Berkshire Hathaway (BRK.A), le prestigieux fonds du non moins célèbre Warren Buffett, est assis sur un fabuleux trésor de 55,5 milliards US, du jamais-vu qui lui laisse une belle marge de manoeuvre pour de nouvelles acquisitions, mais révèle aussi sa frilosité face aux prix élevés actuels.

Le groupe du Nebraska a dévoilé vendredi soir, après la clôture de Wall Street, des résultats financiers trimestriels records avec un bénéfice net de 6,4 milliards US, ou 3889$US (si, si!) par action ordinaire de classe A, en croissance de plus de 40% par rapport à la période correspondante de l'exercice précédent.

Le trésor s'enrichit de 1 milliard US chaque mois. Au niveau courant, l'entreprise a deux fois plus de réserves qu'il lui faut pour que sa filiale d'assurance puisse faire face à un éventuel cataclysme.

Le marché boursier aime ces chiffres et a ajouté 5555$US à la valeur du titre pour le porter à 194 834$US, dans un marché part ailleurs encore tiraillé, hier. Notons qu'il y a aussi une catégorie B plus accessible, mais ne comportant que 1/1500 droit de vote. Celles-ci ont gagné 3%, à 129,73$US pièce.

Le panier d'achats

Avec 55 milliards US à investir, le milliardaire américain pourrait, par exemple, ajouter le Canadien Pacifique (35 milliards CAN au marché) à son réseau de chemins de fer, mettre la main sur la Banque Nationale (16 milliards) pour compléter son portefeuille financier, acheter la chaîne Canadian Tire (8 milliards) parce que c'est le genre de concept à lui plaire, et il resterait assez à l'amateur de vieux journaux pour s'offrir Québecor (3 milliards).

Mais l'investisseur de 83 ans est peu porté sur les achats à l'étranger et voudra plutôt ajouter à son portefeuille boursier américain qui comprend déjà des actions de plus de 80 entreprises bien établies. General Motors est déjà à sa portée (54 milliards US), de même que la chaîne de détaillants Costco (52 milliards US). En forçant un peu, il pourrait ajouter Colgate-Palmolive (58 milliards US) à son carré d'as. Tout cela dit à fins d'illustration, bien entendu.

Warren attend son heure

En fait, le marché boursier n'est guère invitant pour Warren Buffett, réputé pour ses prises de participation à bas prix dans des compagnies bien établies. Le détenteur de la quatrième fortune mondiale dit attendre «la grosse balle facile» qui lui garantit un bon rendement.

Même après le choc de la semaine dernière qui a mis fin à cinq mois consécutifs de hausse pour l'indice S&P 500 et effacé tous les gains de l'année pour le Dow Jones, le marché boursier américain demeure effectivement trois fois plus élevé qu'au printemps de 2009. Le niveau actuel des cours représente 17,6 fois les bénéfices courus par les 500, alors que la moyenne historique est de 14 fois.

La grosseur de Berkshire est aussi devenue contraignante, car peu d'entreprises sont assez grandes pour mériter l'attention de Warren Buffett. L'Oracle d'Omaha refuse par ailleurs de retourner en dividendes les profits de sa firme, estimant que ses actionnaires obtiendront un meilleur rendement en lui laissant les réinvestir.

Berkshire compte parmi les dix sociétés les plus respectées du monde, selon le plus récent classement du magazine financier américain Barron's, et son président Warren Buffett a une grande influence sur Wall Street. Plusieurs voient dans son attentisme une indication que le marché est trop cher.

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LE CARRÉ D'AS

Berkshire Hathaway est réputée pour son carré d'as : des participations dans la société de cartes de crédit American Express (14,2% du capital fin 2013), le géant des sodas Coca-Cola (9,1%), le groupe informatique IBM (6,3%) et la banque Wells Fargo (9,2%). Ces entreprises lui ont rapporté pour 1,4 milliard US de dividendes en 2013. Le conglomérat du Nebraska a aussi des participations dans toute une série d'entreprises, dont la pétrolière ExxonMobil (0,9%), la banque Goldman Sachs Group (2,8%), l'assureur allemand Munich Re (11,2%), le fabricant de produits de grande consommation Procter&Gamble (1,9%), le laboratoire Pharmaceutique français Sanofi (1,7%) et les supermarchés Tesco (3,7%) et Wal-Mart (1,8%). Berkshire dispose aussi d'une option d'achat sur 700 millions d'actions de Bank of America, qu'il peut exercer jusqu'en septembre 2021 pour 5 milliards US. Ces titres valent déjà le double en Bourse.