Entre le résultat du premier tour de la présidentielle française, la chute du gouvernement aux Pays-Bas et de mauvais indicateurs, les craintes de voir repartir la crise de la dette en zone euro ont fait sérieusement chuter les Bourses européennes lundi.

Dès l'ouverture la baisse a été générale, mais au fil de la matinée elle s'est largement accentuée, alors que les mauvaises nouvelles ne cessaient de s'accumuler, la tension gagnant également une partie des marchés obligataires.

«L'instablité politique en Europe pèse sur le marché avec les incertitudes sur l'issue du scrutin en France et la crise politique aux Pays-Bas qui a pris les marchés par surprise et créé un élément supplémentaire d'incertitude», a expliqué Yves Marçais, vendeur d'actions chez Global Equities.

Juste avant 9h00 (heure de Montréal), Paris perdait 2,19%, Francfort 2,79%, Londres 1,72%, Madrid 2,77% et Milan 2,21%.

Sur le marché obligataire, beaucoup de taux de pays de la zone euro se tendaient: peu avant 7h00, le taux à dix ans de l'Espagne atteignait ainsi 5,958%, contre 5,937% vendredi soir, celui de l'Italie, 5,708% (contre 5,651%) et celui des Pays-Bas 2,385 (contre 2,314). En revanche, celui de la France se détendait légèrement par rapport au début de matinée à 3,057% contre 3,090% lundi matin et 3,081% vendredi soir.

Dans un contexte déjà fragilisé par les doutes sur la capacité des pays européens à réduire leurs déficits, l'arrivée en tête du socialiste François Hollande au premier tour de la présidentielle française, bien que prévue par les marchés, a grandement entamé le moral des investisseurs.

«Le scrutin français s'ajoute à une défiance envers la zone euro qui pèse sur les marchés», a aussi observé Renaud Murail, gérant chez Barclays Bourse.

Alors que le second tour en France se disputera le 6 mai entre M. Hollande et le président sortant UMP Nicolas Sarkozy, les marchés s'interrogeaient à la fois sur les conséquences de l'éventuelle victoire du socialiste, en tête dans les sondages, mais également sur l'influence qu'aura sur ce scrutin, le score historique du Front National.

«Il y a forcément une incertitude sur le second tour, quant à la politique qui sera menée, le rapport avec l'Allemagne et l'éventuelle renégociation sur le traité européen», a ajouté M. Murail.

La victoire de M. Hollande priverait en effet la chancelière allemande Angela Merkel de son principal partenaire dans la gestion de la crise ces dernières années, selon plusieurs analystes.

L'aggravation de la crise aux Pays-Bas a également fortement pesé. Le premier ministre néerlandais Mark Rutte a en effet annoncé lundi qu'il allait présenter à la reine la démission de son gouvernement de centre-droit, tirant les conséquences de l'échec samedi des négociations sur la réduction du déficit public.

Après sept semaines de discussions, les membres de la coalition gouvernementale ne sont pas parvenus à s'entendre sur les mesures à prendre pour dégager 16 milliards d'euros d'économie afin de réduire le déficit public des Pays-Bas qui a atteint 4,7% du PIB en 2011, bien au-delà de la norme de la zone euro de 3%.

Pour ajouter à l'anxiété, les indicateurs publiés lundi assombrissaient encore les perspectives.

L'activité manufacturière s'est contractée en avril en Chine, accréditant la thèse d'un ralentissement de l'économie. Et l'activité du secteur privé s'est aussi fortement contractée en avril dans la zone euro, ce qui laisse penser que les pays de l'Union monétaire pourraient traverser une récession plus longue que prévu.

Mauvaise nouvelle également pour l'Allemagne dont l'activité du secteur privé, mesurée par l'indice «flash» composite, a chuté à son plus bas niveau depuis cinq mois, et pour la France qui a enregistré en avril une accélération de la contraction de l'activité du secteur privé, affichant son plus fort repli depuis six mois.

Les Bourses asiatiques sont pour leur part restées étrangères au scrutin français, mais Shanghai et Hong Kong ont subi de plein fouet le mauvais indicateur chinois.

Sur le marché des changes, la fébrilité était aussi au rendez-vous, l'euro perdant du terrain face au dollar.