Le studio montréalais Felix & Paul a réalisé du contenu immersif et de réalité virtuelle avec Barack Obama (gagnant un Emmy au passage). Le rappeur Eminem. La vedette de basket LeBron James.

Déjà une belle réussite pour un studio fondé en 2013 et spécialisé dans le contenu de réalité virtuelle et le contenu immersif (3D/360 degrés).

Mais voilà, le studio montréalais de 60 employés voit loin. Beaucoup plus loin.

En fait, Felix & Paul Studios souhaite devenir la « compagnie médiatique de l’espace ». Rien de moins.

« Une compagnie médiatique de l’espace, ça n’existe pas aujourd’hui. Mais c’est le positionnement que prend le studio », dit Stéphane Rituit, cofondateur et PDG de Felix & Paul Studios.

Depuis que Felix & Paul Studios a envoyé ses premières caméras dans l’espace à la Station spatiale internationale il y a deux ans, c’est environ 80 % de son chiffre d’affaires qui est consacré à l’espace.

Et ça pourrait encore augmenter, car Felix & Paul a comme objectif à long terme de documenter le retour de l’humain sur la Lune, prévu par la NASA en 2024 avec la mission Artemis III.

De 1969 à 1972, 12 hommes ont marché sur la Lune avec les missions Apollo. « Un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité », a dit l’astronaute Neil Armstrong à une caméra embrouillée quand il a posé le premier pas humain sur la Lune en 1969.

L’humanité n’a pas visité la Lune depuis 1972. Lors de la prochaine visite sur la Lune, prévue en 2024, on verra sans doute les images des astronautes en réalité virtuelle et en format immersif (3D/360 degrés). « On a des ambitions lunaires », dit Stéphane Rituit, cofondateur et PDG de Felix & Paul Studios (le nom officiel du studio s’écrit maintenant sans accent).

PHOTO FOURNIE PAR FELIX & PAUL

L’astronaute David St-Jacques près de la caméra spatiale des studios Felix & Paul, conçue pour la réalisation d’œuvres immersives à l’intérieur de la Station spatiale internationale.

Depuis deux ans, Felix & Paul a trois caméras dans la Station spatiale internationale. C’est l’astronaute canadien David Saint-Jacques qui les avait apportées dans l’espace en décembre 2018. Deux caméras ont servi à produire une série de quatre épisodes immersifs sur la vie à l’intérieur de la station spatiale.

La troisième caméra doit bientôt être attachée au célèbre « bras canadien » de la station spatiale, pour y filmer des images en orbite. Ce serait la première fois qu’on aura des images de la Terre en 3D/360 degrés, selon Felix & Paul.

Une subvention fédérale de 2 millions

Pour tenter de devenir la « compagnie média de l’espace », Felix & Paul Studios compte investir 40 millions d’ici quatre ans, avec des fonds privés, mais aussi avec des subventions gouvernementales. L’entreprise compte ainsi passer de 60 à 100 employés dans ses bureaux du Vieux-Montréal.

Le gouvernement Trudeau croit au plan d’affaires de ce « fleuron » montréalais, qui est la propriété d’investisseurs québécois (les cinq actionnaires les plus importants sont la mécène montréalaise Phoebe Greenberg, la Caisse de dépôt et placement du Québec, ainsi que les cofondateurs Félix Lajeunesse, Paul Raphaël et Stéphane Rituit). C’est pourquoi Ottawa lui accorde une subvention (contribution remboursable) de 2 millions de dollars pour poursuivre son développement.

« Alors qu’on ouvre un nouveau chapitre de l’exploration spatiale, il y a une belle expertise [média] à développer au Canada, afin d’expliquer le travail que font nos astronautes dans l’espace, dit la ministre fédérale du Développement économique Mélanie Joly. Il n’y a que Felix & Paul qui a cette expertise pointue à travers le monde. Nous sommes en train d’aider les entreprises à passer au travers de la crise [de la COVID-19], mais nous voulons aussi aider nos leaders qui continuent à prendre des risques et créer des emplois. »

D’autres subventions d’organismes gouvernementaux s’ajouteront au montage du plan d’investissements de 40 millions, mais les détails ne sont pas disponibles actuellement. Felix & Paul compte aussi sur le soutien du gouvernement du Québec : le crédit d’impôt québécois pour la production cinéma/télé rembourse de 20 % à 36 % des salaires admissibles de l’entreprise. L’entreprise bénéficie aussi d’un crédit d’impôt fédéral similaire de 16 % sur les salaires admissibles.

De la concurrence dans l’espace

Comment une entreprise montréalaise pourrait-elle parvenir à battre les géants américains et européens pour devenir la « compagnie média de l’espace » ?

Felix & Paul pense détenir la formule magique. Ce n’est pas une entreprise technologique. Ce n’est pas non plus une entreprise de création de contenu. C’est les deux en même temps, développant à la fois la technologie (les caméras) et le contenu. « La techno est au service de nos productions », dit Stéphane Rituit. L’entreprise montréalaise a aussi déjà des ententes avec plusieurs entreprises de télécoms en Asie, en Europe et en Amérique du Nord (Verizon, Bell) pour distribuer leur contenu immersif spatial.

Mais Felix & Paul ne craint pas la concurrence. Après tout, dans les missions spatiales, la collaboration est presque toujours de mise. « On espère toujours ne pas être seuls, car la concurrence stimule toujours la créativité », dit Stéphane Rituit.