Le démarrage d'une entreprise exige passion et détermination. Pour que la pâte lève, il faut réunir beaucoup d'ingrédients. La Presse Affaires les aborde à tour de rôle dans le cadre d'une série de 12 chroniques hebdomadaires.

Le démarrage d'une entreprise exige passion et détermination. Pour que la pâte lève, il faut réunir beaucoup d'ingrédients. La Presse Affaires les aborde à tour de rôle dans le cadre d'une série de 12 chroniques hebdomadaires.

On dit que le savoir confère le pouvoir. Or, dans le démarrage d'une entreprise, mener une étude de marché permet justement de connaître l'environnement dans lequel on projette de brasser des affaires.

Bref, elle permet de déterminer si notre démarche est viable ou non.

Parlez-en à Émili Roy, une organisatrice d'événements qui travaille à son compte depuis un an et qui n'a plus besoin d'être convaincue de la pertinence d'une étude de marché.

«Je n'avais pas l'impression que ça pouvait être nécessaire. J'ai organisé mon premier défilé de mode quand j'avais 13 ans; je pensais savoir comment organiser un événement.»

«Mais je me suis vite rendu compte que l'étude de marché a été la base pour construire mon entreprise. J'ai beaucoup appris sur le milieu. J'ai pu savoir comment me démarquer, combien facturer pour tel ou tel projet, etc. Ça ne pouvait pas être plus concret comme démarche», relate Émili Roy, 24 ans.

Celle qui se définit comme «designer d'événements» (une nouvelle expression branchée, dit-elle) est un cas à part.

Elle a eu la chance d'être accompagnée dans l'exercice par une conseillère d'un Centre d'aide aux entreprises (CAE), mais aussi par une copine diplômée en marketing qui s'y connaît en études de marché.

«J'ai envoyé des questionnaires à une cinquantaine d'entreprises déjà existantes et j'ai visité des salons (foires commerciales) en me faisant passer pour une cliente. Ce n'était pas de l'espionnage, car au fur et à mesure que j'avançais, je me suis mise à dire ouvertement aux gens que je comptais moi aussi devenir organisatrice d'événements», se défend Émili Roy.

La franchise a d'ailleurs été salutaire pour la jeune femme d'affaires, qui a ainsi déniché son plus gros client.

Elle travaille dorénavant comme pigiste pour un important organisateur d'événements de la région de Montréal qui est sur le point d'ouvrir des bureaux à Toronto et à New York.

L'organisation de galas, de défilés de mode, de conférences de presse, de déjeuners-conférences, voire de mariages n'aura bientôt plus de secrets pour Émili Roy.

Question de crédibilité

Ce ne sont évidemment pas toutes les histoires de démarrage d'entreprises qui connaissent un tel dénouement.

N'empêche qu'en faisant une étude de marché, l'aspirant entrepreneur met toutes les chances de son côté.

Au fait, quelle est la définition exacte d'une étude de marché?

«C'est une recherche d'informations qui sert évidemment à comprendre le secteur d'activité dans lequel on veut se lancer. Mais ça sert aussi à démontrer si oui ou non il y a un chiffre d'affaires qui est possible au bout du compte. D'ailleurs, toute la crédibilité d'un plan d'affaires réside dans l'étude de marché. Et ça n'a pas besoin d'être un document de 100 pages», explique Marie Panneton, commissaire aux nouvelles entreprises, au mentorat et aux projets de relève au centre local de développement (CLD) de la Haute-Yamaska.

Selon elle, l'étude de marché comporte trois volets. Tout d'abord, il faut se poser la question: y a-t-il une occasion d'affaires?

Le produit ou le service que l'entrepreneur compte mettre de l'avant répond-il vraiment à un besoin? Dans ce cas précis, il faut ratisser large et demander l'avis des clients potentiels (consommateurs, entreprises, etc.) et pas seulement à son entourage immédiat.

Évidemment, l'étude de marché est proportionnelle au marché visé. Fera-t-on des affaires dans sa ville ou à l'échelle du continent?

Ensuite, Marie Panneton recommande de s'enquérir de ce qui existe déjà dans le secteur d'activité visé.

«Il faut se renseigner, dit-elle, sur l'état dans lequel le secteur se trouve et voir quel est le potentiel. L'utilisation de statistiques pour voir, entre autres, si le secteur est en croissance est essentielle. De nos jours, avec les statistiques, on peut presque tout savoir sur les habitudes des gens et des entreprises.»

Enfin, ajoute l'ancienne prof de cégep, il faut aussi connaître ses concurrents potentiels et se demander comment on peut s'en démarquer.

«Ça permet de voir quelle est la clientèle ciblée et ce qui est offert actuellement sur le marché.»

En général, conclut Mme Panneton, les futurs entrepreneurs se prêtent au jeu et ne contestent pas cette étape cruciale qu'est l'étude de marché.

«Mais certaines personnes, dit-elle, ont besoin d'être accompagnées dans la démarche et c'est là que nous entrons en scène.»

Céline Gagnon, conseillère en entrepreneuriat au Centre d'aide aux entreprises (CAE) région Haute-Yamaska, observe plutôt le contraire.

«La tolérance au risque est très élevée pour un entrepreneur. Il a le goût d'avancer rapidement et ne veut pas nécessairement passer une semaine à interroger du monde ou chercher des statistiques», dit-elle.

Selon Mme Gagnon, réaliser une étude de marché prend au minimum une semaine. Tout dépend si on s'y consacre à plein temps ou non.

«Ça peut facilement représenter 30% d'un plan d'affaires. Mais c'est tellement important, surtout si on est en recherche de financement. Les prêteurs ont besoin de chiffres, de preuves.»

Une opération perpétuelle

Aux yeux de certains, l'étude de marché n'est pas seulement qu'une étape dans la création d'une entreprise. Pour Marie-Josée Fleury, il s'agit d'une opération perpétuelle.

La présidente de M4P, une entreprise de Granby spécialisée dans le recyclage et la revalorisation du plastique dit «d'ingénierie», explique être «constamment en train de faire des études de marché».

«J'ai fait des sondages et tout le reste avant de me lancer à mon compte, mais à chaque fois que je courtise un nouveau client ou qu'on me propose de travailler sur un produit que je ne connais pas, je fais des recherches, je pose des questions, bref je fais une sorte d'étude de marché», explique l'entrepreneuse de 37 ans, qui a multiplié son chiffre d'affaires par cinq depuis un an.

À moins de suivre un cours sur le démarrage d'entreprise, vous devrez compléter votre étude de marché vous-mêmes. Mais, c'est connu, il existe au Québec une panoplie d'organismes dont le rôle est d'aider les jeunes entrepreneurs.

Les chambres de commerce, les CLD (centre local de développement), les CAE (centre d'aide aux entreprises) et les SAJE (service d'aide aux jeunes entreprises) sont les plus connus.

Leurs services sont généralement gratuits ou sont offerts dans le cadre de programmes d'aide gouvernementaux.

Marie Panneton rappelle que dans le contexte actuel, où l'entrepreneuriat est fortement encouragé, il existe même des programmes de subventions où les entrepreneurs en devenir sont payés pendant le processus de mise sur pied de leur future PME, ce qui comprend le temps consacré à la réalisation de l'étude de marché.

Fait intéressant, des firmes comme Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT) sont régulièrement mandatées pour réaliser des études de marché.

«Ça dépend des objectifs et de l'ampleur du projet. Mais, par exemple, pour mener des enquêtes sur le terrain auprès de clients potentiels, faire l'achat et l'analyse de base de données et rencontrer des spécialistes, ça peut coûter entre 10 000$ et 35 000$», explique Jacques Vidal, directeur marketing et stratégie au bureau de RCGT de Sherbrooke.

Dossier démarrage d'entreprise: lisez tous nos articles sur www.lapresseaffaires.com/démarrage

Conseils à suivreAvoir beaucoup de patience.

> Utiliser toutes les ressources possibles.

> Ne pas négliger son réseau de contacts.

Écueils à éviter

> Négliger de faire son étude de marché.

> Comme il s'agit d'estimations, bien mesurer la pertinence des résultats.

> Faire son étude de marché pour plaire aux autres.