Cette arrivée survient sept mois après celle à la Bourse de Toronto

L’entrée à la Bourse américaine d’un premier fonds d’investissement négocié en Bourse (FNB) lié au bitcoin, considéré comme la reine des cryptomonnaies, a fait grand bruit mardi sur Wall Street et dans la presse financière américaine.

Après avoir suscité un rebond du bitcoin ces derniers jours, tout près de son record absolu de 64 870 $ US, l’inscription du fonds ProShares Bitcoin Strategy à la Bourse de New York est considérée comme une étape majeure pour la popularisation des monnaies numériques auprès d’un plus grand nombre d’investisseurs potentiels.

En fait, en achetant des parts de ce FNB, les investisseurs américains ne vont pas miser directement sur le bitcoin. Leur argent sera plutôt investi dans des contrats à terme liés à la valeur attribuée au bitcoin sur le marché des cryptomonnaies.

Or, l’aspect indirect de ce placement était fondamental aux yeux du régulateur américain des marchés financiers, la Securities Exchange and Commission (SEC), souvent en alerte quant à l’importante volatilité du bitcoin, en tant que monnaie numérique qui demeure hors de portée des principaux régulateurs du marché des devises, à commencer par les banques centrales.

D’ailleurs, avant l’avènement du fonds ProShares Bitcoin Strategy lié à des contrats à terme sur le bitcoin, la SEC avait rejeté toutes les demandes d’enregistrement de FNB liés directement au bitcoin qui lui avaient été soumises depuis la première, en 2013.

N’empêche, en entrevue mardi à la chaîne américaine d’informations financières CNBC, le président de la SEC, Gary Gensler, a réitéré ses messages de prudence aux investisseurs à l’occasion de l’entrée en Bourse d’un premier FNB américain lié au bitcoin.

Même si l’exposition au bitcoin n’est qu’indirecte, avec des contrats à terme sur le bitcoin qui, eux, sont régulés depuis quatre ans, M. Gensler a souligné que les FNB liés au bitcoin devaient encore être considérés comme une « classe d’actifs hautement spéculatifs et très volatils ».

Bourse canadienne

Du point de vue de la Bourse canadienne, cette effervescence suscitée sur Wall Street avec l’inscription à la Bourse de New York d’un premier FNB américain lié au bitcoin avait des relents de déjà vu.

Parce que, faut-il rappeler, c’est à la Bourse de Toronto qu’un FNB de bitcoins a été inscrit à la cote en première mondiale, en février 2021.

Il s’agissait du fonds Purpose Bitcoin (BTCC.B), auquel se sont ajoutés quelques semblables – et concurrents ! – au fil des mois.

En date du 30 septembre, selon le relevé mensuel des FNB effectué par la Financière Banque Nationale, cette jeune catégorie de FNB de cryptomonnaies à la Bourse canadienne avait atteint 4,33 milliards en valeur cumulative d’actifs sous gestion.

Et durant le seul mois de septembre, les deux plus gros FNB de bitcoins libellés en dollars canadiens à la Bourse canadienne, soit le 3iQ CoinShares Bitcoin (BTCQ) et le Purpose Bitcoin (BTCC.B), se sont inscrits dans le top 10 pour le montant des entrées de fonds parmi tous les FNB cotés au Canada.

Pas de migration en vue

Mais avec l’arrivée de FNB liés au bitcoin à la Bourse américaine, et étant donné que le « taux de change » de référence mondiale pour le bitcoin est en dollars américains, est-ce que l’élan de croissance des FNB canadiens de bitcoins pourrait être compromis ?

D’autant qu’une part considérable des fonds investis jusqu’à récemment dans ces FNB canadiens provenaient d’investisseurs américains qui n’avaient pas accès aux États-Unis à de tels produits d’investissement liés au bitcoin ?

De l’avis d’experts comme Daniel Straus, directeur de la recherche sur les FNB à la Financière Banque Nationale, il est encore difficile de déterminer si ces investisseurs américains sortiront les fonds des FNB canadiens de bitcoins pour les rediriger vers les nouveaux FNB américains liés au bitcoin et cotés à la Bourse américaine.

« S’ils le font, cela pourrait affecter les actifs et les nouvelles entrées de fonds dans les FNB canadiens de bitcoins », a commenté Daniel Straus dans une entrevue au média financier torontois Report on Business (The Globe and Mail).

Daniel Straus souligne que la majeure partie des fonds investis dans les FNB canadiens de bitcoins provient d’investisseurs canadiens.

Par conséquent, estime M. Straus, « il est peu probable que ces investisseurs canadiens [au détail] franchissent la frontière pour investir dans un FNB américain lié à des contrats à terme sur le bitcoin. Notamment parce qu’il s’agit d’un produit d’investissement plus complexe que les FNB canadiens de bitcoins, avec les risques de dérapage que cela pourrait entraîner dans le marché des cryptomonnaies, qui demeure très volatil et spéculatif ».