Dirigeants, employés et actionnaires de SNC-Lavalin ont traversé une autre journée éprouvante, jeudi.

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Réunis en assemblée au Palais des congrès de Montréal, les actionnaires ont appris que la vente d’une part de l’autoroute 407 allait vraisemblablement rapporter moins que prévu et que le rendement de début d’exercice s’était avéré largement inférieur aux attentes. La direction a néanmoins conservé ses perspectives intactes pour 2019, ce qui alimente la méfiance sur Bay Street.

« Comment la direction peut-elle maintenir ses prévisions inchangées ? Comment pouvons-nous les croire compte tenu de la cadence actuelle ? », demande l’analyste Maxim Sytchev, de la Financière Banque Nationale, dans une note publiée jeudi.

Un important revirement de situation devra se produire en deuxième moitié d’année pour que les objectifs soient atteints, estiment les analystes.

« Il se trouvera des sceptiques pour douter que SNC-Lavalin atteigne sa cible de bénéfice d’exploitation pour l’exercice », renchérit Derek Spronck, chez RBC.

« Ça risque de placer le titre sous pression tant que la direction n’aura pas démontré qu’elle a amélioré son exécution. »

L’action de SNC a cédé 13 % jeudi pour clôturer à 28,97 $. Le titre a maintenant perdu près de 40 % de sa valeur depuis le début de l’année, ce qui en fait de loin celui affichant en 2019 le pire rendement parmi tous les titres qui composent l’indice composé S&P/TSX de la Bourse de Toronto.

« L’épuisement des investisseurs est palpable alors que les titres des entreprises comparables performent beaucoup mieux », souligne Maxim Sytchev.

Le volume de transactions enregistré sur l’action de SNC-Lavalin jeudi est le plus important depuis le 28 janvier, journée où le titre avait décroché de près de 30 % en réaction à un avertissement lancé par SNC au sujet de ses résultats.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Autoroute 407

SNC-Lavalin a révélé jeudi avoir été informée qu’un actionnaire de l’autoroute ontarienne 407, une voie rapide à péage, était susceptible d’exercer son droit de premier refus afin d’acheter la portion de l’investissement dont SNC souhaite se départir.

Si un droit de premier refus est exercé, le Régime de retraite des employés municipaux de l’Ontario (OMERS) ne pourra pas acheter la part de 10 % dans l’autoroute 407, et SNC devra verser à l’OMERS une indemnité de rupture d’environ 80 millions, soit 2,5 % du prix d’achat de quelque 3 milliards.

Ce rebondissement laisse croire que les deux coactionnaires de SNC dans l’autoroute 407 pourraient trouver suffisamment intéressant le prix négocié par l’OMERS, au point de l’égaler. Le PDG de SNC-Lavalin, Neil Bruce, n’a pas voulu dire qui, de l’entreprise espagnole Cintra ou de l’Office d’investissement du RPC, envisage d’exercer son droit de premier refus.

Lettre ouverte

Plus tôt cette semaine, Stephen Jarislowsky, investisseur et ancien membre du conseil d’administration de SNC-Lavalin, a publié une lettre ouverte dans laquelle il affirmait que les actionnaires de SNC devraient avoir le droit de voter sur la vente d’actions de l’A407, remettant en question la décision de vendre un actif aussi « magnifique ».

« C’est l’un des meilleurs placements que je connaisse, car il est garanti par le gouvernement et profite pleinement de la croissance de la circulation à Toronto. »

« Avec cette vente de la 407, les actionnaires sont obligés par leur propre conseil d’administration de parier sur le sauvetage d’un actif maintenant sans valeur. La reconstruction de SNC-Lavalin Ingénierie sera une tâche herculéenne. Les actionnaires pourraient se retrouver avec une valeur quasi nulle au lieu des 27 $ par action actuels reposant uniquement sur la participation dans la 407. »

Appelé à réagir aux propos de Stephen Jarislowsky, le PDG de SNC-Lavalin a simplement répondu poliment qu’il accordait une « grande valeur » aux opinions d’une personne de sa trempe, mais que le processus avait été « clairement expliqué » depuis l’été dernier. « Et nous allons poursuivre le processus amorcé dans le meilleur intérêt de tous les actionnaires. »

Cible ratée

Les activités d’ingénierie et construction de SNC ont généré une perte par action ajustée de 8 cents au premier trimestre, alors que les analystes prévoyaient un bénéfice par action ajustée de 30 cents. Les investissements en immobilisations ont de leur côté rapporté 29 cents par action durant le trimestre.

Neil Bruce a fait savoir que SNC réduirait ses activités dans une quinzaine de pays où elles sont moins importantes et cesserait de soumissionner les contrats à prix fixe dans le secteur minier. Les déboires du contrat signé par SNC avec l’entreprise chilienne Codelco illustrent bien les périls associés à des ententes forfaitaires lorsque surviennent des imprévus.

« À l’avenir, nous entreprendrons seulement ce type de projets dans les secteurs Infrastructures et Pétrole et gaz, dans nos régions principales où nos capacités sont solidement établies. »