Le remède appliqué par la Banque du Canada a eu un effet euphorisant immédiat sur la Bourse, hier, et encore plus «là où ça fait mal». Les secteurs de l'énergie et des ressources ainsi que les institutions financières ont particulièrement profité de l'effet antidépresseur de la baisse du taux directeur, malgré le diagnostic inquiétant sur la croissance économique qui accompagnait la prescription.

Les titres-vedettes du secteur pétrolier canadien, comme Suncor, Canadian Natural Resources et Encana, ont gagné plus de 4% dans la journée avec l'amélioration du contexte financier. Au total, le sous-indice de l'énergie de la Bourse de Toronto a progressé de 3,2%. La remontée de 2% du prix du brut, qui revient à 47,40$US le baril, a aussi favorisé le bond des valeurs pétrolières.

Bonne journée également pour les titres de mines et métaux, qui profitent de même de l'amélioration de leur marge entre le coût de la ressource, en dollars canadiens dépréciés, et son prix de vente, en dollars américains bonifiés, à la suite de l'initiative de la Banque du Canada. Le secteur a gagné 5,7% durant la journée, tandis que les prix de l'once d'or - près de la barre des 1300 $ US -, de l'argent et du cuivre restaient fermes.

Impact positif aussi du côté des institutions financières qui récupèrent 1,5% de leur valeur. Les banques ont pâti des craintes des investisseurs pour leur participation au financement de l'exploration et de la production coûteuse de pétrole et de gaz de schiste, ces derniers mois. Exagérément, puisque ce portefeuille de prêts n'est pas assez important pour avoir des répercussions significatives sur les créances, selon les analystes. Elles ont aussi fait les frais des hautes attentes de la communauté financière, lors de la divulgation des résultats de leur dernier exercice financier.

La Canadian Western Bank, qui était hier à son plus bas niveau en 18 mois, a bondi de 4,3%. C'est l'institution financière canadienne la plus sensible aux bas prix du pétrole, selon Sumit Malhotra, de Scotia Capital. Même si les prêts directs à l'industrie pétrolière comptent pour seulement 2% de son portefeuille, le financement des équipements, des besoins commerciaux, de l'immobilier et, dans une certaine mesure, des prêts à la consommation est tributaire de la vigueur économique dans l'Ouest canadien.

De bon augure

Au total, l'indice S&P/TSX du marché canadien progresse de 252 points, à 14 560, soit un gain de 1,8% pour la journée. Il a bondi d'une centaine de points sur le coup de la nouvelle que n'avait prévu aucun des 22 économistes récemment sondés par l'agence Bloomberg. La dernière baisse du taux directeur, le 21 avril 2009, avait vu un gain boursier de 1,3% sur la journée. Le marché avait poursuivi à la hausse les trois séances suivantes.

Le marché boursier canadien a nettement mieux performé que les grands indices américains, hier. Le Dow Jones des industrielles de la Bourse de New York et le S&P 500 marquent des gains de moins de 0,5% pour la séance. Les marchés européens étaient aussi légèrement positifs à la veille de la mise à jour très attendue de la politique de la Banque centrale européenne. Les investisseurs anticipent plus que jamais un soutien à l'économie, là aussi, incluant un programme de rachats d'actifs de grande ampleur, élargi aux dettes souveraines, afin de lutter contre les risques de déflation en zone euro.

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La recommandation

Bien qu'il estime que l'impact de la baisse du taux directeur sera marginal pour les banques, John Aiken, de la firme torontoise Barclays, croit que la Scotia et la Toronto-Dominion en profiteront davantage en raison de leur plus grande présence à l'étranger et de leur moindre concentration dans le marché canadien des prêts aux particuliers. L'analyste financier voit plus d'avantages dans la baisse de valeur du dollar canadien pour ces multinationales que dans la réduction des taux d'intérêt à court terme, laquelle ne devrait pas susciter de demande additionnelle de prêts. Les services de gestion de fortune - rare source de croissance qui reste aux banques - profiteront par ailleurs de l'appréciation des fonds communs de revenus.