Il n'y a pas que la décision d'Air Canada de ne pas remplacer 25 appareils E-190 Embraer qui a pesé sur le titre de Bombardier à la fin de la semaine. L'annulation potentielle d'une commande pour des avions CSeries par un important client américain ainsi que des commentaires de certains analystes ont aussi contribué à accentuer la pression.

Des interrogations au sujet de la solidité de la commande de 40 avions CSeries passée par Republic Airways ont rapidement circulé jeudi sur Bay Street, ce qui pourrait expliquer la chute accentuée du titre de Bombardier en fin de séance le même jour.

L'inquiétude entourant la commande de Republic Airways est liée à ce que son PDG, Bryan Bedford, a déclaré en marge du congrès annuel de la Regional Airlines Association qui se déroulait pendant trois jours cette semaine à Saint-Louis, au Missouri. Bryan Bedford a dit qu'une décision définitive au sujet de la CSeries est pour l'instant, reportée selon ce que rapporte la publication spécialisée Flight Global.

Republic Airways est devenu, en 2010, le premier client nord-américain de la CSeries en passant une commande de 40 CS300 et en prenant une option pour 40 autres.

La valeur de cette commande était évaluée à plus de 3 milliards (6,3 milliards en incluant les options). Republic a vendu l'automne dernier son transporteur à rabais Frontier Airlines, ce qui pourrait modifier les plans de l'entreprise.

«Le PDG de Republic Airways a pratiquement confirmé jeudi que la commande de 40 appareils CSeries pourrait être annulée», indique l'analyste Turan Quettawala, de la Banque Scotia.

«Je m'inquiète de la solidité de cette commande depuis le jour où Republic a finalisé les détails entourant son acquisition d'Airbus A319/A320 neo en novembre 2011», ajoute-t-il.

«Bien que les commentaires du grand patron de Republic Airways ne soient pas définitifs, je continue de croire qu'il est plus probable que Republic annule son entente pour les avions de la CSeries que le contraire.»

Les entreprises de crédit-bail

Il y a un autre élément qui fait réfléchir Turan Quettawala au sujet de la CSeries. Il a regardé de près les commandes passées pour des avions de la CSeries par des entreprises de crédit-bail (comme Lease Corporation International et Ilyushin Finance, par exemple). Ces clients ont passé des commandes pour des avions CSeries dans le but de les louer à des transporteurs par la suite.

Il dit croire que certaines entreprises de location n'ont pas encore trouvé de clients pour tous les appareils CSeries commandés, ce qui pourrait créer une forme de concurrence pour de nouvelles ventes de CSeries par Bombardier. Des transporteurs peuvent ainsi se trouver avec une décision à prendre: acheter des avions CSeries de Bombardier ou opter pour la location chez une entreprise de crédit-bail.

La surprise «Air Canada»

La décision d'Air Canada de continuer d'exploiter 25 appareils E-190, au lieu de les remplacer, a par ailleurs surpris beaucoup de monde, dont l'analyste Walter Spracklin, chez RBC.

«La sélection de la CSeries par Air Canada pour renouveler la flotte de E-190 était une formalité à mes yeux. Je n'avais jamais pensé qu'Air Canada choisirait de ne pas remplacer les appareils en question. C'est néfaste pour Bombardier en ce sens qu'on pouvait espérer qu'une commande d'Air Canada allait contribuer à améliorer le sentiment autour de la CSeries.»

Turan Quettawala abonde dans le même sens que son collègue même s'il concède qu'Air Canada a pris la bonne décision étant donné la situation dans laquelle le transporteur se trouve.

«Bombardier a effectivement besoin de quelques gros transporteurs bien en vue comme Air Canada pour que le carnet de commandes de la CSeries se solidifie.»

Pas de noms importants

L'analyste de la Scotia souligne qu'à part Lufthansa et Korean Air, il n'y a pas de noms importants dans le carnet de commandes. «Ça peut poser problème si on prend en compte à quel point les activités dans le transport aérien peuvent se corser.»

Bombardier vise 300 commandes fermes pour l'entrée en service de sa CSeries prévue pour la deuxième moitié de l'an prochain. Le carnet de commandes fermes pour la CSeries atteint actuellement les deux tiers de l'objectif fixé. En excluant la commande de 40 appareils de Republic Airways, Bombardier recule à 50% de sa cible.

Le repli boursier de 7% du titre de Bombardier, jeudi, s'est fait dans le plus imposant volume de transactions observé depuis le 13 février. Cette journée-là, Bombardier avait publié des résultats trimestriels et des prévisions inférieurs aux attentes et l'action avait cédé 9% à 3,68$.

Republic Airways en bref

> Republic Airways est un holding américain qui exploite les transporteurs aériens régionaux Chautauqua Airlines, Republic Airlines et Shuttle America.

> PDG: Bryan Bedford

> Siège social: Indianapolis, Indiana

> Symbole boursier: RJET

> Bourse: NASDAQ

> Nombre d'employés: 6000

> Flotte: environ 250 avions (notamment des Q400 de Bombardier)