Contrairement aux attentes, la couverture des entreprises d'origine québécoise en Bourse par les analystes des principaux courtiers sous contrôle québécois demeure marquée de lacunes importantes.

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Parmi les quelque 75 entreprises qui ont une capitalisation de plus de 100 millions de dollars à la Bourse de Toronto, une vingtaine n'ont aucun suivi d'analystes parmi les trois principaux courtiers québécois: la Financière Banque Nationale (FBN), Valeurs mobilières Desjardins (VMD) et Valeurs mobilières Banque Laurentienne (VMBL).

Cette liste de «négligées» comprend des entreprises qui valent des milliards en Bourse, comme la Financière Power, la minière Osisko, les sociétés papetières Domtar et AbitibiBowater.

On compte aussi des québécoises de capitalisation intermédiaire qui ont fait leurs preuves dans leur secteur respectif, telles que Quincaillerie Richelieu, Cogeco, Canam et le détaillant Le Château.

«L'absence de suivi d'analystes chez les courtiers québécois est décevante pour une entreprise comme nous dont la majeure partie des actionnaires sont des investisseurs québécois», constate Jasmin Gosselin, vice-président aux relations avec les investisseurs au groupe industriel Canam, qui vaut 348 millions en Bourse.

«En contrepartie, quelques analystes d'autres courtiers non québécois nous couvrent. Et même des analystes maintenus à Montréal par ces courtiers.»

Par ailleurs, la liste des entreprises québécoises qui sont suivies par un analyste de seulement l'un des trois principaux courtiers québécois a aussi de quoi intriguer parmi leur clientèle d'investisseurs au Québec.

Question de potentiel d'affaires

«Il faut savoir que, chez ses courtiers, en particulier ceux affiliés à des institutions financières, le choix des entreprises suivies par les analystes est souvent influencé par leur potentiel d'affaires futur en services financiers», souligne le vice-président d'un important gestionnaire de placements boursiers à Montréal.

La liste des «demi-négligées» des analystes de courtiers québécois comprend des sociétés milliardaires en Bourse telles que le Canadien National, BCE/Bell Canada, SNC-Lavalin, CGI, l'Industrielle Alliance et la minière Consolidated Thompson.

Elle inclut des capitalisations intermédiaires qui sont reconnues dans leur secteur telles qu'Astral Média et Cogeco Câble, ainsi que les transporteurs Transforce et Air Canada.

On y compte aussi des firmes manufacturières telles que Dorel Industries, GLV (Laperrière&Verreault), Lassonde et Exfo de Québec.

Face à ce délaissement apparent, les principaux courtiers québécois plaident la nécessité de «faire des choix d'assignation d'analystes» en fonction de leurs moyens et de leurs effectifs.

Chez la filiale boursière de la Banque Nationale, FBN, après l'élimination d'une trentaine de postes en décembre dernier, le service de recherche compte 20 analystes et 22 adjoints. La moitié de cet effectif est aux bureaux de Toronto, 10 employés sont à Calgary et 7 à Montréal.

À propos des entreprises québécoises, le porte-parole de la Nationale, Claude Breton, admet que la rationalisation de l'automne dernier chez FBN a provoqué des «interruptions temporaires» de suivi d'analystes.

«La plupart des entreprises délaissées ont été réassignées parmi les analystes demeurés en poste. Les couvertures seront relancées bientôt parce que le marché des entreprises et des investisseurs québécois est primordial pour nous», selon M. Breton.

La meilleure couverture

Chez la filiale boursière du Mouvement Desjardins, VMD, le service de recherche compte 14 analystes et 15 adjoints qui sont répartis également entre les bureaux de Montréal et de Toronto. Trois d'entre eux sont aussi à Calgary.

Avec sept analystes et leurs six adjoints à Montréal, VMD se targue d'avoir la couverture la plus étendue parmi les entreprises basées au Québec.

«La couverture des Québécoises chez VMD dépasse leur pondération au sein de l'indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto. Et pour celles pas encore couvertes, nos services de recherche évoluent constamment et ne cessent d'ajouter des sociétés», selon Caroline Phémius, porte-parole de Desjardins.

Selon le relevé de La Presse Affaires, le nombre d'entreprises (42) suivies par les analystes de VMD parmi les 75 Québécoises valant plus de 100 millions en Bourse est légèrement supérieur aux 38 couvertes par les analystes de la FBN.

Toutefois, cet «avantage québécois» de VMD est très récent. Et il demeure précaire face aux réassignations en cours chez la FBN, qui pourraient rajouter une dizaine d'entreprises québécoises qui ont été délaissées depuis trois mois.

Enfin, chez la filiale boursière de la Banque Laurentienne, VMBL, l'équipe de sept analystes se concentre sur les petites et moyennes capitalisations.

Sa liste d'entreprises suivies compte maintenant 13 Québécoises dont la capitalisation boursière varie de 75 à 500 millions.