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Pourquoi les obligations ne montent pas régulièrement quand les actions baissent ?

Jacquelin Bois

Ce qui s’est produit depuis le début de l’année — un rendement négatif des placements boursiers et dans le marché obligataire – n’a pas été observé en près de 50 ans. Il s’agit pratiquement d’une tempête parfaite. On a tendance à penser que les obligations constituent des investissements sûrs qui offrent une protection contre la volatilité boursière. Ce mythe a toutefois été déboulonné depuis le début de l’année.

« Il y a une croyance populaire, quand on bâtit un portefeuille diversifié, que lorsque les actions baissent, les obligations vont augmenter, dit Ruben Antoine, gestionnaire de portefeuille chez Tulett, Matthews & Associés. Donc, le fameux portefeuille 60-40 [60 % d’actions et 40 % de titres à revenu fixe] protège en partie d’une baisse des actions. On devrait ajouter que malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. »

La raison ? Après avoir atteint des sommets l’an dernier, les marchés se sont repliés dans la foulée de l’offensive armée de la Russie contre l’Ukraine, ce qui a intensifié les pressions inflationnistes et les craintes de ralentissement économique.

Parallèlement, les banques centrales ont multiplié les hausses de taux d’intérêt pour tenter de mater la flambée inflationniste. Cela a eu pour effet de plomber le marché des obligations, dont les prix varient à l’inverse de l’évolution des taux d’intérêt.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Ruben Antoine, gestionnaire de portefeuille chez Tulett, Matthews & Associés

Par exemple, si on détient une obligation qui offre un rendement de 1 % et que les banques centrales relèvent les taux, une nouvelle obligation offrira 3 %. Mon obligation à 1 % devient alors moins attrayante et va baisser parce que d’autres titres à revenu fixe offrent de meilleurs revenus.

Ruben Antoine, gestionnaire de portefeuille chez Tulett, Matthews & Associés

Au Canada, la banque centrale a relevé son taux directeur à quatre reprises depuis le début de l’année. Il est actuellement de 2,5 % et plusieurs économistes anticipent une augmentation de 75 points de base mercredi prochain, ce qui ferait passer le taux cible à 3,25 %.

Depuis le début de l’année, l’indice Bloomberg US Aggregate Bond s’est replié, à l’instar des grands indices nord-américains comme le S&P/TSX (Toronto) et le S&P 500 (New York). Plusieurs facteurs peuvent influencer le cours des obligations, mais si les pressions inflationnistes avaient été moins vives, il aurait été permis de s’attendre à des performances « plus stables » ou « positives » des obligations, explique M. Antoine.

En dépit de la tendance actuelle, les épargnants ont quelques raisons de garder espoir. Il faut remonter à 1969 pour voir les titres boursiers et à revenu fixe terminer l’année dans le rouge, souligne Hugo Ste-Marie, de la Banque Scotia, dans une récente note.

« Nous estimons que la volatilité demeurera élevée en deuxième moitié d’année et que la préservation du capital doit être une priorité », ajoute l’analyste.

En prenant soin de préciser que le passé n’est pas toujours garant de l’avenir, M. Antoine considère qu’il y a quand même de « bonnes nouvelles » pour les investisseurs. Il cite une étude de la firme d’investissement américaine Vanguard réalisée en juillet dernier. Si les baisses simultanées des actions et obligations ne sont pas « inhabituelles », les rendements négatifs n’ont été observés que dans 15 % du temps depuis 1976, souligne le document.

« Comme le phénix, le portefeuille 60/40 se relèvera », avance Vanguard.

Avec la collaboration de Martin Vallières, La Presse

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