Quel aura été le meilleur moment pour acheter des actions de Facebook? a) À son entrée en Bourse quand c'était la tendance du moment; b) Un an après quand plus personne n'en voulait; c) Aujourd'hui même alors que le titre est proche de son niveau record?

La deuxième réponse, probablement. L'aventure boursière de Facebook a bien profité aux contrarians (anticonformistes) qui savent acheter bas et vendre haut. C'est aussi l'illustration d'une autre grande leçon: bien connaître le produit que l'on acquiert.

Les investisseurs dits «qualifiés» qui ont acheté à l'aveugle lors de l'appel public à l'épargne de mai 2012 ont payé le gros prix pour mettre la main sur les actions les plus convoitées de l'année. Le titre du réseau social, émis à 38$US, avait déjà abandonné 11% de sa valeur au deuxième jour de sa cotation.

Outre des problèmes techniques accusés par le NASDAQ, l'introduction en Bourse ratée a mis en lumière un premier problème d'accès à l'information financière. La banque américaine Morgan Stanley a conservé un contrôle très strict sur la fourchette de prix et la taille exacte de la mise sur le marché, tenant dans l'ignorance les 32 autres institutions financières ayant participé à l'opération. Un partenaire a surnommé l'opération «le show Morgan Stanley».

Les boursicoteurs qui se sont jetés sur le titre en disgrâce sur la foi d'un premier bénéfice net trimestriel seulement n'ont guère fait mieux que les actionnaires de la première heure. Ils ont pu regarder ensemble le titre-vedette du web fondre du tiers, en moins d'un mois, miné par les inquiétudes liées au mobile.

Retour en grâce

Ce n'est que 14 mois après son départ raté que Facebook a finalement pu arracher un premier sourire à ses actionnaires. Le 31 juillet 2013, l'action retrouva pour la première fois en séance son prix d'introduction en Bourse.

Entre-temps, les analystes et les investisseurs diligents avaient pu étudier la situation en analysant attentivement les premiers rapports trimestriels suivis du bilan annuel exhaustif. Les observateurs ont pu mesurer l'impact réel de l'essor, tant redouté, des téléphones intelligents et des tablettes sur l'audience et le chiffre d'affaires du groupe. On a aussi pu quantifier l'apport des premières publicités insérées entre les états d'âme et les vidéos de chat de nos amis.

Au fil des mois, tenant le cap sans se soucier des déboires boursiers, le grand patron et fondateur Mark Zuckerberg s'est aussi appliqué à bien expliquer le modèle d'affaires peu commun ni évident de son entreprise, alors qu'il était resté silencieux et invisible aux premiers jours du brassage en Bourse de ses actions. Pour mal faire, le jeune homme de 29 ans était à Rome, en lune de miel, à ce moment critique.

Réponse spectaculaire

La réponse des marchés a été spectaculaire. La hausse boursière enclenchée à l'été s'est poursuivie à la faveur des bons résultats financiers, jusqu'à un sommet historique de 62,57$US, jeudi dernier, suivi d'un repli à 61,46$US, hier. Pour la suite, le choeur des analystes est très majoritairement «acheteur», cependant que le potentiel de gain attendu n'est plus que de 11%.

---------------

LA RECOMMANDATION

Rappelons la sagesse de l'oracle d'Omaha. Warren Buffett s'était bien gardé de recommander Facebook en dépit de son amitié avec Mark Zuckerberg, se laissant beaucoup de temps pour en juger la vraie valeur. On retiendra aussi ce commentaire de la première heure: «L'idée que quelque chose qui sort... qui est offert avec des commissions importantes, plein de publicité, que le vendeur choisisse son moment pour vendre, puisse être le meilleur investissement que je peux faire dans le monde parmi des milliers de choix, est mathématiquement impossible», avait déclaré M. Buffett en entrevue à CNN.