Le Québec opposera son veto à l'achat de la Bourse de Toronto par celle de Londres s'il n'obtient pas la garantie que Montréal restera la plaque tournante pour les transactions de produits dérivés, a prévenu hier le ministre des Finances, Raymond Bachand.

La Presse Affaires a révélé jeudi que la convention entre actionnaires des deux Bourses, mise en ligne sur le site de la Bourse de Toronto (TMX), indiquait que Montréal n'était pas assuré de conserver, à long terme, sa spécialité dans les produits dérivés, un marché d'une soixantaine de millions par année.

La porte-parole du TMX, Carolyn Quick, a souligné que l'expertise de Montréal sur ces marchés était «reconnue», mais dans un secteur aussi volatil qui connaît souvent des bouleversements, «cela ne sera peut-être pas éternel», a-t-elle fait valoir.

Même son de cloche chez les mandataires de la Bourse de Londres au Québec. «Personne ne peut s'engager sur ce que sera le partage des spécialités en 2050», a-t-on soutenu.

Relancé par La Presse, le ministre Bachand voit les choses d'un autre oeil. «S'il n'y a pas d'assurance forte sur le développement des produits dérivés à Montréal, il y aura une opposition forte qui va se manifester», a-t-il prévenu.

L'Autorité des marchés financiers au Québec a le pouvoir d'opposer son veto à la transaction, tout comme son équivalent ontarien.

Selon lui, l'engagement de Londres à conserver les produits dérivés à Montréal peut être de longue durée. Plaçant la barre haut, M. Bachand a brandi, comme exemple, l'engagement qu'il a obtenu de Rio Tinto lors de la transaction visant à acheter Alcan, géant canadien de l'aluminium, dont le siège social était à Montréal.

Dans ce dossier, «j'ai eu une convention de continuité qui n'a pas de limite de temps. Quel que soit le propriétaire, le groupe aluminium mondial est ici, reste ici. Est-ce qu'on peut trouver des formulations semblables pour les Bourses et s'assurer que l'activité des dérivés se fasse à Montréal?» a demandé le ministre Bachand.

Selon lui, il faudra attendre le texte officiel, la proposition des deux Bourses aux gouvernements, document qui devrait être transmis vers la mi-mai.

Le texte d'entente de fusion, actuellement sur le site de la Bourse de Toronto, est la convention entre les actionnaires des deux camps, et non la proposition faite par la Bourse de Londres aux gouvernements au Canada.

Jusqu'ici, les engagements du président de la Bourse de Londres ont été plutôt explicites, a souligné M. Bachand.

«Je l'ai rencontré à deux reprises, il m'a donné l'assurance non seulement de protéger, mais de développer Montréal à long terme», a-t-il résumé.

«Si je retrouve dans les textes les engagements verbaux, le Québec va en profiter, si on ne les retrouve pas, il faudra être inquiet», a dit le ministre.