Qui l'eût cru? Après un parcours en dents de scie, la Bourse a terminé 2010 sur les chapeaux de roue. L'indice S&P/TSX composé de la Bourse de Toronto a franchi le fil d'arrivée avec des gains annuels de 14,5%.

La Bourse canadienne a avancé de 50% au cours des deux dernières années. Propulsé par le pétrole, l'or, et les matériaux de base comme le cuivre, l'indice S&P/TSX a clôturé l'année pratiquement à son plus haut niveau depuis août 2008.

Et dire que les investisseurs ont gardé le pied sur la pédale de frein toute l'année...

Dans un virage vers la sécurité, les particuliers ont liquidé leurs actions pour se diriger vers les obligations. En fait, les Canadiens ont injecté 11 milliards de dollars dans les fonds d'obligations depuis un an. Pendant ce temps, ils ont vendu pour 6,6 milliards de fonds d'actions, selon les statistiques de novembre de l'Institut des fonds d'investissement du Canada.

Finalement, il y a eu plus de peur que de mal. «La performance des marchés a damé le pion au sentiment négatif. La Bourse a fait fi de la peur des investisseurs», résume Vincent Delisle, stratège en chef chez Scotia Capitaux.

Il reste que 2010 aura été une année déroutante. «Les investisseurs ont été tiraillés de tous les côtés par les bonnes et les mauvaises nouvelles. Ils sont passés par toute la gamme des émotions», relate Luc Girard, directeur du groupe conseil en portefeuille de Valeurs mobilières Desjardins.

La face cachée de l'Europe

Durant toute l'année, la situation financière de plusieurs États souverains a gardé les investisseurs en état d'alerte.

Dès le début de 2010, les frasques de Dubaï ont donné le ton. En pleine crise de ses finances publiques, Dubaï inaugure la tour la plus élevée du monde, symbole de la folie des grandeurs. Mais sans l'aide d'urgence de 25 milliards US de son riche pays voisin Abou Dhabi, Dubaï se serait enlisé dans ses dettes.

Durant l'hiver, c'est au tour de la Grèce de donner la frousse à la planète boursière. Surendetté, le pays doit réduire son déficit budgétaire. Mais la population monte au créneau. Tandis que le gouvernement peine à imposer des mesures d'austérité, les marchés craignent que le pays ne puisse assumer ses obligations.

Par-dessus tout, ils redoutent une contagion de la crise des finances publiques à d'autres pays européens: les PIIGS (Portugal, Irlande, Italie, Grèce, Espagne ou Spain). Comme de fait, l'année s'achève avec les déboires de l'Irlande qui doit se mettre au régime sec et accepter la bouée de sauvetage de l'Europe, tout comme la Grèce quelques mois plus tôt.

«Au niveau mondial, tous les efforts ont été mis par les gouvernements et les banques centrales pour s'assurer que l'on sorte de la crise. Cette concertation mondiale est le facteur le plus important pour moi cette année», raconte Dominique Vincent, gestionnaire de portefeuille chez MacDougall, MacDougall&MacTier.

Paradoxalement, certaines places boursières européennes figurent parmi les championnes mondiales en 2010. Des pays nordiques, comme la Suède et le Danemark, affichent des gains annuels de près de 30%. Des pays satellites, comme l'Estonie et la Lituanie, ont même explosé de 60%!

Et devinez qui obtient la meilleure performance boursière de tous les pays du G7? L'Allemagne, qui traverse sa période la plus faste depuis la réunification! L'indice DAX a réalisé des gains de 16% en 2010.

Le paradoxe américain

L'économie américaine a aussi donné des sueurs froides aux investisseurs qui ont vécu dans la hantise d'un «double-dip». En fin de compte, «l'économie n'est jamais passée près de retomber en récession», assure M. Delisle.

L'été dernier, alors qu'on craignait la rechute, le PIB a tenu bon, avec une croissance de 1,7%. «L'économie américaine termine l'année avec le vent en poupe», ajoute le stratège.

La croissance du PIB, qui a touché 2,8% au troisième trimestre, pourrait dépasser 3% au quatrième trimestre.

Le marché du travail américain montre des signes positifs: le secteur privé a créé 1,1 million d'emplois... un secret bien gardé. Et le consommateur s'en tire plutôt bien: les dépenses de consommation sont en progression aux États-Unis... même si l'on s'imagine que les ménages américains sont menottés par leurs dettes.

Contre toute attente, le meilleur secteur à la Bourse américaine, en 2010, a été celui de la consommation discrétionnaire! «Les profits sont en hausse dans le secteur de la consommation. Il y a un fossé entre la réalité et la perception», estime M. Delisle.

Dans l'ensemble, la Bourse américaine a gagné 13% en 2010, alors que la Bourse chinoise a plongé de 14%. C'est le monde à l'envers! Chacun sait que la Chine affiche une croissance économique phénoménale, tandis que les États-Unis ne sont pas encore au bout de leurs peines.

Mais les attentes des investisseurs étaient extrêmement faibles pour les États-Unis. Ceux-ci n'avaient d'yeux que pour les pays émergents. Or, la croissance est si forte en Chine que les banques centrales ont appliqué une politique monétaire restrictive pour éviter la surchauffe. D'où le dérapage boursier.

LES GRANDES BOURSES MONDIALES EN 2010

Du meilleur au pire

Mexique (IPC) 20,02%

Allemangne (DAX) 16.06%

Canada (S&P/TSX) 14,45%

États-Unis (S&P500) 12,78%

Royaume-Uni (FTSE 100) 9,00%

Brésil (Bovespa) 1,04%

Japon (Nikkei 225) -3,01%

France (CAC 40) -3,34%

Chine (Shanghai SE) -14,31%

Espagne (IBEX) -17,43%

LES MEILLEURS (1)

Les 10 plus forts rendements, en 2010

1 Silver Wheaton "145,47%

2 Semafo "142,66%

3 Pacific Rubiales "118,45%

4 Valeant Pharma "100,32%

5 Magna "94,93%

6 Osisko "71,63%

7 Teck Res. "67,82%

8 Finning "62,41%

9 Ivanhoe "57,11%

10 Transforce "49,52%

LES PIRES (1)

Les 10 plus fortes baisses, en 2010

1 Research in Motion -18,25%

2 Encana -14,72%

3 Shoppers Drug Mart -12,95%

4 Husky Energy -11,74%

5 Canadian Oil Sands -11,57%

6 Financière Manuvie -11,28%

7 Transat -10,90%

8 TransAlta -9,92%

9 Nexen -9,60%

10 Rona -8,61%

1 Ces titres font partie du tableau LPA 100 que La Presse Affaires publie du mardi au samedi.