(New York et Toronto) La Bourse de New York a conclu en baisse jeudi son pire semestre depuis 1970, peu rassurée par l’inflation américaine qui reste élevée, encourageant la Réserve fédérale (Fed) à poursuivre ses hausses de taux d’intérêt.

Scénario similaire à Toronto alors que l’indice phare de la Bourse canadienne a conclu son pire trimestre depuis le début de la pandémie.

Allan Small affirme que la première moitié de 2022 était la pire période qu’il a vu en 25 ans de carrière dans l’investissement.

« Alors que nous atteignons le point milieu de l’année, lorsqu’on regarde en arrière, je pense que la première partie de l’année sera reconnue pour avoir été simplement un bain de sang pour les marchés », a estimé M. Small, conseiller en investissement chez IA Gestion privée de patrimoine, lors d’une entrevue.

L’indice composé S&P/TSX du parquet torontois a perdu jeudi 217,28 points pour terminer la séance avec 18 861,36 points. Il cumule ainsi un recul trimestriel de près de 14 %, le pire depuis décembre 2019.

Selon des résultats définitifs, l’indice Dow Jones a cédé 0,8 %, à 30 775,43 points. Le NASDAQ, à forte teneur technologique, a lâché 1,3 %, à 11 028,74 points. Le S&P 500 a perdu 0,9 %, à 3785,38 points.

« Les efforts de la banque centrale [Fed] pour lutter contre l’inflation suscitent des craintes croissantes de récession qui ont mené Wall Street à son pire semestre depuis 1970 », relevait Edward Moya, analyste pour OANDA.

Il ajoutait que « la salve de données américaines », notamment l’inflation et les dépenses des ménages publiées jeudi, « a fait comprendre que les risques de récession continuent de croître ».

Record de pertes pour le NASDAQ

Par rapport au début de l’année, le TSX montre une baisse de 11 %. Au sud de la frontière, le Dow Jones a reculé de 15 % depuis la fin de 2021, tandis que le S&P 500 a plongé de 20,6 % – sa pire performance semestrielle en 50 ans – et que le NASDAQ a effacé 29,5 %, un record.

« Je ne me souviens pas d’une année dont les six premiers mois ont aussi mal été », a souligné M. Small.

Le marché canadien sera fermé ce vendredi pour le congé de la fête du Canada, tandis que les marchés américains seront inactifs pour celui de la journée de l’Indépendance, le 4 juillet.

La flambée de l’inflation a été alimentée par l’invasion de l’Ukraine par la Russie, tandis que les goulots d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement ont été accentués par les confinements contre la COVID-19 en Chine.

Alors que les marchés ont subi de fortes baisses dans le passé en raison de la COVID-19 et de la crise financière, elles ont toujours été limitées par les investisseurs qui profitaient des aubaines ainsi créées. Cette fois, de nombreux investisseurs restent sur la touche, incertains du moment où les marchés toucheront le fond.

Les données économiques publiées aux États-Unis jeudi ont indiqué que l’inflation sous-jacente, la mesure d’inflation préférée de la Fed, s’était établie à 4,7 % en mai sur une base annuelle. C’est 0,2 point de moins qu’en avril, mais elle reste toujours près des sommets de 40 ans.

Au Canada, la croissance économique a ralenti en avril à 0,3 %, tandis qu’une estimation préliminaire pour mai suggère qu’elle s’est probablement contractée de 0,2 %. Les États-Unis avaient précédemment indiqué que leur économie avait chuté de 1,6 % au premier trimestre.

Signaux de récession

Un nombre négatif au deuxième trimestre signifierait que l’économie américaine est techniquement en récession. Mais M. Small a souligné que bon nombre de personnes pensent que l’économie américaine en est déjà là et que le Canada est soit en récession, soit sur le point de l’être.

Les secteurs canadiens de l’immobilier et des services aux collectivités étaient les seuls en territoire positif jeudi, alors que les neuf autres reculaient de plus de 1 %.

Le groupe de la santé a enregistré la plus forte baisse, perdant 4,1 %.

Le secteur des matériaux a rendu 3,6 % avec la baisse des prix des métaux, en particulier celui du cuivre.

Le prix de l’or s’est défait de 10,20 $ US, à 1807,30 $ US l’once, à la Bourse des matières premières de New York, et celui du cuivre s’est déprécié de 7,1 cents US, à 3,71 $ US la livre.

« Lorsqu’on craint une récession, on a peur que ces métaux, utilisés pour construire des maisons et d’autres choses, ne soient plus autant utilisés », a souligné M. Small.

Le secteur de l’énergie a reculé de 1,7 %, glissant avec le prix du pétrole brut.

Sur le marché des devises, le dollar canadien s’est négocié au cours moyen de 77,60 cents US, en baisse par rapport à celui de 77,65 cents US de la veille.

M. Small espère que la deuxième moitié de l’année se déroulera mieux, une fois que les banques centrales auront terminé leur campagne dynamique de hausse des taux d’intérêt pour dompter l’inflation.

Je ne sais pas si nous allons assez récupérer pour dégager un gain sur l’année, mais j’ai bon espoir que la deuxième moitié de l’année sera positive et qu’elle permettra de récupérer une partie des pertes.

Allan Small, conseiller en investissement chez IA Gestion privée de patrimoine

Alors qu’approche la saison des résultats trimestriels, les stratégistes commencent à couper dans leurs prévisions, notamment dans le secteur technologique.

Pour couronner le tout, et traduisant la perte d’appétit pour le risque, les cryptomonnaies allaient « très mal », le bitcoin chutant largement sous la barre des 20 000 $ US, à 18 960 $ US (un peu plus de 24 000 $ CAN).