Un mouvement de panique a saisi Wall Street lundi, où l'indice vedette de la place new-yorkaise a drastiquement chuté après plusieurs mois d'euphorie boursière régulièrement saluée par le président Donald Trump.

Le Dow Jones Industrial Average a soudainement dévissé en deuxième partie de séance, et enfoncé en moins d'une heure les seuils des 500, 1000 et 1500 points perdus. Au plus bas, il a chuté de plus de 10 % depuis son dernier record le 26 janvier.

Retransmise en direct sur les écrans de télé, cette dégringolade retenait à New York l'attention des passants, a constaté un journaliste de l'AFP.

Après un petit rebond en fin de séance, le Dow Jones a finalement clôturé en baisse de 4,60 %.

L'indice NASDAQ, à forte coloration technologique, a perdu 3,78 % et l'indice élargi S&P 500, qui représente les 500 plus grandes entreprises cotées aux États-Unis, a cédé 4,10 %.

À la Bourse de Toronto, l'indice composé S&P/TSX a perdu lundi 271,22 points à 15 334,81 points, au terme d'un reculé généralisé qui a vu tous ses secteurs clôturer dans le rouge.

Sur le marché des devises, le dollar canadien s'est négocié au cours moyen de 80,11 cents US, en baisse de 0,67 cent US par rapport à son cours moyen de vendredi.

La Maison-Blanche s'est voulue rassurante en affirmant que le président Trump se préoccupait des « fondamentaux » de l'économie à long terme qui restent « exceptionnellement forts », selon sa porte-parole Sarah Sanders.

Cette correction intervient le jour de l'arrivée à la tête de la banque centrale américaine de Jerome Powell, qui remplace Janet Yellen, seule femme à n'avoir jamais dirigé cette institution.

Mais elle était attendue de longue date par de nombreux observateurs, les indices ayant enchaîné les records ces derniers mois. Le S&P 500 a ainsi enregistré en janvier son meilleur début d'année depuis 1997.

Donald Trump s'en est souvent félicité dans des tweets ou dans ses interventions publiques et en avait fait un de ses arguments favoris pour séduire les milieux d'affaires lors du dernier forum économique de Davos en Suisse.

Lundi, la Maison-Blanche a dans un communiqué à la chaîne CNBC assuré « être toujours inquiète quand le marché perd de la valeur ».

Mais un porte-parole, mettant en avant « la fluctuation des marchés à court terme », a un peu plus tard rappelé que l'économie américaine restait « très solide » et « allait dans le bon sens ».

Le taux de chômage aux États-Unis est actuellement au plus bas depuis 17 ans et la croissance du PIB s'est établie en 2017 à 2,3 %.

Retour de la volatilité

Signe de l'inquiétude ambiante dans les salles de marché, l'indice qui mesure la volatilité à Wall Street, le VIX, s'affichait lundi à son plus haut niveau depuis l'été 2015.

« On avait perdu l'habitude de voir les indices accélérer du côté négatif », a remarqué Art Hogan de Wunderlich Securities, un vétéran de la place new-yorkaise.

Entamée la semaine dernière, la débâcle a été déclenchée par un regain de nervosité des investisseurs face à la hausse des taux d'intérêt.

L'annonce d'une augmentation significative des salaires en janvier aux États-Unis a en effet ravivé vendredi les craintes d'inflation et la possibilité de voir la banque centrale relever plus rapidement que prévu ses taux.

Le taux d'emprunt à dix ans a par exemple grimpé lundi jusqu'à 2,88 %, son plus haut niveau depuis 2014.

Cette évolution renchérit les emprunts aussi bien pour les entreprises que pour les investisseurs et offre aux courtiers un placement désormais un peu plus rémunérateur et moins risqué que les actions.

« Pendant plusieurs années, le marché des actions était un peu la seule destination » pour les investisseurs souhaitant des rendements plus élevés mais les actions « sont devenues un peu surévaluées », estime Jack Ablin de Cresset Wealth Advisors.

« La question maintenant est de savoir si les investisseurs qui ont ces derniers mois profité de chaque mouvement de repli pour faire des achats à bon compte vont encore une fois refaire leur apparition ou s'ils vont rester en retrait », s'interroge JJ Kinahan, spécialiste des marchés pour la plateforme de courtage TD Ameritrade.

Le secteur de la finance est celui qui a le plus souffert lundi: l'indice le représentant au sein du S&P 500 a perdu 4,99 %.

Outre la fébrilité ambiante, il a été lesté par la chute de 9,22 % de la banque Wells Fargo, responsable d'un scandale massif de comptes fictifs: la Fed lui a interdit d'augmenter son chiffre d'affaires avant d'avoir pris des mesures pour corriger ses erreurs.

Alors que le prix du baril de pétrole a de nouveau reculé lundi, le secteur de l'énergie a aussi encaissé le choc (-4,35 %), la major ExxonMobil cédant par exemple 5,69 %.

Arconic, le groupe né de la scission du géant de l'aluminium Alcoa, a lui dévissé de 8,90 % après des prévisions en demi-teinte.

- Avec La Presse canadienne

Les chutes historiques du Dow Jones

Voici les chutes les plus marquantes de cet indice, baromètre des marchés américains, créé le 26 mai 1896 et portant les noms de Charles Dow et Edward Jones, fondateurs du groupe de presse Dow Jones.

Ces baisses brutales sont exprimées en pourcentage pour mieux en refléter la portée sur la Bourse.

- 28 octobre 1929 : premier «Lundi noir», l'indice chute de 13 %.

- 19 octobre 1987 : second «Lundi noir», l'indice perd 22,6 %.

- 17 septembre 2001 : pour sa réouverture après les attentats du 11 septembre, il perd 7,13 %.

- 29 septembre 2008 : subissant de plein fouet les conséquences de la crise des « subprimes » (prêts à haut risque), il chute de 6,98 %.

- 8 août 2011 : le Dow Jones perd 5,15 % en réaction à la fois à l'aggravation de la crise de la dette en Europe et à la perte du triple A des États-Unis auprès de l'agence de notation Standard & Poor's.

- 24 juin 2016 : le Dow Jones perd 3,39 % au lendemain de la victoire par referendum des partisans de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne (Brexit).

Le Dow Jones a perdu plus de 9 % en 36 minutes le 6 mai 2010, du fait d'algorithmes, un épisode baptisé « Krach éclair ».

Il a par ailleurs cédé 5,66 % le 14 avril 2000 en réaction à l'éclatement de la bulle internet.

Le Dow Jones a connu une ascension météorite lors des 12 mois ayant suivi l'élection de Donald Trump et atteint le 26 janvier un niveau historique.