Stéphane Élie s'est donné pour mission de rapatrier des emplois au Québec. Le président et fondateur de Symbiose Communication, un centre d'appels qui offre des services en sous-traitance, veut en effet ramener dans la Belle Province les emplois dans son secteur d'activités qui ont pris le chemin de l'Afrique du Nord et d'Asie.

Il est certes beaucoup moins cher (environ 3$ l'heure) de faire appel à des sous-traitants en Inde, aux Philippines, en Égypte, au Maroc ou en Tunisie pour y établir son service à la clientèle. Stéphane Élie est toutefois persuadé que le jeu n'en vaut pas nécessairement la chandelle.

«J'ai des exemples d'entreprises d'ici qui, oui, ont économisé beaucoup d'argent en déménageant leur service à la clientèle à l'autre bout du monde, dit-il. Mais elles ont tellement perdu de clients insatisfaits, qu'elles ont dû investir des sommes incroyables en marketing pour se réapproprier cette clientèle. Où est la logique?»

Le jeune entrepreneur de 37 ans sait de quoi il parle. À 17 ans, il occupait déjà un emploi dans un centre d'appel. Quelques années plus tard, il était promu directeur. Pendant plus de 12 ans, il a ainsi fait le tour du Québec, où il a dirigé des équipes, mais aussi supervisé des impartitions de services ailleurs dans le monde.

Symbiose Communication n'existe que depuis 2010, mais elle en est à son quatrième agrandissement. En deux ans, la PME du Vieux-Longueuil est passée de 7 à 200 employés. Son chiffre d'affaires, qui demeure confidentiel, se situe entre 2 et 5 millions.

L'entreprise a réussi, en peu de temps, à recruter de bons clients que Stéphane Élie préfère taire. Disons simplement qu'ils sont des acteurs importants du Québec inc. La PME oeuvre dans les secteurs bancaires, des télécommunications, des assurances, mais aussi de la philanthropie. Malgré son jeune âge, la PME est déjà en pourparlers pour acquérir un concurrent québécois qui compte 350 employés dans deux centres d'appels.

Stéphane Élie cherche donc à élargir sa clientèle, mais surtout à asseoir sa notoriété. «Je veux créer les meilleurs centres d'appels qui soient», dit ce père de famille qui ne possède aucun diplôme.

Pour ce faire, l'entrepreneur mise sur une saine gestion des ressources humaines. Jamais, dit-il, ses centres d'appels ne dépasseront les 200 employés. «Je veux garder une ambiance familiale. Je connais presque tout le monde par son prénom. Le salaire moyen est de 12 à 13$ l'heure. C'est souvent un emploi temporaire pour les étudiants ou les nouveaux arrivants. Le taux de roulement dans les centres d'appels est généralement très élevé. Ici, il est parmi les plus faibles.»

L'entreprise longueuilloise travaille principalement en français et en anglais. Mais Stéphane Élie courtise actuellement un important client californien du secteur alimentaire. S'il obtient ce contrat, le président ajoutera l'espagnol à son offre de service. D'ailleurs, la PME pourrait, dès demain matin, travailler en huit langues si elle le voulait.

De trop gros lièvres

Symbiose Communication a, fait intéressant, négocié une entente avec le géant allemand Bosch, lequel possède quatre centres d'appels polyglottes en Europe.

«Ils avaient le contrat avec le Cirque du Soleil. Mais le Cirque a tenu à déménager son service à la clientèle en Amérique du Nord. Il a donc demandé à Bosch d'y avoir un pied-à-terre. C'est comme ça qu'on s'est associé avec l'entreprise allemande. Malgré notre alliance, le contrat nous a échappé. Mais nous serons là lors du prochain appel d'offres», assure Stéphane Élie.

L'entrepreneur a de grandes ambitions. Il possède, dit-il, une liste de 600 clients potentiels. Et il ne compte pas lâcher prise. Bien sûr, il veut gérer sa croissance intelligemment. Courir trop de (gros) lièvres en même temps n'est pas une sinécure. C'est ce que les gens du Cirque du Soleil lui ont gentiment rappelé lorsqu'il a voulu savoir pourquoi il n'avait pas remporté l'appel d'offres de la bande à Guy Laliberté.

Selon Stéphane Élie, le service à la clientèle en sous-traitance est présent dans à peine 20% à 30% des entreprises québécoises. Aux États-Unis, c'est plutôt entre 85% et 90%. «Les entreprises d'ici s'en vont inévitablement vers ça. Ma job est de leur rappeler qu'ils ont tout avantage à faire affaire avec des entreprises québécoises plutôt que d'aller ailleurs dans le simple but d'économiser de l'argent à court terme», conclut-il.