Patrice Godin est du genre expéditif en affaires. Moins de 3 ans après la fondation de son entreprise, Les marques Nuway, il a créé 850 variétés d'engrais, de semences et de terreaux dont les ventes dépassent les 5 millions de dollars. Et le voilà sur le point de conquérir le Canada et même de faire une percée en France.

À ce rythme-là, Patrice Godin, 51 ans, a vu sa chevelure devenir complètement blanche. «Les quelques cheveux poivre et sel qu'il me restait ont complètement disparu», explique celui qui dit se classer bon troisième sur le marché canadien des produits destinés à l'horticulture ornementale. Il se bat contre les multinationales C.I.L. et Scott's, dont les ventes se chiffrent en dizaines, voire en centaines de millions.

«L'horticulture a atteint un plateau; la génération Y jardine très peu. Les possibilités de percer de nouveaux marchés sont inexistantes. Il faut donc aller gruger des parts aux autres. Et c'est ce que nous faisons», s'enthousiasme Patrice Godin, un hyperactif qui travaille dans le domaine de l'horticulture depuis maintenant 37 ans.

Son créneau

Comment l'entrepreneur s'y prend-il pour marquer des points? Il sévit là où les multinationales ne veulent pas s'aventurer. Autrement dit, le président et fondateur de Nuway se fait un plaisir de notamment créer des marques privées, peu importe le volume demandé.

«Un client me demande de lui faire un sac d'engrais à son image, je lui en fais en sept jours. Et je suis capable de livrer une commande en 48 heures. L'avantage, quand on est petit, c'est qu'on peut se retourner sur un 10 cents», lance celui qui souhaite voir sa PME atteindre des ventes de 25 millions à moyen terme.

D'ailleurs, au-delà de son expertise dans le domaine horticole, Patrice Godin aime à se présenter comme un féru de marketing. Créer des emballages est pour lui une véritable passion. Depuis 2008, il dit avoir investi 2 millions dans la création et l'impression de nouveaux emballages en plastique souple, dont certains sont refermables à la manière d'un Ziploc. «Une première dans l'industrie», tient-il à préciser.

Selon M. Godin, 80% de tous les produits horticoles sont achetés par des femmes. «Je crée donc des emballages attrayants. Ça fait drôle à dire, mais quand je fais un nouvel emballage, c'est comme si je développais un parfum», dit-il le plus sérieusement du monde.

La PME de Saint-Michel, au sud de Montréal, vend ses propres marques, dont Nuway, Révolution verte, Génération verte, Botanika vert, etc. Elle compte aussi une gamme de graines pour les oiseaux offerte sous la marque Yellow Bird.

L'entreprise de 13 employés vend 80% de sa production au Québec, majoritairement dans les centres de jardin indépendants, de même que dans certaines chaînes de quincailleries, dont BMR, Pro, Canac Marquis, etc. Elle fait également affaire directement avec les terrains de golf et les municipalités.

Les 20% résiduels trouvent preneur dans le reste du Canada, où Nuway vient de faire son entrée dans les Home Depot, Home Hardware, de même que dans la chaîne Ace. À court terme, Patrice Gordin souhaite voir son ratio de vente atteindre 50% au Québec et 50% dans le reste du Canada.

Il ne dit pas non au marché américain, auquel ses nouveaux partenaires Home Depot et cie pourraient lui donner accès. Pour le moment, c'est le marché français qui est dans la ligne de mire de l'homme d'affaires québécois. Nuway est actuellement en pourparlers avec un agent de vente de l'Hexagone dans le but avoué d'y exporter la marque haut de gamme Botanika vert.

«On aimerait être là au début de 2012. Si tout se passe bien, on veut établir un centre de distribution là-bas. On va miser sur l'approche marketing encore une fois. On utilisera le même emballage anglais-français qu'ici. On ne se met pas trop de pression pour commencer. Si on vend pour 250 000 euros la première année, on va être heureux», affirme Patrice Godin.

Le chef d'entreprise le reconnaît: il aurait pu démarrer son entreprise de façon plus modeste. Mais avec son expérience, entre autres à titre de directeur chez Nutrite, où il s'est fait de nombreux contacts, il a voulu y aller à fond la caisse. Depuis ses débuts, il peut compter sur l'aide de Roger Isabelle, important maraîcher et commerçant de sacs de terreau de Saint-Michel. MM. Godin et Isabelle se partagent l'actionnariat de Nuway.

Patrice Godin, qui a fait ses classes en entrepreneuriat en fondant une agence de vente en 2001, ne possède pas de diplôme dans un secteur donné. Il dit avoir appris «sur le tas». À 14 ans, comme emploi d'été, il travaillait dans un centre de jardin de Saint-Lambert. «J'ai lu plus de 1000 livres sur l'horticulture. J'ai animé des émissions sur le sujet à CKVL dans les années 80 et j'ai été chroniqueur télé à Cogeco. Je dois avoir prononcé 500 conférences dans ma vie», se souvient ce bourreau de travail.