À cause de divergences profondes entre les dirigeants européens, la probabilité que le sommet de demain se conclue par un plan qui pourrait satisfaire les marchés boursiers n'est pas supérieure à 50%.

C'est du moins l'opinion de Marc Christopher Lavoie, vice-président, marchés européens, chez Hexavest. Depuis 18 mois, on va de sommet en sommet, et les divergences entre les dirigeants ont repoussé constamment les prises de décisions importantes. «Des mesures sont adoptées seulement lorsqu'on a plus le choix», dit-il.

C'est pourquoi il est préférable de se tenir loin des actions des institutions financières européennes, selon lui, et plutôt favoriser là-bas les secteurs défensifs telles les pharmaceutiques, la consommation discrétionnaire et les technologies de l'information.

Pourtant, il est impératif que le sommet du 26 octobre accouche d'un plan de sauvetage costaud et efficace, car on ne peut pas se permettre le luxe d'une contagion de la crise grecque à l'Espagne et à l'Italie. «Ce serait trop gros, les structures en place ne pourraient pas le supporter», dit M. Lavoie.

La dette de l'Italie représente 120% de son produit intérieur brut (PIB).

La taille, le financement, et l'utilisation du fonds de sauvetage (FESF) sont au centre des divergences entre les dirigeants. On croit que le fonds, initialement prévu à 440 milliards d'euros, devra être augmenté substantiellement. Mais comment? Par une nouvelle injection d'argent des pays membres, une participation du Fonds monétaire international (FMI), ou par un gonflement du bilan de la Banque centrale européenne (BCE)? On se dispute également à savoir si le FESF servira à la recapitalisation des banques.

Les banques négocient

Les banques représentées par l'Institute of International Finance sont toujours en négociations avec les dirigeants de l'Union européenne quant au montant de la dette grecque à être radiée. Les banques offriraient 40%, mais l'Union européenne demanderait 60%.

Cette décision déterminera le montant de nouveaux capitaux dont les banques auront besoin pour ramener leur ratio de capital de premier rang à 9%.

Le chiffre de 100 milliards d'euros circule actuellement. Mais ce ne serait pas suffisant, et il faudra recommencer dans six mois, craint le vice-président d'Hexavest. «Cent milliards, c'est ce qu'il faudra uniquement pour les banques espagnoles, toujours aux prises avec des mauvais prêts immobiliers», dit-il.

Autre point de discorde, le rôle de la BCE: bien qu'elle se soit toujours opposée à l'achat des obligations des pays en difficulté, elle aurait commencé le 8 août à acheter des obligations de l'Italie.

Le plan issu du sommet devra inclure le rôle de la BCE, indique M. Lavoie. Si elle ne soutient pas les obligations italiennes et celles des autres pays en difficulté, celles-ci pourraient être attaquées par les hedge funds qui voudront tirer avantage de la faiblesse de ces titres. La conséquence serait une hausse du taux d'intérêt de ces obligations.

On assistera à un changement à la présidence de la BCE le 31 octobre. Le Français Jean-Claude Trichet cèdera alors sa place à l'Italien Mario Draghi.

Les Bourses américaines à l'abri pour l'instant

À court terme, les Bourses américaines semblent à l'abri des difficultés que connaît l'Europe, explique François Dupuis, chef économiste chez Desjardins. «Les plus récentes données économiques américaines ont été plus résilientes et les bénéfices des sociétés sont bons, ce qui pourrait soutenir les marchés», dit-il.

Mais pour combien de temps? À moyen terme, le problème européen et le risque de contagion demeureront entiers. La raison: une croissance économique presque inexistante. «Il n'y a que la croissance économique qui peut permettre de réduire l'endettement», dit l'économiste.

Malheureusement, il n'y a rien d'encourageant à ce chapitre. Desjardins vient tout juste de réduire ses prévisions de croissance pour l'Europe en 2012 à 0,6%, alors qu'elles étaient à 1,5% il y a à peine deux mois. «Les gouvernements européens sont vraiment coincés», conclut François Dupuis.