En 15 ans, la valeur d'AOL a fondu de 97 % ! L'actif sur lequel l'opérateur de télécommunications américain Verizon souhaite mettre la main avec son offre de 4,4 milliards n'en est pas moins aussi - sinon plus - intéressant que ce qui avait incité le groupe Time Warner à empiler près de 163 milliards US en 2000.

On se souvient tous de la fusion AOL avec le géant des médias « traditionnels » Time Warner au plus fort de la bulle internet. L'entreprise, alors connue du grand public comme America Online, était à son apogée avec son offre globale de services internet qui comprenait transmission de données, portail, moteur de recherche, messagerie, etc. Son appel sonore « You've got mail » est inoubliable.

La transaction conclue avec « l'empire » était alors la plus grosse de l'histoire. C'est devenu l'un des plus grands échecs financiers. La faiblesse technologique et le marasme publicitaire ont fait leur oeuvre, tandis que le groupe tardait à converger.

Redevenue indépendante sous la houlette de Tim Armstrong, un transfuge de Google, AOL a supprimé des milliers d'emplois et concentré ses efforts sur le contenu en ligne, la vidéo et la publicité. L'entreprise a notamment mis la main sur le journal en ligne The Huffington Post, la plateforme Adap.tv, qui permet de connecter annonceurs et producteurs de contenu vidéo, ainsi que l'entreprise Gravity spécialisée dans la personnalisation de contenu internet.

Redressement

De spectaculaires résultats financiers ont confirmé le redressement d'AOL l'année dernière. Le bénéfice, en hausse de 36 %, a atteint 125 millions US, tandis que le chiffre d'affaires augmentait de 15 %, à 1,92 milliard US.

AOL est aujourd'hui le troisième fournisseur de vidéos en ligne, derrière les sites de Google et Facebook, avec 67 millions de visiteurs uniques en février. Sa plateforme publicitaire vidéo rejoint par ailleurs près de 40 % de la population américaine, ce qui en fait le numéro quatre de l'industrie.

Ces changements n'ont pas manqué d'attirer l'attention des géants du Web désireux de contrer le phénomène Google. L'on envisageait davantage un rapprochement avec Yahoo ou Microsoft, mais la rumeur s'est rapidement concentrée sur Verizon.

La fusion avec le géant Verizon - éminemment rentable - « va donner naissance au plus gros acteur de téléphonie mobile et de vidéo américain », selon Tim Armstrong. Il s'agit d'un important virage stratégique pour le numéro deux américain des télécommunications, derrière AT&T.

« Nous sommes enthousiastes de travailler avec les équipes de Verizon pour créer la prochaine génération de média dans le domaine du mobile et de la vidéo. »

Verizon est déjà un diffuseur de contenus avec sa chaîne exclusive FiOS TV, à laquelle sont abonnés 5,6 millions de foyers américains. Il a également noué un partenariat avec la Ligue nationale de football (NFL) pour diffuser des matchs sur les téléphones mobiles de ses clients.

L'opérateur doit aussi lancer dès cet été son propre service de vidéo afin d'attirer de nouveaux clients sur son réseau. Il s'agirait de proposer des programmes payants et gratuits à ses abonnés, mais sur des formats et des contenus différents de la télévision traditionnelle.

Photo Richard Drew, Associated Press

L’opérateur de télécommunications américain Verizon souhaite mettre la main sur AOL pour la somme de 4,4 milliards. 

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Source : Bloomberg

Chronologie

• 1985 - Création sous le nom de Quantum Computer Services

• 1990 - America Online est l'un des plus gros fournisseurs d'accès à l'internet.

• 2000 - Fusion avec Time Warner en 2000 au plus fort de la bulle internet

• 2009 - Time Warner remet AOL en Bourse.

• 2015 - Verizon offre de racheter AOL pour 4,4 milliards US.

La recommandation

Verizon pourrait devoir renchérir. L'action d'AOL se négociait hier à un prix supérieur aux 50 $US proposés par Verizon, lesquels représentent par ailleurs une prime de 23 % par rapport au cours moyen du titre sur les trois derniers mois. Selon le chroniqueur Paul Ausick, du site 24/7 Wall Street, l'offre sur la table « est certainement ouverte à une certaine concurrence » que le conseil d'administration d'AOL devra considérer. Selon lui, AT&T est trop occupée avec l'acquisition de DirecTV mais Comcast, qui a récemment retiré une offre d'achat sur Time Warner Cable, pourrait en faire un prix de consolation.