Le projet de fusion entre les sociétés des Bourses de Toronto et de Londres est sérieusement compromis avec la confirmation, au cours du week-end, d'une offre concurrente élaborée par un groupe d'institutions financières canadiennes de premier plan.

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Cette nouvelle offre évaluée à 3,6 milliards en comptant et en actions s'avère plus généreuse pour les actionnaires du Groupe TMX de Toronto que celle déjà convenue avec la Bourse de Londres.

De plus, les neuf partenaires canadiens et québécois de cette nouvelle offre, réunis dans le groupe Maple Acquisition, semblent en meilleure position pour résoudre les appréhensions sur la perte de contrôle de la plus grande entreprise de Bourses au Canada.

Parmi ces partenaires investisseurs, on trouve quatre filiales boursières de banques, dont la Financière Banque Nationale, dirigée de Montréal. Son président, Louis Vachon, avait manifesté ardemment son opposition à une fusion boursière entre Toronto, Montréal et Londres au cours des dernières semaines.

C'est d'ailleurs l'un de ses principaux collègues à la haute direction de la Banque Nationale, Luc Bertrand, vice-président du conseil - il était président de la Bourse de Montréal lors de son achat par Toronto -, qui agit à titre de principal porte-étendard du groupe Maple Acquisition.

M. Bertrand fera une tournée médiatique dès aujourd'hui afin d'expliquer les ambitions et les objectifs des associés de Maple Acquisition envers la société boursière TMX.

Déjà hier, dans le communiqué officiel diffusé en mi-journée, Luc Bertrand vantait la proposition pour son meilleur potentiel à «créer énormément de valeur en tirant parti des forces de TMX».

Il espérait aussi une «proposition plus intéressante» pour les actionnaires de TMX, mais également pour «assurer la croissance future et l'intégrité continue du marché canadien des capitaux».

Quant aux autres associés investisseurs chez Maple Acquisition, il s'agit de cinq des plus importants gestionnaires de caisses de retraite et investisseurs institutionnels du Canada.

On y compte la Caisse de dépôt et placement du Québec et le Fonds de solidarité FTQ, dont les principaux dirigeants s'étaient abstenus jusqu'à maintenant de prendre position publiquement pour ou contre le projet de regroupement boursier entre Toronto et Londres.

Avec leur participation à une nouvelle offre pour TMX, ces deux institutions québécoises et la Financière Banque Nationale visent à sécuriser la place de la Bourse de Montréal dans les produits dérivés, un marché financier en croissance.

Les autres associés institutionnels de Maple Acquisition sont l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, dont la taille de l'actif rivalise maintenant avec celui de la Caisse de dépôt, ainsi que le fonds Teachers' de Toronto et la société Alberta Investment Management.

Si l'offre du groupe Maple prévaut sur celle déjà négociée entre TMX et la Bourse de Londres, elle aboutirait au partage de propriété suivant: 40% aux actionnaires actuels de TMX, 35% parmi les 5 grandes caisses de retraite et 25% parmi les filiales boursières des 4 banques, dont la Nationale.

Par ailleurs, cette nouvelle société de Bourses engloberait aussi la Bourse alternative Alpha, qui a ravi près de 20% des parts de marché de la Bourse de Toronto au cours des dernières années.

«Ce sont des partenaires sérieux qui représentent bien Canada inc. et Québec inc. Ils présentent une offre qui, à première vue, m'apparaît intéressante pour les intérêts financiers du Québec et du Canada, notamment en ce qui concerne les activités de produits dérivés à la Bourse de Montréal», a indiqué le ministre québécois des Finances, Raymond Bachand, en entrevue depuis New York en fin de journée.

Réactions des politiciens

Le ministre Bachand était dans la métropole américaine pour des rencontres avec d'importants interlocuteurs financiers du Québec et comme représentant du gouvernement à un concert gala de l'OSM au prestigieux Carnegie Hall.

En Ontario, le ministre des Finances, Dwight Duncan, a pour sa part accueilli très favorablement l'offre «vraiment canadienne» annoncée par le groupe Maple Acquisition pour le Groupe TMX .

D'autant plus qu'il avait déjà critiqué publiquement à maintes reprises le projet de «mainmise sur la Bourse de Toronto» par Londres comme un risque majeur de perte d'influence dans le secteur.

Pendant ce temps, à Londres, la presse d'affaires britannique faisait déjà état hier soir d'un «embarras sérieux» pour la Bourse de Londres en cas d'échec de son projet d'achat de la Bourse de Toronto.

Pour le Financial Times, un tel échec pourrait même compromettre la position de Xavier Rolet en tant que président de la Bourse de Londres, une entreprise que l'on décrit en quête d'un projet pour raviver sa compétitivité internationale.