Les investisseurs dans le marché boursier canadien portent une attention particulière cette semaine aux énoncés des résultats trimestriels de fin d’exercice 2019 et de perspectives d’affaires de la part des principales banques.

D’autant que, de l’avis d’analystes spécialisés du secteur des services financiers, les banques canadiennes pourraient faire état de résultats trimestriels plus difficiles en raison d’une conjoncture économique chancelante.

En fait, prévoient-ils, les résultats de ce quatrième et dernier trimestre 2019 des banques, terminé le 31 octobre, pourraient atténuer la croissance moyenne de leurs bénéfices annuels à son niveau moyen le plus faible depuis la crise financière mondiale de 2008.

« Les banques canadiennes font face à un certain nombre de risques à l’horizon, comme le cycle économique rendu à un stade très avancé, la volatilité accrue sur les marchés boursiers, et la possibilité d’une volatilité accrue de leurs provisions pour pertes sur prêts ainsi que le niveau d’endettement élevé des ménages canadiens », résume l’analyste Doug Young, spécialiste des entreprises financières chez Desjardins Marchés des capitaux, dans un rapport sectoriel à ses clients-investisseurs.

À court terme, cependant, il s’attend à ce que les banques canadiennes aient pu profiter encore de « vents favorables ». L’analyste énumère « un contexte économique encore constructif avec un faible taux de chômage ; un environnement de crédit favorable pour le moment ; des ratios de capital bancaire confortables ; et la gestion plus serrée de leurs dépenses, ce qui est important lorsque la croissance des prêts ralentit. »

Entre-temps, en Bourse, malgré un récent regain, les perspectives de rendement à court terme des actions de banques canadiennes demeurent embrouillées.

« À un mois de la fin, l’année boursière 2019 au Canada s’aligne pour être la première en une décennie au cours de laquelle les actions des banques ont sous-performé l’indice de marché », relève l’analyste Robert Sedran, spécialiste des entreprises financières chez Marchés des capitaux CIBC, dans un rapport sectoriel à ses clients-investisseurs.

Le récent rehaussement de valeur boursière des banques a réduit cet écart de rendement au cours des deux derniers mois, alors que les préoccupations sur les taux d’intérêt et la croissance économique en général se sont amoindries.

Robert Sedran

« Mais ça, c’était la partie la plus facile du redressement de valeur boursière des banques. Pour qu’il se poursuive, il faudra le retour d’une meilleure progression de leurs résultats au cours des prochains trimestres. »

« Il existe un risque baissier pour les cours des actions des banques, étant donné la conjoncture d’exploitation plus difficile », estime pour sa part Mike Rizvanovic, analyste des entreprises financières canadiennes à la firme Crédit Suisse.

Par exemple, il s’attend à un sursaut de 26 % des provisions pour pertes sur prêts au quatrième trimestre par rapport à l’an dernier, qui serait « une conséquence du bond de 19 % des faillites de consommateurs observé en septembre, le plus fort depuis au moins 2011 ».

« Des défis persistent »

À la Financière Banque Nationale, l’analyste Gabriel Dechaine, spécialiste du secteur des services financiers, souligne que « des défis persistent dans les activités des banques dans les marchés des capitaux d’investissement. C’est d’ailleurs leur seul segment avec un repli moyen des bénéfices de 12 % jusqu’à maintenant cette année ».

« Les investissements des banques pour développer leurs activités en marchés des capitaux, en particulier aux États-Unis, n’ont pas encore généré des revenus. Entre-temps, les coûts de ces stratégies d’expansion ont certainement un impact sur les résultats à court terme », note l’analyste dans son plus récent rapport sectoriel distribué aux clients-investisseurs de la Financière Banque Nationale.

Dans ce contexte, à quoi devraient s’attendre les actionnaires des banques en matière de prochain rendement en dividendes ?

Robert Sedran, de Marchés des capitaux CIBC, prévoit « que la Banque de Montréal, la Banque Nationale et la Banque Laurentienne augmenteront leurs dividendes trimestriels, ce qui correspondrait à leur modèle de hausse aux deux trimestres ».

Attentes semblables de la part de l’analyste Doug Young chez Desjardins Marchés des capitaux, mais en plus précis.

« Je m’attends à des hausses de dividendes chez la Banque de Montréal, de l’ordre de 3 %, de même qu’à la Banque Nationale, par 4 %, et la Banque Laurentienne, avec 2 %. »

Mercredi : la Banque du Canada en décision de taux d’intérêt

Dans sa dernière décision de taux d’intérêt en 2019, la Banque du Canada pourrait-elle imiter sa voisine américaine, la Réserve fédérale, en réduisant son taux directeur pour atténuer les appréhensions d’un ralentissement accentué de l’économie ? Pas vraiment, anticipent les économistes de la Banque Nationale, dans leur billet hebdomadaire de conjoncture. « Nous nous attendons à ce que la Banque du Canada maintienne son taux de financement à un jour inchangé à 1,75 %. Les perspectives économiques n’ont pas assez changé récemment pour que la banque centrale modifie sa perception selon laquelle, malgré certains risques de baisse, la situation actuelle ne justifie pas un assouplissement de sa politique. »

Vendredi : le point sur l’emploi en novembre

À quoi s’attendre avec les données de l’emploi en novembre au Canada et aux États-Unis, qui seront divulguées vendredi ? Au Canada, « les probabilités que la progression de l’emploi soit modeste en novembre sont assez élevées, considérant que la croissance économique a ralenti de façon substantielle au cours des derniers mois. Le taux de chômage pourrait rester à 5,5 % », anticipent les économistes du Mouvement Desjardins dans leur billet hebdomadaire de conjoncture. Aux États-Unis, « la tendance récente du marché du travail, additionnée aux regains attendus dans l’industrie automobile, devrait rehausser la création d’emplois à près de 200 000. Le taux de chômage devrait demeurer à 3,6 % ».