Longtemps sous-estimée, la connaissance de la culture du pays de notre vis-à-vis d'affaires est pourtant un outil indispensable.

Un faux pas culturel peut être fatal pour une PME qui a investi temps et argent pour gagner un marché étranger. «Nous sommes tous des produits culturels, explique le professeur Arvind Jain, de la John Molson School of Business de Concordia. Plus l'on est familier avec la culture de l'autre, plus il pourra nous faire confiance. L'avenir est incertain et l'on doit être capable d'offrir à notre homologue le maximum de confort.»

La connaissance de la culture de l'autre compte parmi les avantages compétitifs d'une PME. «La moitié de la bataille sera gagnée», affirme le professeur de Concordia. Préparation est le mot d'ordre.

«Ces efforts peuvent largement dépasser un bilan des états financiers, ajoute Karl Miville-de Chêne, président du cabinet de consultation en commerce international, Consultation Contacts Monde. Savoir à qui j'ai affaire, comment cette personne réagit et pourquoi elle réagit ainsi deviennent des outils de négociations.»

Ainsi, le premier commandement est d' «oublier l'idée que le langage des affaires et universel», dit Brahim Allani, professeur associé à HEC Montréal.

Par exemple, lorsqu'ils négocient, certains Asiatiques marquent de longues pauses. Pour un Nord-Américain verbomoteur, ce silence est inquiétant. Mais les entreprises canadiennes accusent un retard important lorsqu'il est question de management interculturel, selon le professeur Allani. La concentration du commerce international aux États-Unis justifie ce retard.

«Parce que les entreprises ont vendu dans un marché qui ressemble au nôtre, elles sous-estiment les différences des autres marchés», renchérit Carl Gravel, directeur national, fabrication, à la Banque de développement du Canada (BDC).

Produits mal adaptés

«Les préjugés ne sont pas universels. Ils influencent les besoins des gens, qui cherchent à combler leurs désirs», dit M. Allani.

La présomption est une erreur monumentale et peut engendrer des désastres irréparables.

Par exemple, les produits ne sont pas toujours utilisés de la même façon. Les techniciens américains qui opèrent de la machinerie lourde ont des réflexes d'utilisation différents des Européens.

Une compagnie qui omet de vérifier ce détail sera inondée de réclamations puisque lorsque le matériel est mal utilisé, il se brise.

Les codes de couleurs ou d'emballages sont également importants lorsqu'on lance un nouveau produit en sol étranger. Au Japon, emballer les produits par trois est signe de malchance. Et l'utilisation de la couleur rouge est aussi proscrite dans certains pays.

«Idéalement, il faut aller sur place, trouver des partenaires et comprendre le marché avant d'établir son plan d'exportation», suggère le directeur national, fabrication à la Banque de développement du Canada (BDC), Carl Gravel.

«Et mettre en valeur un nouveau marché peut être très long», met en garde Karl Miville-de Chêne, qui estime que cela peut prendre jusqu'à 10 ans. «Il faut avoir une vision à long terme et miser sur un marché à la fois. Idem avec les produits, qu'il faut éviter de présenter en brochette. Il faut choisir celui qui nous introduira dans le marché», conclut-il.

Encadré(s) :

Derrière la muraille

Annie Mathieu

Même si la Chine s'ouvre davantage sur le monde, les pratiques culturelles y sont très différentes. Et pour une PME, il vaut mieux connaître certaines particularités.

> Dans un groupe, il est important de saluer d'abord la personne la plus âgée et celle du rang social le plus élevé. Dans le doute, mieux vaut se enseigner.

> Lors d'un repas, il est mal vu de commander de l'eau, qui signifierait qu'on n'apprécie pas ce qui nous est servi.

> Les Chinois ne disent jamais «non» ouvertement, puisque cela représente un affront. Il est préférable de dire qu'on y réfléchira.

> L'échange de cartes professionnelles suit un rituel très strict. S'empresser de ranger la carte de notre homologue dans notre veston sans même y jeter un coup d'oeil est une grave erreur.

> Les Chinois sont davantage polychromes que monochromes, c'est-à-dire qu'ils font plusieurs choses à la fois et peuvent passer du point À au point D sans préavis. Mieux vaut demander une négociation point par point.

> Il est préférable de nommer l'avocat qui nous accompagne «responsable ou conseiller juridique». L'avocat revêt une connotation négative.

> https://www.ccbc.com Ce site s'attarde spécifiquement au commerce entre le Canada et la Chine.

SE PRÉPARER

Les experts le répètent: il est primordial de bien se préparer avant d'explorer un marché étranger. Et un nombre grandissant d'ouvrages, de sites Internet et de séminaires spécialisés s'attardent aux spécificités culturelles du commerce international.

> executiveplanet.com

Le site offre une foule de renseignements sur les spécificités culturelles de 35 pays. Comment s'habiller, prendre contact avec une entreprise, quel type de cadeau il est préférable d'offrir, etc.

> https://international.gc.ca

Le site du ministère des Affaires étrangères et du Commerce extérieur du Canada offre une foule de services et de renseignements aux entreprises voulant s'internationaliser.

ERREURS COÛTEUSES

> L'entreprise Ford a proposé sa voiture Pinto au Brésil. Cependant, dans ce pays, «pinto» signifie «petit pénis».

> En Suède, Lada, nom d'une voiture russe, veut dire «merde».

>GM a introduit «La Crosse» au Québec, ce qui était peut-être une mauvaise appellation.

> L'entreprise suédoise Electrolux a introduit ses balayeuses aux États- Unis. Le slogan: «Nothing sucks like Electrolux» (rien ne suce comme Electrolux).

> Lorsque Coca-Cola a introduit sa boisson en Chine, elle a fait une traduction littérale du nom qui donnait quelque chose comme «une jument avec de la cire».

> Coca-Cola a également lancé au Japon ses bouteilles de 2 litres, mais les réfrigérateurs ne sont conçus que pour contenir des bouteilles de 1 litre.