La société américaine de paiements mobiles Square (SQ), contrainte de revoir ses ambitions à la baisse sur fond de méfiance vis-à-vis des jeunes entreprises, a sauvé la face jeudi en s'envolant lors de son entrée à Wall Street.

Le groupe, qui fournit aux commerçants de mini-lecteurs de cartes bancaires utilisables avec un téléphone intelligent ou une tablette, a débuté sa cotation sur un bond de plus de 24% comparé à son prix d'introduction de 9 dollars arrêté la veille. Vers 10h45, son titre s'échangeait à 14,05 dollars (+56,11%).

Le baptême boursier de la société, qui a le même patron-fondateur que le réseau social Twitter, Jack Dorsey, était très attendu parce que l'entreprise était l'une des plus en vue des «licornes», les jeunes entreprises non cotées évaluées à plus d'un milliard de dollars, et l'une des rares à se lancer en Bourse cette année.

«Il est temps maintenant de retourner au travail et de faire ce qui est nécessaire pour développer Square», a déclaré sur la chaîne de télévision CNBC Jack Dorsey, qui avait sonné un peu plus tôt la célèbre cloche de Wall Street en achetant, par le biais de son téléphone portable, des fleurs à une fleuriste dont l'étal avait été installé pour l'occasion devant le New York Stock Exchange, dans le quartier financier au sud de Manhattan.

Accompagné de sa mère, Jack Dorsey a expliqué que les 243 millions de dollars levés au cours de cette opération en cédant 27 millions de titres allaient servir à «accélérer la croissance» du groupe.

En s'envolant dans les premiers échanges, Square a quelque peu sauvé la face, après s'être soldé la veille en fixant son prix d'introduction en dessous de la fourchette de 11 à 13 dollars initialement annoncée par l'entreprise, signe d'un intérêt moins prononcé qu'anticipé.

Ce prix valorisait Square à seulement 3 milliards de dollars environ, quand les derniers investisseurs privés entrés au capital l'an dernier l'avaient évalué à 6 milliards.

Les licornes surévaluées ?

Le nombre de licornes a explosé ces dernières années, et les plus grosses d'entre elles émargent désormais à des niveaux astronomiques: environ 25 milliards de dollars par exemple pour la plateforme d'hébergement chez l'habitant Airbnb, ou même 50 milliards pour le service de voiture avec chauffeur Uber.

Beaucoup d'observateurs préviennent toutefois depuis plusieurs mois que ces valorisations sont excessives, évoquant une nouvelle bulle, 15 ans après l'éclatement de celle des valeurs internet au début des années 2000.

La nette baisse de valorisation de Square s'ajoute à d'autres avertissements ces dernières semaines, comme par exemple la réduction de la valeur estimée des participations de la société d'investissements Fidelity dans plusieurs licornes dont Snapchat, le populaire service permettant d'envoyer des messages disparaissant après quelques secondes.

Pour tout arranger, Square a choisi une période tendue pour se lancer en Bourse. Le nombre d'introductions a beaucoup ralenti ces derniers mois à Wall Street, surtout dans le secteur technologique où les dernières entreprises s'étant risquées sur le marché affichent des performances mitigées.

La société de Jack Dorsey est en outre pénalisée par des handicaps qui lui sont propres, à commencer par les craintes que son patron, qui doit aussi tenter de redresser Twitter, ne lui accorde pas toute l'attention nécessaire.

«Ils ont des pertes à plein temps et un directeur général à temps partiel», résumait au début du mois Sam Hamadeh, patron de la société de recherche spécialisée dans les entreprises non cotées PrivCo.

Square tire l'essentiel de ses revenus des commissions qu'elle encaisse sur chaque paiement, et sa croissance est élevée mais montre des signes de ralentissement. Sa perte nette en revanche se creuse: elle atteignait 154 millions de dollars l'an dernier pour un chiffre d'affaires de 850 millions, et se monte déjà à 132 millions sur les neuf premiers mois de 2015.