Pour sonder les profondeurs de la Terre à la recherche de minerais, Abitibi Géophysique avait besoin d'une nouvelle antenne, plus sensible que tout ce qui existait. Et c'est en payant la bière qu'elle a trouvé le chercheur capable de la concevoir.

L'entreprise établie à Val-d'Or se spécialise dans l'exploration minière. Son appareil InfiniTEM émet des ondes vers le sous-sol, puis interprète leur écho à la recherche de filons de minerais cachés jusqu'à 1 km sous la surface.

Pour parvenir à sonder à de telles profondeurs, alors que la limite était d'environ 200 mètres il y a quelques années, Abitibi Géophysique a toutefois dû concevoir une antenne très sensible, plus que le modèle de référence jusque-là, nommé SQUID.

C'est en mars 2011, lors d'un congrès de l'industrie minière à Toronto, que les choses ont débloqué. Quelques années plus tôt, Abitibi Géophysique avait pris l'habitude d'organiser à son stand des «5 à 7» au cours desquels elle invitait tous les participants à prendre une bière. Le congrès ayant lieu dans un secteur de Toronto plutôt désert, l'invitation d'Abitibi Géophysique était très populaire.

Le chercheur Jim Macmae, du Royal Melbourne Institute of Technology (RMIT), en Australie, faisait partie de ces congressistes ayant mordu à l'appât houblonné. Sommité dans le domaine, M. Macmae est notamment l'un des créateurs de l'antenne SQUID.

«Nous étions là-bas pour exposer nos services et l'InfiniTEM, et il est venu nous voir au stand pour dire qu'il avait vu ce que nous faisions et nous demander quelle sorte d'antenne nous utilisions», raconte Pierre Bérubé, président d'Abitibi Géophysique.

«C'est là qu'il nous a proposé son projet, que nous avons financé, et nous avons maintenant l'exclusivité mondiale que nous appelons ARMIT, pour Abitibi Royal Melbourne Institute of Technology.»

«L'antenne parfaite»

M. Bérubé n'hésite pas à décrire cette antenne comme «l'antenne parfaite».

C'est que sa rivale, la SQUID, atteint la supraconductibilité nécessaire à sa grande sensibilité en étant réfrigérée au zéro absolu, soit à-273°C. Il en résulte d'importants défis logistiques, d'autant que l'exploration se fait souvent dans des régions reculées.

Ce n'est pas le cas de la sonde ARMIT, qui fonctionne à température normale. Comme elle est plus facile à transporter, on peut explorer davantage dans la même période de temps, en obtenant la même qualité de résultats. Il a fallu environ 18 mois à M. Macmae pour la créer.

Armée de cette pièce d'équipement hors du commun, Abitibi Géophysique parcourt maintenant le globe pour le compte de diverses entreprises minières. Elle a aussi conclu trois ententes de transferts technologiques avec des entreprises de géophysique établies au Burkina Faso, au Maroc et en Côte-d'Ivoire.

Celles-ci ont maintenant elles aussi accès à la sonde ARMIT et leur personnel a reçu la formation nécessaire. L'entreprise québécoise conserve toutefois le rôle d'analyser les données, qui nécessite une expertise particulière.

ABITIBI GÉOPHYSIQUE

Qui: Pierre Bérubé, 25 employés permanents au siège social et de 50 à 75 autres sur le terrain.

L'idée: Une sonde permettant d'explorer le sous-sol à une profondeur allant jusqu'à 1 km.

L'ambition: Devenir la plus grande entreprise de services géophysiques pour l'exploration minière au Canada, d'abord, puis au monde.

Ils y croient et y ont misé de l'argent: Pierre Bérubé