Le 19 octobre 1987 est survenue la pire journée de l'histoire du marché boursier américain, surnommée depuis « Black Monday » (« lundi noir ») à Wall Street.

MARTIN VALLIÈRESLA PRESSEEn une seule séance, le célèbre indice Dow Jones de la Bourse de New York a chuté de 22,6 %, ou 508 points, pour s'établir à 1738 points.

Le vendredi précédent avait été marqué par la première baisse à trois chiffres du marché, le Dow Jones ayant chuté de 108 points.

Puis, le lundi noir, l'avalanche d'ordres de vente d'actions a provoqué un effondrement du Dow Jones qui, en proportion, équivaudrait ces temps-ci à une chute de 5200 points en une seule séance !

L'ampleur du krach du 19 octobre 1987 a été en partie imputée à la négociation d'actions programmée par ordinateur, qui était alors en pleine émergence dans le milieu boursier américain.

Ces programmes de transactions, en particulier des produits d'assurances de portefeuilles, étaient censés réduire les pertes en utilisant des contrats à terme ou des options. Mais lorsqu'ils ont été mis à l'épreuve à grande échelle pour la première fois, dans un marché en chute libre, ils ont provoqué un cercle vicieux de vente d'actions et de dégringolade des prix.

Néanmoins, la déroute des assurances de portefeuilles n'était pas le seul facteur amplificateur du krach du 19 octobre 1987.

Parmi les autres facteurs baissiers : les fonds communs de placement ont été forcés de se délester de grandes quantités d'actions pour faire face aux rachats de parts par leurs clients.

Aussi, de nombreux négociants d'envergure ont fait face à des rappels de leur marge de crédit courante par leurs prêteurs paniqués, aggravant du coup la soudaine pénurie de liquidités sur le marché boursier.

À la Bourse canadienne, à une période où la Bourse de Toronto éclipsait de plus en plus la Bourse de Montréal malgré l'essor de nouvelles inscriptions au Québec, l'indice composé TSE-300 a aussi subi un lundi noir d'une ampleur sans précédent par le nombre de points amputés : 407 points en une seule séance. Toutefois, sur le coup, le recul de 11 % s'est avéré moitié moins grave que celui des principaux indices de la Bourse américaine.

Mais le recul s'est poursuivi lors des séances suivantes jusqu'au creux atteint le 28 octobre, alors inférieur de 21 % à la dernière cote de fermeture avant le 19 octobre.

De part et d'autre de la frontière, et malgré des rebonds réconfortants durant quelques séances après le 19 octobre, les principaux indices boursiers nord-américains mettront deux ans avant de se redresser à leurs niveaux records atteints quelques semaines avant le lundi noir.

Durant cette période aussi, et contrairement aux appréhensions suscitées par le krach boursier, les économies américaine et canadienne maintiendront leur élan expansionniste jusqu'à l'essoufflement en 1990, puis la récession de 1991.

Un facteur déterminant : les interventions en politique monétaire du gouverneur de la Fed, Alan Greenspan, alors en début de mandat.

Dans les semaines qui ont suivi le krach boursier, la Fed a détendu sa politique monétaire avec des baisses du taux d'intérêt directeur et des injections de liquidités dans l'économie par des achats de soutien dans le marché obligataire. 

30 ans plus tard...

Le 30e anniversaire du krach boursier d'octobre 1987 rappelle de mauvais souvenirs à la plupart des investisseurs d'expérience. Il réveille aussi des appréhensions quant au risque de répétition d'une telle débâcle boursière, dans le contexte d'un nouvel élan haussier des indices boursiers américains vers des niveaux records.

Par ailleurs, comment était la conjoncture économique en octobre 1987 en Amérique du Nord, après quelques années de « Reagonomics » aux États-Unis, avec ses politiques de déréglementation, de baisses d'impôts et de libéralisation commerciale, et de leur forte influence au Canada sur les politiques économiques du gouvernement conservateur dirigé par Brian Mulroney ?

Pour comparer cette conjoncture à 30 ans d'intervalle, La Presse a retracé quelques indicateurs-clés de l'économie et du marché boursier.

LE RODÉO BOURSIER DE 1987

Voici cinq moments marquants de cette saga financière:

25 août 1987

L'indice Dow Jones culmine à un record de 2722 points, en hausse de 41 % depuis le début de l'année 1987.

25 septembre 1987

Un mois plus tard, le Dow Jones s'est graduellement rétracté de 5 % par rapport à sa valeur record, et semble vouloir s'accrocher autour des 2575 points.

mardi 13 au vendredi 16 octobre

Le Dow Jones recule de 10 % en tout lors de quatre séances baissières consécutives. Il est alors inférieur de 17 % au sommet atteint sept semaines plus tôt.

lundi 19 octobre

Le Dow Jones bascule de 22,6 % lors du « Black Monday », la pire baisse journalière en pourcentage de l'histoire de la Bourse américaine. À 1738 points, l'indice s'est déprécié d'un tiers (36 %) par rapport au sommet de la fin d'août.

mardi 20 et mercredi 21 octobre

Le Dow Jones rebondit de 16 % sur deux séances consécutives. Mais il faudra presque deux ans avant que les deux grands indices américains - Dow Jones et S&P 500 - repassent leur niveau record de la fin du mois d'août 1987.