Maintenant qu'il a son «dream team», comme il le dit lui-même, le designer montréalais Andy Thê-Anh est prêt à conquérir le monde. Depuis qu'Étienne Lecompte, 29 ans, a été nommé président de l'entreprise, il y a trois mois, le tandem veut faire de la marque Andy Thê-Anh «une référence incontournable dans le marché international de la mode féminine».

Et ils ont de bonnes chances d'y parvenir. Avec ses 18 ans d'expérience dans le domaine de la mode, dont trois à son compte, Andy Thê-Anh vend déjà 60% de ses créations aux États-Unis, 10% en Grèce et au Moyen-Orient et le reste au Canada. Quant à Étienne Lecompte, il se présente comme un ancien de Deloitte qui possède un MBA de l'INSEAD, prestigieuse école de management de la région parisienne.

 

Haut de gamme

Premier changement de cap: la marque Andy Thê-Anh fait désormais uniquement dans le haut de gamme. «En temps de récession, il n'y a que deux secteurs qui sont peu ou pas touchés: le haut de gamme et le très bas de gamme. Notre choix était donc clair», explique M. Thê-Anh.

Le designer filiforme est âgé de 44 ans mais en paraît 25. Il est le chouchou de plusieurs vedettes québécoises: Mistou, Hélène Bourgeois-Leclerc, Anne Dorval, etc.

Ensuite, l'entreprise de mode, dont le chiffre d'affaires est en deçà de 5 millions de dollars, est à restructurer ses trois boutiques canadiennes (deux à Montréal et une à Toronto). Elle entend mettre au point un nouveau concept propre à ses boutiques, qui lui permettra de s'implanter plus facilement dans d'autres villes. À court terme, une deuxième boutique devrait voir le jour à Toronto. Sinon, la PME serait en pourparlers avec des partenaires en Europe et en Asie.

Et pour ce qui est d'offrir la griffe Andy Thê-Anh partout dans le monde, l'entreprise favorise deux stratégies: tout d'abord, embaucher des agents qui favoriseront les ventes grâce à leurs contacts et leur expertise; ensuite, préparer le terrain d'un territoire donné par l'entremise d'événements spéciaux liés à la mode.

La collection Andy Thê-Anh, qui va de la chemise à 250$ à la robe de soirée à 2500$, a également été resserrée, c'est-à-dire que la PME offre 50% moins de modèles qu'avant. Le développement est un exercice qui lui coûtait passablement cher.

Quant à l'image glamour et facile que la plupart des gens accolent à l'univers de la mode, Andy Thê-Anh a de petites nouvelles pour eux. «C'est un domaine qui ressemble beaucoup à la techno. C'est un peu comme les téléphones cellulaires ou les ordinateurs; il faut arriver avec des nouveautés tous les six mois», explique M. Thê-Anh qui dort très peu ces temps-ci. En effet, le designer présente sa collection printemps-été 2010, ce soir même au Marché Bonsecours dans le cadre de la Semaine de la mode de Montréal.

Année difficile

L'année 2008 a été particulièrement difficile pour la PME. Dans la foulée des crises financière et économique, ses ventes aux États-Unis (qui, rappelons-le, représentent 60% de ses revenus), ont chuté dramatiquement. «C'est un événement qui a nous a permis de prendre du recul afin de mieux rebondir», explique Étienne Lecompte. L'entreprise ne vise rien de moins qu'une croissance de 50% pour sa collection printemps-été 2010 dans le marché nord-américain.

Andy Thê-Anh est fier de dire que 80% de ses vêtements sont entièrement fabriqués à Montréal. Les 20% résiduels concernent surtout des pièces et des accessoires confectionnés à la main que plus personne ne veut faire à Montréal. «Même si je suis prêt à payer le gros prix, il n'y a plus cette expertise à Montréal. Je dois me tourner vers l'Asie», dit le Vietnamien d'origine arrivé au Québec en 1981 et qui a notamment travaillé pour Parasuco, Tristan&Raffinati.

Dans sa stratégie d'expansion, l'entreprise de la rue Saint-Urbain ne désire aucunement entrer en concurrence avec les Prada, Gucci, Chanel et autres Donna Karan de ce monde. Ces géants disposent de moyens colossaux qu'Andy Thê-Anh ne pourra probablement jamais s'offrir. Le designer québécois cherche plutôt à être en marge de ces marques hyper connues, à offrir autre chose à une clientèle qui justement cherche à se démarquer.