L'annonce de la Réserve fédérale (Fed) jeudi dernier a eu un tel impact sur les Bourses que certains experts prédisent maintenant de nouveaux sommets historiques avant la fin de l'année.

Mais si cette idée fait son chemin chez les analystes techniques, les stratèges qui s'appuient sur l'analyse fondamentale sont pour leur part plutôt sceptiques.

C'est parce que l'indice S&P 500 a surpassé son niveau d'avril, qui constituait une résistance majeure du fait qu'il s'agissait du sommet des 52 dernières semaines, que certains analystes techniques sont si optimistes.

Ils évoquent maintenant la possibilité que l'indice rejoigne au cours des prochains mois son sommet historique de 1565 atteint le 9 octobre 2007.

L'indice a clôturé jeudi à 1460.

Les techniciens notent également que les moyennes mobiles de 50 et de 200 jours, qui sont le reflet de la tendance des marchés, ont maintenant toutes deux une pente nettement ascendante, ce qui permet de croire au maintien de la tendance.

«Les indicateurs historiques s'améliorent suffisamment pour que les hésitations des marchés cette semaine, après la poussée inspirée par l'action de la Fed jeudi dernier, ne soient qu'une pause avant un assaut vers le sommet de 2007», affirmait Louise Yamada sur les ondes de CNBC en début de semaine.

Mme Yamada a dirigé durant plusieurs années le département d'analyse technique du courtier Smith Barney, qui fait maintenant partie de Citigroup.

En 2005, elle fondait sa propre firme de recherche indépendante. L'indice n'est plus qu'à 7% de son sommet historique.

Ce que disent les stratèges

Les principaux indices boursiers ont déjà surpassé les cibles que la majorité des stratèges avait fixées en début d'année. Depuis la reprise boursière en juin, l'indice S&P 500 est à la hausse de 14%. Mais les stratèges ne semblent pas pour autant enclins à les réviser substantiellement.

Desjardins vient de faire passer sa cible du S&P 500 pour la fin de l'année simplement de 1400 à 1425. Si la révision de la cible n'est pas plus importante, c'est parce que, dans leur scénario de base, les prévisionnistes de Desjardins craignent un retour des tensions, autant aux États-Unis qu'en Europe, explique Mathieu D'Anjou, économiste principal.

Les Américains auront à composer avec une élection alors qu'on s'approche de la falaise fiscale du 31 décembre sans qu'une solution ne se pointe. En Europe, on craint que la mésentente entre les dirigeants de certains pays revienne vite compliquer la mise en place d'une solution durable à la crise de l'euro.

À l'Industrielle Alliance, on pense que l'effet de la dernière annonce de la Fed est déjà passé.

Si la performance des marchés durant l'été a surpassé les attentes, c'est probablement parce que plusieurs prévoyaient ces interventions de la Fed, tout comme celles de la Banque centrale européenne (BCE) le mois précédent, explique Luc R. Fournier, gestionnaire de portefeuilles et membre de l'équipe qui formule la stratégie.

«Les marchés ont déjà carburé sur les interventions des banques centrales, dit-il. À partir de maintenant, ce sont les données économiques qui seront publiées d'ici là qui détermineront où termineront les marchés en 2012. Comme l'embellie économique pourrait tarder, la patience des investisseurs pourrait être mise à rude épreuve au cours des prochains mois.»

Se mettre à l'abri des facteurs saisonniers

En agissant rapidement, la Fed avait peut-être aussi comme objectif de protéger les marchés boursiers devant l'arrivée d'une saisonnalité défavorable, avance Ismaël Chiadmi, directeur de l'analyse quantitative chez Montrusco Bolton.

«La Fed ne veut surtout pas mettre en péril l'effet de création de richesse qu'entraîne la hausse des marchés boursiers, alors que septembre et octobre sont des mois généralement peu favorables à une embellie des marchés», dit-il.

L'action de la Fed ajoute aussi à la complaisance des investisseurs qui se sentent à l'abri grâce à ses interventions répétées.

«L'indice VIX qui mesure cette complaisance atteint un niveau qui annonce pour bientôt une correction importante des marchés», dit M. Chiadmi.