«Rona n'est pas à vendre.» «Rona doit rester sous contrôle canadien.»

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C'est un véritable plaidoyer auquel les dirigeants de Rona [[|ticker sym='T.RON'|]] ont dû se livrer hier devant des actionnaires préoccupés par les rumeurs de tentative de prise de contrôle. En particulier par le concurrent américain Lowe's, depuis que l'un de ses dirigeants a déclaré un intérêt envers Rona et son vaste réseau de points de vente au Canada.

«Rona n'est pas à vendre. En tout ou en morceaux», a clamé le président sortant du conseil, Jean Gaulin, devant l'assemblée d'actionnaires tenue dans l'énorme centre de distribution de Boucherville.

Mais à un actionnaire qui demandait si le conseil de Rona serait réceptif à «une offre à 15 ou 16$ l'action qui pourrait être intéressante», M. Gaulin a répondu qu'il laissait son « successeur s'occuper de ça».

Il s'agira de Robert Paré, avocat d'affaires de 57 ans qui siège à quelques conseils, dont celui du détaillant de meubles BMTC et celui du fabricant de charpentes d'acier ADF.

Même le nouveau venu au conseil de Rona, Geoff Molson, président du Club de hockey Canadien et membre de la direction de brasseur Molson Coors, n'a pu ignorer le malaise parmi les actionnaires. «C'est une entreprise canadienne, québécoise. C'est important pour moi, ça», a-t-il indiqué.

C'est toutefois le président et chef de la direction de Rona, Robert Dutton, qui a tenu les propos les plus insistants en faveur du maintien de l'entreprise sous contrôle canadien et québécois.

«Les consommateurs canadiens préfèrent Rona en tant que commerce de rénovation parce que nous avons une grande implication économique et sociale. Nous sommes l'un des rares détaillants d'importance qui soutiennent systématiquement les fournisseurs et les manufacturiers canadiens», a-t-il répondu à une question d'actionnaire.

Lors de son discours, M. Dutton a vanté le plan d'affaires de Rona pour retrouver un bon élan commercial et améliorer ses résultats d'exploitation après quelques trimestres consécutifs de «conjoncture difficile».

En février dernier, Rona avait étonné ses actionnaires et les analystes en annonçant son repli des magasins de grande surface en Ontario. Au moins 10 grands magasins seront fermés et 13 autres seront rapetissés de moitié afin de favoriser des «magasins de proximité» de moindre taille.

Dans ce contexte, selon Rona, les résultats de premier trimestre divulgués hier témoigneraient d'un regain favorable à son plan d'affaires. En dépit de revenus en faible rebond de 1,8%, à 934,9 millions de dollars, Rona a rehaussé son bénéfice d'exploitation de 38% et réduit sa perte nette de 24%, à 13,3 millions, par rapport à la même période un an plus tôt. Toutefois, les ventes de magasins comparables étaient encore en baisse de 0,8%.

«Malgré un marché difficile, nous continuons d'avoir des résultats meilleurs que nos principaux concurrents. Ça va mieux et vous le verrez dans nos prochains résultats», a indiqué Robert Dutton.

N'empêche, en Bourse, la perception de Rona demeure mitigée parmi les analystes, dont les attentes de résultats ont encore été déçues hier.

Seulement deux des neuf analystes recensés par l'agence Bloomberg recommandent l'achat de ses actions. Et à 11,31$, leur prix cible moyen d'ici un an surpasse d'à peine 13% leur cours récent en Bourse, qui est déjà réduit de moitié depuis un an.

Dans ce contexte, une offre d'achat «autour de 15 ou 16$ par action», comme l'a suggéré un actionnaire, pourrait être alléchante pour plusieurs d'entre eux.

Mais, pour le moment, selon M. Dutton, Rona n'a eu «aucun contact de partenariat d'acquisition» avec quiconque.

Entre-temps, a-t-il déploré, les rumeurs impliquant Rona sont «dangereuses parce qu'elles inquiètent des milliers d'employés dans notre organisation et chez les nombreux fournisseurs et manufacturiers canadiens que nous encourageons avec nos achats».

En cas d'offre hostile, le président de Rona s'est dit convaincu de l'appui des marchands-actionnaires, qui cumulent environ 12% du capital, ainsi que d'institutions québécoises comme le Fonds de solidarité FTQ (env. 3%) et la Caisse de dépôt et placement (11%).

Cependant, la liste des principaux actionnaires de Rona compilée par Bloomberg comprend une majorité de firmes de fonds d'investissement comme Investco Trimark, Goodman&Co., l'Industrielle Alliance, Gestion d'actifs CIBC et Manuvie.