Les trois principaux actionnaires de SNC-Lavalin, notamment la Caisse de dépôt et placement, ont vu la valeur de leur investissement bondir d’un demi-milliard dans les deux derniers jours, dans la foulée de l’accord qui lui permet d’éviter un procès pour fraude et corruption.

La Caisse de dépôt, RBC et Jarislowsky Fraser, qui détiennent environ la moitié des actions de SNC, sont les grands bénéficiaires de la forte appréciation du titre cette semaine. Il a atteint jeudi les 30 $, un bond de 25 % depuis mercredi. 

Si on mesure le gain de valeur par rapport au creux de 15,47 $ atteint en septembre par le titre de SNC-Lavalin, le gain réalisé par les trois institutions augmente à plus de 1,2 milliard de dollars.

La nouvelle est particulièrement bienvenue pour la Caisse et son PDG sortant Michael Sabia, puisque l’exercice financier de l’organisation se termine dans moins de deux semaines.

Pour la seule participation de la Caisse, le gain de valeur depuis deux jours s’élève à près de 220 millions, et à plus de 500 millions depuis le creux touché par l’action de SNC en septembre.

La Caisse est un actionnaire de longue date de SNC-Lavalin, avec une participation qui atteint 1,1 milliard, en date de jeudi. Il n’est pas possible de connaître le prix moyen payé par la Caisse pour ses 34,9 millions d’actions. Toutefois, l’action de SNC se négociait entre 44 $ et 60 $ en Bourse durant la période où la Caisse a fait l’acquisition de blocs d’actions permettant de faire passer sa participation dans SNC de 14,9 % à 19,9 % l’an passé.

De son côté, RBC Gestion mondiale d’actifs, qui détient 17 % de SNC, a investi massivement au printemps en faisant l’acquisition de 12,1 millions d’actions durant les mois d’avril et mai alors que l’action de SNC se négociait entre 24 $ et 34 $.

Le flair de Jarislowsky Fraser

Celui qui a eu le plus de flair est assurément Jarislowsky Fraser, qui possède une participation de 11 %. Ce gestionnaire d’actifs montréalais, devenu l’an dernier une filiale de la Scotia, a investi de façon importante en août pour acquérir plusieurs millions d’actions de SNC, alors que le titre valait autour de 17 $.

« Une fois que SNC aura terminé de passer à travers les contrats clés en main à prix forfaitaire qui lui restent, on sera en présence d’un chef de file mondial dans le secteur de l’ingénierie, de la conception et de la gestion de projet qui vaut pas mal plus que sa valeur actuelle », a commenté le gestionnaire de portefeuille Charles Nadim, de Jarislowsky Fraser, en entretien avec La Presse.

Il reste encore à SNC pour 3,2 milliards de contrats clés en main à prix forfaitaire à finir.

Quatre-vingts pour cent de ces contrats seront terminés en 2021 et la balance en 2023.

Charles Nadim, gestionnaire de portefeuille

SNC a annoncé l’été dernier ne plus vouloir soumissionner pour des contrats clés en main à prix forfaitaire. Les projets de ce genre peuvent avoir des conséquences financières importantes lorsque des dépassements de coûts surviennent.

Charles Nadim apprécie particulièrement le portefeuille de 17 concessions de SNC, dont la participation dans l’autoroute 407. « Ce sont des actifs de haute qualité qui offrent une grande visibilité sur les flux monétaires. Ça vaut environ 15 $ par action pour SNC et ces actifs génèrent une croissance de 5 à 10 % par an », dit Charles Nadim.

La portion sans risque de construction du côté ingénierie chez SNC – que Charles Nadim appelle le portefeuille de haute qualité – compte pour les deux tiers de ce segment d’activité. Il évalue cette portion « sans risque de construction » à environ 30 $ par action de SNC.

« Il y a trois mois, l’action valait 17 $. On avait les concessions pour 15 $ et on payait 2 $ par action pour un actif qui en valait beaucoup plus. Le risque/rendement était très attrayant », dit le gestionnaire d’actifs.

« Et les services d’ingénierie sans risque de construction continuent d’accumuler des contrats. Ce que l’action reflétait n’était pas vraiment ce qui se passait sous la couverte », image-t-il.

Le marché semble escompter un coût de 500 millions à 1 milliard pour que SNC termine le reste de ses contrats clés en main à prix forfaitaire d’une valeur de 3,2 milliards. « Si SNC passe à travers sans coût excédentaire ou même avec un profit, une valeur de 45 $ par action est conservatrice », croit Charles Nadim.

Après avoir enregistré un bond de 19 % mercredi, l’action de SNC-Lavalin s’est appréciée de 6 % à 30,51 $ jeudi.

Appelé à réagir aux événements des derniers jours entourant SNC-Lavalin, le porte-parole de la Caisse de dépôt est demeuré bref. « C’est une bonne nouvelle que SNC puisse clore ce chapitre difficile », a simplement commenté Maxime Chagnon.