(Washington) La saga GameStop migre sur le terrain politique à Washington où, au milieu d’appels à mieux encadrer les pratiques boursières, la secrétaire au Trésor Janet Yellen s’est entretenue jeudi avec les gendarmes des marchés.

Aucune mesure n’a été annoncée à la suite de cette réunion virtuelle, mais « les régulateurs estiment que l’infrastructure a été résiliente malgré une forte volatilité et un volume de transactions élevé, et conviennent de l’importance pour la SEC (le gendarme boursier américain, NDLR) de publier une étude circonstanciée des évènements », a déclaré le Trésor dans un communiqué transmis jeudi en fin de journée.

« En outre, la SEC et la CFTC (régulateur des matières premières et agricoles, NDLR) examinent si les pratiques de négociation sont compatibles avec la protection des investisseurs et des marchés équitables et efficaces », précise encore le communiqué.

Cette réunion virtuelle a regroupé autour de la secrétaire au Trésor les responsables des régulateurs boursiers et des matières premières et agricoles, ainsi que la Banque centrale américaine (Fed) et son antenne de New York, qui suit de près tout ce qui se passe à Wall Street.

Ils « ont discuté du fonctionnement du marché et des pratiques financières récentes sur les marchés des actions, des matières premières et des marchés connexes », a détaillé le Trésor.

Janet Yellen « juge impératif de maintenir l’intégrité de ces marchés et d’assurer la protection des investisseurs ».

« Nous devons vraiment nous assurer que nos marchés financiers fonctionnent correctement et que les investisseurs sont protégés ».  

Le vent de panique qui a soufflé à Wall Street la semaine dernière a poussé la ministre de Joe Biden à solliciter cette rencontre, quelques jours seulement après sa prise de fonctions.

« Bien comprendre avant d’agir »

Interrogée sur d’éventuelles sanctions à l’issue de la réunion, Janet Yellen a botté en touche : « nous avons besoin de bien comprendre ce qui s’est passé avant d’agir, mais nous regardons très attentivement ces évènements », avait-elle déclaré jeudi matin sur la chaîne ABC, lors de sa première interview en tant que secrétaire au Trésor.

Des élus ont pourtant, dans une rare alliance entre républicains et démocrates, demandé une révision des réglementations commerciales. Le Trésor, l’équivalent du ministère de l’Économie et des Finances, n’a pas de pouvoirs de régulation des marchés, mais peut influencer les régulateurs.

L’action de la chaîne de magasins de jeux vidéo GameStop avait bondi de 400 % la semaine dernière.

Derrière cette stupéfiante envolée du titre d’une enseigne pas particulièrement en bonne santé se cache une armée de boursicoteurs, actifs notamment sur le site communautaire Reddit et adeptes d’applications de courtage comme Robinhood, et qui se sont ligués contre les fonds spéculatifs ayant parié sur un effondrement de GameStop.

Mais des professionnels sont aussi entrés dans la mêlée pour profiter des gains.

Déconnexion

Le fonctionnement de la Bourse de New York dans son ensemble avait été perturbé, de même que le cours de matières premières comme l’argent.

Cela a de nouveau mis en lumière l’insolente bonne santé de Wall Street, en totale déconnexion avec l’état actuel de l’économie américaine réelle.

Et le rôle de la Fed a été pointé du doigt : pour soutenir le bon fonctionnement des marchés et du crédit et éviter que la consommation ne chute encore plus, la banque centrale a inondé les marchés de liquidités quand l’activité économique a été paralysée en mars dernier par la pandémie de COVID-19.

L’affaire GameStop a aussi braqué les projecteurs sur des pratiques financières comme le « short-selling », qui consiste à parier sur le plongeon d’une action.

L’implication de Janet Yellen dans ce dossier a nécessité une autorisation spéciale, rapportent des médias américains.

En effet, avant d’être choisie par Joe Biden pour prendre la tête du Trésor, elle avait été rémunérée à hauteur de 700 000 dollars par la société d’investissement Citadel, l’un des acteurs-clés de l’affaire GameStop, pour des discours prononcés lors de conférences sur l’économie après son départ de la présidence de la Fed en 2018.