«C'est comme un obèse couché sur un lit d'eau», écrivait hier Charles Morris, gestionnaire de HSBC Global Asset Management, à Londres, à propos du débordant dollar américain.

Le billet vert a fait des vagues sur les marchés boursiers partout dans le monde ces dernières semaines. La Bourse de Toronto, riche en pétrole et métaux libellés en dollar US, a particulièrement écopé de son repositionnement.

Mais le dollar américain n'est pas mauvais coucheur. Sa montée en force devrait avoir aussi des échos heureux tant à Bay Street qu'à Wall Street.

Il est faux de croire que c'est un «vent de face» pour les marchés boursiers aux États-Unis, affirme Jonathan Golub, de RBC Marchés des capitaux. Au contraire, le dollar et l'économie nationale vont en tandem, ce qui devrait déjà rassurer les marchés boursiers.

Mieux encore, un dollar en hausse supporte des multiples boursiers plus élevés, établit le stratège avec un graphique au parallélisme probant remontant jusqu'en 1990. Et pour les Américains, la force du dollar repousse l'inflation.

Selon l'expert des marchés américains de RBC, les secteurs cycliques devraient le plus profiter du levier économique. Toutefois, prévient-il, les producteurs d'énergie, de métaux et certaines sociétés sensibles aux prix des ressources pourraient affronter de la résistance.

Jonathan Golub relativise par ailleurs la montée en puissance du billet vert. Le gain de 5% enregistré depuis juin, ou de 15% si on remonte au milieu de 2011, est «relativement modeste sur un plan historique». Le billet américain avait tout de même progressé de 40% entre 1995 et 2002. Entre-temps, le Dow Jones doublait de valeur.

Au Canada

On verra aussi bientôt les bénéfices que tirent les sociétés exportatrices canadiennes de la faiblesse relative du huard. Les sociétés papetières et forestières sont traditionnellement les premières intéressées.

Les fabricants de pièces d'autos tels que Magna International ou d'avions comme Héroux-Devtek, qui paient leurs dépenses en dollars canadiens et vendent de leurs produits en dollars américains, gagnent par ailleurs des deux côtés.

Les détaillants en alimentation, les assureurs, les médias et même les services publics et les télécoms, actuellement en défaveur, ont aussi coutume de mieux faire que le marché quand le dollar américain pousse, suivant une étude de la Banque Scotia publiée l'an dernier. Notons que ces observations documentées ne valent que dans un marché haussier - ce qui serait toujours le cas -, les investisseurs privilégiant les valeurs de premier ordre aux entreprises plus à risque dans un contexte baissier.

LA RECOMMANDATION 

Ryan Bushell, gestionnaire de portefeuille pour la firme torontoise Leon Frazer&Associates, croit que la faiblesse des cours des ressources causée par la force du dollar américain crée une occasion pour accumuler de ces valeurs à des prix attrayants. Selon lui, la vigueur du dollar est attribuable aux troubles politiques au Royaume-Uni, économiques en Europe et monétaires au Japon, alors que les États-Unis continuent de tirer la planète d'une récession mondiale. Se concentrant sur les revenus de dividendes qui garantissent à son portefeuille un rendement minimum de 3 ou 4%, que la Bourse monte ou baisse, le stratège mise sur la Banque Scotia, le fonds de revenus pétroliers Freehold et le producteur pétrolier Cenovus.