Les difficultés subies par Facebook au moment de son entrée en Bourse ont fait le bonheur des vendeurs à découvert. À peine trois semaines après son émission, Facebook a perdu près de 30% de sa valeur, et il est le titre le plus vendu à découvert de tous les titres d'entreprises à grande capitalisation aux États-Unis.

Cela signifie-t-il que le titre du média social qui compte plus de 900 millions d'abonnés et dont les courtiers avaient estimé la valeur à 100 milliards US continuera à péricliter?

Vendre à découvert consiste à miser sur la baisse du cours d'une action. L'opération consiste à emprunter le titre et à le vendre immédiatement dans le but de le racheter plus tard à un prix plus bas et à le retourner alors au prêteur. Si le cours de l'action baisse, un profit en résulte.

Selon les données compilées par Bloomberg et Data Explorers, les positions à découvert dans le titre de Facebook atteignent environ 6% des actions en circulation.

En comparaison, les positions à découvert dans les 52 plus grosses entreprises du S&P 500 totalisent en moyenne 0,73% des actions en circulation. Toujours selon Bloomberg, Visa Inc et Walt Disney font l'objet des plus importantes positions à découvert après Facebook, soit 2,96% et 2,56% de leurs actions en circulation.

Stratégie long-short

Plusieurs hedge funds, pour diminuer le risque des portefeuilles, détiennent à la fois des positions acheteur dans les titres d'entreprises qu'ils croient les plus prometteuses et des positions à découvert dans les actions d'entreprise pour lesquelles les perspectives sont moins bonnes. Ce sont d'ailleurs ces types de stratégies qui sont à l'origine des hedge funds et qui ont fait la fortune des fonds de dotation de certaines grandes universités américaines.

Faut-il montrer du doigt ces gestionnaires de stratégies long-short pour la chute précipitée de Facebook? Cela a peu de sens, répond Randy Kelly, directeur général de Formula Growth, un hedge fund de Montréal qui utilise ce type de stratégies. «La raison essentielle pour laquelle on va vendre à découvert, c'est que le modèle d'affaire de l'entreprise ne permet plus d'espérer une croissance des ventes et des bénéfices, ce qui n'est pas le cas de Facebook en ce moment», dit-il.

Bien que certaines interrogations subsistent, telle la pénétration de Facebook dans le secteur de la mobilité et l'inexpérience de son président à diriger une entreprise inscrite en Bourse, Facebook a un brillant avenir devant elle, selon lui. «Quelque chose de significatif devra se produire pour faire dérailler l'entreprise», dit-il.

Arbitrage à court terme

Mais à court terme, l'émission de Facebook a offert une occasion rêvée aux professionnels de l'investissement, dont de nombreux hedge funds qui se cherchent à profiter de toutes les anomalies que présentent les marchés.

L'euphorie que causait l'arrivée en Bourse de ce nom que toute la planète connaît et admire a poussé les courtiers à hausser substantiellement le prix ainsi que le nombre d'actions à être émises de Facebook. «Le groupe de courtiers dirigé par Morgan Stanley, et qui comprenait entre autres Goldman Sachs et JP Morgan, a très mal géré l'émission», dit Randy Kelly.

Les vendeurs à découvert ont vite compris qu'au prix offert, l'appétit des gestionnaires institutionnels était beaucoup moins grand que l'engouement des individus moins bien habilités à déterminer la juste valeur de Facebook. Ces vendeurs à découvert vendront tant et aussi longtemps qu'ils ne sentiront pas que l'on approche enfin du prix qui incitera les gestionnaires professionnels à se mouiller.

Quel est ce prix? Bien malin qui peut le dire. Mais les gestionnaires sont aux aguets. Future Growth détient pour l'instant une modeste position acheteur dans Facebook. «Question de se mouiller un peu», indique Randy Kelly. «Mais avant d'en rajouter, on attendra de voir les résultats du deuxième trimestre, qui seront publiés en juillet», ajoute-t-il. Ils pourraient ne pas être très bons et l'occasion d'achat pourrait être encore meilleure.

Quant à l'ampleur des positions à découvert dans Facebook, elle n'est pas particulièrement significative, selon lui. Étant donné le volume de transactions quotidiennes, soit entre 30 et 60 millions d'actions, ces positions peuvent être couvertes rapidement.