mise en ligne d’une plateforme technologique qui permettra aux clients de concevoir eux-mêmes leurs articles personnalisés. Celle-ci devrait être opérationnelle dans quelques mois. Elle contribuera à toucher une clientèle plus large et à solidifier la chaîne d’approvisionnement verticale de Jameo. « Passer par un distributeur pour nous est plus ou moins possible, car nous ne sommes pas dans les produits préfaits », explique Bruno Renaud.

Avec cette plateforme, les clients vont pouvoir dessiner eux-mêmes leurs vêtements et choisir les grandeurs, notamment, tout en évitant les étapes de la soumission papier et du rendez-vous en personne. « Désormais, les commandes seront faites plus vite, précise Bruno Renaud. On sera plus dans l’accompagnement. »

Jameo (autrefois Unique Wool) compte parmi ses clients des universités, des PME, de jeunes pousses et de grandes organisations telles que Cascades et Decathlon. « Les entreprises ont une pénurie d’employés, donc elles cherchent à augmenter le sentiment d’appartenance, estime Bruno Renaud. Et ça passe souvent par le vêtement (hoodie, polar…) personnalisé, unique. »

L’entreprise dit avoir eu une croissance de ses ventes de 108 % dans la dernière année et s’attend à un autre bond entre 75 % et 100 % pour l’année en cours.

En savoir plus
  • 100 %
    Proportion des sacs en plastique que Jameo souhaite éliminer en optant pour des solutions plus durables
    Source : Jameo
    2024
    Année à laquelle Jameo souhaite avoir obtenu la certification B-Corp
    Source : Jameo