Ébranlés depuis des semaines, les marchés boursiers s'en remettent à la Réserve fédérale américaine (Fed) pour rebondir mais risquent d'être déçus car sa marge de manoeuvre est limitée et les remèdes à sa disposition ont été peu efficaces jusqu'ici pour relancer l'économie.

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«Les Bourses sont reparties uniquement dans l'espoir que Ben Bernanke, le président de la Fed, déverse à nouveau des centaines de milliards de dollars dans l'économie», souligne Frédérik Ducrozet, économiste chez Crédit Agricole CIB.

Les investisseurs vont guetter des annonces en ce sens lors d'une conférence de la banque centrale organisée à Jackson Hole au Wyoming vendredi. C'est lors de cet événement l'an dernier que M. Bernanke avait posé les prémices d'un nouveau programme d'assouplissement monétaire.

Les attentes sont fortes. Les investisseurs anticipent des nouveaux rachats de bons du Trésor américains par la Fed de l'ordre de 500 à 600 milliards de dollars, selon une étude de Barclays Capital.

Le problème est que ces espoirs risquent d'être rapidement douchés.

«La marge de manoeuvre de l'institut monétaire est très limitée», car la première puissance mondiale ne peut plus laisser filer sa dette, souligne Alexandre Baradez, analyste des marchés chez Saxo Banque.

Les États-Unis ont perdu leur précieux triple A et la Chine, premier créancier du pays avec 1170 milliards de titres de dette américaine, exige qu'ils cessent de vivre au-dessus de leurs moyens.

«La boîte à outils est aussi quasiment épuisée. La Fed ne peut plus jouer sur les taux pour tenter de relancer la croissance», commente M. Baradez.

Début août, l'institution monétaire avait déjà annoncé qu'elle allait garder son taux d'intérêt directeur proche de zéro au moins jusqu'à mi-2013.

Repartir sur un nouveau programme d'assouplissement monétaire -en d'autres termes: faire tourner la planche à billets- alors que l'inflation est à 1,8% et que les deux premiers n'ont pas fait la preuve de leur succès, en termes d'emploi notamment, reste aussi un cheminement dangereux.

«Au prix actuel de l'or et alors que les cours du yen et du franc suisse ne cessent de s'envoler, il est de plus en plus évident que les politiques monétaires n'ont pas réussi à relancer l'économie», commente Stephen King, l'économiste en chef de HSBC.

«Faire tourner la planche à billets n'est pas la seule réponse à apporter dans un contexte de faiblesse de la croissance et de divisions politiques toujours plus fortes», ajoute-t-il.

Pour M. Ducrozet, il faudrait par exemple «un stimulus fiscal, une baisse des cotisations sociales pour relancer l'embauche à court terme. Mais les chances pour que les Républicains autorisent cela sont très faibles».

Une seule mesure reste envisageable.

La Fed peut jouer sur la maturité «en cédant des obligations américaines à court terme et en achetant des titres à plus long terme. Elle redonnerait ainsi de la marge de manoeuvre aux investisseurs qui pourraient se retourner vers des actifs plus risqués», comme les actions, explique Axel Botte, stratégiste obligataire chez Natixis.

«L'autre avantage est qu'il n'y aura pas de création de monnaie. Le dollar ne devrait donc pas s'affaiblir davantage contrairement à ce que nous avions observé lors des précédents cycles d'assouplissement», ajoute-t-il. Un moyen de rassurer les pays asiatiques dont les exportations sont pénalisées par la faiblesse du billet vert.

Cette piste isolée ne devrait toutefois pas suffire à rassurer durablement les marchés.

«Placer tous ses espoirs dans le discours de vendredi reste très dangereux. D'autant que le comité monétaire de la Fed, lui-même, reste très divisé sur les mesures à prendre», note Rob Carnell, économiste chez ING, en référence aux trois responsables de la Fed entrés en dissidence contre M. Bernanke.