Le chausseur de prestige Jimmy Choo a fait des débuts plutôt discrets à la Bourse de Londres vendredi, mais son entrée sur le marché n'en est pas moins révélatrice de la bonne santé de ce segment de l'industrie du luxe.

Fondée il y a près de 20 ans par le designer d'origine malaisienne Jimmy Choo et une éditrice du magazine de mode Vogue qui avaient ouvert une première boutique à Londres, cette entreprise commercialise des souliers portés par des personnalités comme Michelle Obama, Kate Middleton, Nicole Kidman et Lady Gaga.

Depuis vendredi, elle est valorisée 546 millions de livres (682 millions d'euros).

Sa maison-mère, JAB Luxury, qui possède aussi les chaussures Bally, a mis sur le marché 25,9 % du capital de Jimmy Choo, fixant un prix initial de 140 pence par action et empochant 141 millions de livres (176 millions d'euros) au passage.

Certes, le tarif retenu figure dans le bas de la fourchette évoquée initialement et une source proche du dossier avait cité il y a un mois une somme espérée de 200 millions de livres pour ces premiers pas boursiers.

Mais la démarche n'en est pas moins significative de la tendance ascendante empruntée par la chaussure de luxe.

L'action s'échangeait autour de son niveau d'introduction, passant de main en main entre investisseurs qualifiés vendredi matin à Londres où elle flottera librement dès le 22 octobre.

Des traces à suivre?

«Nous sommes ravis d'avoir mené avec succès notre introduction en Bourse», s'est réjoui le français Pierre Denis, directeur général de Jimmy Choo, dans un communiqué.

Lors de l'annonce initiale le 23 septembre, cet ancien responsable du numéro un mondial du luxe LVMH avait expliqué à l'AFP que le groupe utiliserait ces fonds, entre autres, pour financer son développement en Asie.

Jimmy Choo pense notamment au Japon, deuxième marché mondial pour l'industrie du luxe depuis un moment, et à la Chine, où une population de plus en plus nombreuse peut désormais accéder au haut de gamme.

L'enseigne voudrait ouvrir de 10 à 15 nouvelles boutiques par an dans le monde, où elle est présente aujourd'hui dans 34 pays, particulièrement en Europe et aux États-Unis, avec 120 magasins gérés en direct et 50 franchisés supplémentaires au total.

«L'entrée en Bourse de Jimmy Choo, la première du genre, entre dans le cadre d'une réussite particulière de l'industrie de la chaussure, comparée à celle d'autres accessoires» de l'industrie du luxe, a expliqué Fflur Roberts, spécialiste du secteur chez Euromonitor International.

Il a souligné qu'il y a cinq ans, ceux qui voulaient un accessoire comme signe extérieur de richesse achetaient un sac à main. «Aujourd'hui, c'est de plus en plus la chaussure. Et la demande est encouragée par les importants investissements des grands magasins connus, qui ont ouvert d'immenses rayons chaussure pour répondre à la demande insatiable pour des souliers à la mode», a-t-il détaillé.

Le secteur de la chaussure de luxe va dégager un chiffre d'affaires global de quelque 14 milliards d'euros cette année, en hausse de 5 %, a noté Bain & Company dans une étude publiée cette semaine. L'année précédente, cette croissance avait atteint 7 % et dans les deux cas, elle a été plus rapide que celle de la maroquinerie (qui pèse presque trois fois plus lourd toutefois).

D'autres chausseurs de luxe, comme Christian Louboutin et Charlotte Olympia, pourraient être tentés suivre les traces boursières de Jimmy Choo, d'après les analystes.

Dans l'industrie du luxe au sens large, plusieurs firmes se sont lancées récemment, comme les groupes italiens Salvatore Ferragamo et Brunello Cucinelli ou l'entreprise d'origine française Moncler à Milan, Prada à Hong Kong et Michael Kors sur le marché américain, où Marc Jacobs voudrait aussi faire ses débuts.