Avec son économie ouverte et sa croissance solide, la Tunisie avait commencé à séduire les PME québécoises. La chute du régime de Zine el-Abidine Ben Ali vient jeter une douche froide sur cette relation naissante.

«C'est un marché qu'on avait l'intention de développer», affirme le président des Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ), Simon Prévost.

Un bon argument

La Tunisie avait un bon argument pour intéresser les entreprises québécoises. Grâce à l'accord de libre-échange existant entre la Tunisie et l'Europe, l'accès au marché européen est plus facile qu'à partir du Québec, explique-t-il.

Un forum organisé par les MEQ l'automne dernier avait mis en lumière les avantages de la Tunisie. «C'est une économie ouverte, qui exporte 55% de sa production et qui croît à un bon rythme de 4, 5, 6%, résume Simon Prévost. Il y avait pas mal d'intérêt.»

Tellement qu'une deuxième présentation de ce forum était prévue pour le printemps.

La Tunisie, avec sa population de 10 millions, est plus connue pour ses attractions touristiques.

Son important voisin algérien a longtemps attiré toute l'attention des entreprises sur lui. Mais la Tunisie est déjà sur le radar de quelques entreprises québécoises, et pas les moindres.

Bombardier Transport avait reluqué le contrat du réseau ferroviaire de Tunis accordé l'an dernier. BRP s'est trouvé un distributeur local pour vendre ses véhicules récréatifs en Tunisie. «On suit évidemment ce qui se passe, mais ça n'a pas d'impact sur nos activités», assure la porte-parole de l'entreprise, Johanne Denault.

SNC-Lavalin a remporté il y a quelques mois un contrat de 340 millions de dollars pour la conception et la construction d'une centrale au gaz naturel de 420 mégawatts à Sousse.

Le chaos qui règne dans le pays depuis la fuite du président ne change en rien les plans de SNC-Lavalin. «Nous entrons présentement dans la phase d'embauche pour le projet et les travaux débuteront dans les prochaines semaines, selon l'échéancier prévu», a fait savoir par courriel la porte-parole, Leslie Quinton.

Une trentaine de personnes travaillent dans les bureaux de l'entreprise à Tunis, la capitale. «Tous sont sains et saufs, les activités de SNC-Lavalin en Tunisie n'ont pas été touchées», dit-elle.

Trop d'incertitudes

Pays relativement accueillant pour les investissements étrangers, la Tunisie pourrait le rester, mais, pour le moment, l'incertitude est trop grande, estime de président des Manufacturiers et exportateurs du Québec. «Si on a projets, vaut mieux attendre», estime-t-il.

C'est aussi l'avis du président de la Chambre de commerce canado-tunisienne, Abdeljelil Ouanès, qui reste toutefois optimiste pour la suite des choses. «J'ai beaucoup d'espoir que les choses vont dans le bon sens», a-t-il dit, en soulignant que le gouvernement provisoire a déjà annoncé des élections dans six mois.

En dépit d'affinités culturelles, comme une langue partagée, les relations commerciales entre le Québec et la Tunisie restent modestes.

En 2009, le Québec a vendu pour 13,8 millions de dollars de marchandises à la Tunisie, dont des parties de locomotives, des vêtements usagés et des véhicules de petites cylindrées. Les Québécois ont acheté la même année pour 18,1 millions de dollars de produits tunisiens, dont les principaux sont l'huile d'olive et les dattes, selon les chiffres de l'Institut de la statistique du Québec.