Benoit Bousquet n'avait pas idée du tourbillon dans lequel allait le conduire le nom de son entreprise.

Souhaitant voler de ses propres ailes en 2004, il fonde son agence de communication et la désigne par 4 lettres : Ü-B-E-R.

« En allemand, ça veut dire "sur", mais ça inspire surtout l'expression "être en avant", explique-t-il. C'était un nom intéressant sur le plan graphique aussi, et le "Ü" apportait un côté européen exotique. »

Dès lors, il se met à la chasse à l'adresse web « UBER.com ». Sans trop de surprise, il découvre qu'elle est déjà prise, propriété d'un blogueur torontois.

Mais il y avait de l'espoir : on allait bientôt la remettre en vente.

« J'étais assis à minuit devant mon ordinateur au moment où elle allait être disponible, prêt à l'acheter. Et à minuit et une seconde, elle était déjà vendue. » - Benoit Bousquet, président d'Archipel

L'acheteur - il le découvrira ensuite - est une entreprise en démarrage située en Californie. L'entrepreneur prend immédiatement contact avec ses dirigeants pour acheter les droits d'UBER.com, sans succès. Il n'obtiendra d'ailleurs jamais de réponse de leur part.

Les mois passent, et le spécialiste de marketing oublie peu à peu l'existence de cette petite entreprise californienne qui souhaite révolutionner l'industrie du taxi... jusqu'à ce qu'il croise son nom lors d'un événement à Toronto.

« À l'époque, je ne m'en faisais pas du tout, dit-il. Notre agence n'avait pas encore une grande notoriété et Uber taxi n'était pas installée au Québec. Mais quand c'est arrivé, là on s'est demandé ce qui allait se passer. »

C'est à l'automne 2013. Uber taxi se fait d'abord connaître à Montréal, puis à Québec.

Bientôt, son nom figure quotidiennement dans le journal et devient un problème pour la petite agence de 23 employés établie à Longueuil.

Celle-ci reçoit chaque jour de 10 à 15 appels liés au monde du taxi : tantôt des questions, tantôt des soumissions, mais aussi des plaintes.

« Uber taxi n'a pas de numéro de téléphone pour faire du service à la clientèle, alors ça finissait par tomber chez nous. Au début, on trouvait ça plutôt rigolo, mais lorsque le nom a fait l'objet de presse négative, c'est devenu un problème d'affaires pour nous. » - Benoit Bousquet

Selon lui, son agence était en train de bâtir une notoriété associée à un nom qui avait une tout autre signification pour la plupart des Québécois.

« Nos clients principaux savaient qui nous étions, mais pour d'autres, il fallait toujours se présenter comme "l'agence UBER, pas la compagnie de taxis", dit-il. C'est comme si notre nom appartenait à quelqu'un d'autre. »

Le changement de nom et d'image était devenu incontournable. « Pour nous, c'était un "no-brainer", ajoute-t-il.

« REBRANDING »

C'est au début de l'année 2016 que l'agence ÜBER entreprend un changement d'image qui allait l'amener à adopter le nom « Archipel, synergie créative ».

Benoit Bousquet et son équipe en profitent pour redéfinir les valeurs de l'entreprise en interrogeant sa clientèle.

Une liste d'éléments distinctifs, puis une série de noms potentiels ressortent de cette recherche. « Archipel » s'est vite imposé par son symbole, selon son président.

Voulant marquer le coup de la transformation, Archipel a profité de son ancien nom pour faire parler d'elle. Une pleine page publicitaire a même été achetée dans un quotidien montréalais.

Deux capsules vidéo ont aussi été créées pour expliquer le changement de nom. La première, composée à partir des appels reçus quotidiennement, et l'autre, qui met en scène des chauffeurs de taxi.

Comme quoi même un nom qui a mauvaise presse peut faire parler de soi positivement.

LES CONSEILS

Comment réussir une opération de « rebranding » ? Émilie Poirier, présidente de l'agence MixoWeb, y va de ses conseils sur le sujet. Sa propre entreprise vient d'ailleurs d'adopter ce nouveau nom après avoir délaissé l'ancien Coutu Communication.

Soyez logique

On ne change pas de nom sans raison. « Le changement de nom doit s'inscrire dans la stratégie de croissance, indique la spécialiste. Pour vous en assurer, tentez de mettre en mots une explication claire et concise pour expliquer le changement de nom aux clients. »

Gardez un lien avec le passé

À moins d'un élément négatif majeur, faites un pont entre le passé et le présent en vous inspirant du slogan ou du « branding » de l'ancienne image. MixoWeb, par exemple, a conservé la couleur orange qui définissait autrefois Coutu Communication.

Soignez vos communications

Ne faites pas le changement en secret et communiquez le changement de nom sur toutes vos plateformes. « Les clients actuels ou ceux qui souhaitent le devenir pourraient penser que vous n'existez plus », explique Émilie Poirier. C'est aussi le bon moment pour rassurer vos clients actuels concernant les qualités qui vous distinguent et qui restent en place », ajoute-t-elle.

Changez votre affichage web

Il faudra maintenant mettre de l'avant la nouvelle image, que ce soit par l'entremise de sa page Facebook, ses adresses courriel, documents papier, etc. Vous pouvez traîner l'ancienne identité un certain temps question de faire un pont, mais pas trop longtemps afin de conserver une image professionnelle, explique la spécialiste.

Pensez à votre référencement Google

« Ne faites pas l'erreur d'oublier votre référencement, souligne Émilie Poirier. Il est important de bien planifier son changement et d'informer Google si le nom de domaine change. Ensuite, continuez vos efforts de référencement, mais avec votre nouveau nom. »