À l'automne 2007, les Bourses sont à leur sommet de tous les temps. Mais une grave crise financière point à l'horizon. La bulle immobilière, dopée par un crédit sans précédent rendu possible par une ingénierie financière débridée et disponible à des emprunteurs non qualifiés, s'apprête à exploser. Elle fera plonger l'économie mondiale dans sa pire récession depuis la grande dépression des années 30.

Un an plus tard, les Bourses ont perdu plus de la moitié de leur valeur, le système bancaire fait face à un risque systémique et un grand nombre d'épargnants voient leur rêve de retraite s'évaporer.

Politiciens et régulateurs se mettent à la recherche des coupables. L'industrie de hedge funds (fonds de couverture) est vite montrée du doigt. En partie en raison de leur opacité, on les identifie comme la cause de la crise.

Cette conclusion était tout à fait fausse, explique Amelia Fawcett, présidente du Hedge Funds Standards Board (HFSB). La Presse Affaires l'a rencontrée lors d'une récente visite à Montréal.

Naissance et rôle du HFSB

Convaincus que l'industrie des hedge funds aura à défendre son intégrité, tout autant que son efficacité, 14 des principaux gestionnaires européens lancent en 2008 le HFSB afin de mettre en place les normes auxquelles les participants de l'industrie seront invités à se conformer.

Conçu à l'origine comme une initiative régionale dans le contexte du régime de la réglementation financière de la Grande-Bretagne, le HFSB veut maintenant rejoindre l'industrie partout dans le monde. C'est Mme Fawcett qui a le rôle de rassembler tous les hedge funds autour des normes très complexes.

Au dernier décompte, on dénombrait environ 9000 hedge funds dans le monde et des actifs sous gestion totalisant

2 trillions. Le Canada représente environ 2% de l'industrie mondiale des hedge funds.

Besoin de normes

L'industrie des hedge funds avait besoin de démontrer au public comment elle est gérée, comment elle investit les fonds qui lui sont confiés, quelles sont ses règles de gouvernance et comment elle peut se placer à l'abri de transactions d'initiés, résume Mme Fawcett.

Le HFSB a développé 28 normes couvrant les façons de faire et la divulgation des pratiques. Ces normes couvrent les documents promotionnels, l'évaluation de la juste valeur des investissements, la gestion des risques, la gouvernance du fonds d'investissement et la conduite acceptable comme actionnaire activiste.

L'objectif est que tous les gestionnaires de hedge funds deviennent signataires du HFSB et adhèrent aux normes.

Il ne s'agit pas d'une mince tâche, et c'est pourquoi Amelia Fawcett parcourt la planète, de Londres à Singapour, de Hong Kong à New York, en passant par Montréal et Toronto. «Jusqu'à maintenant, 56 gestionnaires de hedge funds ayant des actifs sous gestion totalisant 220 milliards ont signé leur adhésion au HFSB, mais ce n'est que le début», dit Mme Fawcett.

Les investisseurs

Pour inciter les hedge funds à se joindre au HFSB, on a pensé suivre une voie qu'aucun régulateur n'a empruntée jusqu'ici, soit d'inviter également les clients des hedge funds, les investisseurs, à adhérer au HFSB, explique Mme Fawcett. Jusqu'à maintenant, 51 investisseurs qui ont collectivement plus de

250 milliards dans les hedge funds sont signataires du HFSB et composent le chapitre des investisseurs. La Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) est du nombre.

La représentation des investisseurs est très importante comme l'atteste la composition du groupe des fiduciaires du HFSB qui comprend 7 investisseurs sur 12 membres. Mario Therrien, directeur des placements alternatifs à la Caisse, est l'un des fiduciaires.

Amelia Fawcett s'est adressée la semaine dernière à une soixantaine de participants de l'industrie des hedge funds à Montréal lors d'une réunion organisée par la Caisse de dépôt. Michael Sabia, président de la Caisse, et Roland Lescure, chef des placements, étaient présents. Le message de Mme Fawcett était clair. «Les hedge funds jouent un rôle primordial dans le monde financier, et il est important que l'industrie se dote de normes de gouvernance et d'intégrité si élevées que les régulateurs les jugeront comme les meilleurs», dit-elle. C'est en réunissant gestionnaires et investisseurs sous les mêmes normes que l'industrie y arrivera, selon elle.

Au Québec, on a compris le message. HR Stratégies, le principal gestionnaire de hedge funds adhère aux principes du HFSB, et les hedge funds québécois à qui HR confie des mandats seraient tous en voie de le faire.

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9000

On compte 9000 hedge funds dans le monde.

2 trillions

Les actifs sous gestion dans les 9000 hedge funds dans le monde totalisent 2 trillions de dollars.

2%

Le Canada représente environ 2% de l'industrie mondiale des hedge funds.