Qui est le meilleur président pour tenir tête aux banquiers de Wall Street: George W. Bush ou Barack Obama? «Je ne vois pas une grosse différence», dit Charles Ferguson, réalisateur du nouveau documentaire Inside Job sur la crise financière.

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Le documentaire engagé, qui sort en salle aujourd'hui au Québec, n'est pas tendre envers les administrations de Bill Clinton, Bush et Obama. Selon le film dont la narration est assurée par l'acteur Matt Damon, les trois présidents ont été, à divers degrés, beaucoup trop conciliants envers Wall Street - une attitude qui, selon Charles Ferguson, a mené à la crise financière. «Sur plusieurs aspects sur le plan politique, l'administration Bush était dans une classe à part, mais les changements les plus dangereux à la réglementation des banques ont été faits sous l'administration Clinton, dit Charles Ferguson. Les gens les plus dangereux sous Clinton, comme Larry Summers, sont encore en poste sous Obama.»

Le réalisateur, qui a obtenu une nomination aux Oscars en 2008 pour son premier film, No End In Sight, sur la guerre en Irak, préfère encore Barack Obama à George W. Bush à la Maison-Blanche pour tenir tête à Wall Street. «Au final, Obama est un peu meilleur que Bush, mais l'application de la loi est encore pire sous Obama. Au moins, sous Bush, des gens ont été condamnés par le département de la Justice dans les scandales de WorldCom et d'Enron. Il n'y a pas eu une seule accusation criminelle à Wall Street dans le cadre de la crise financière», dit Charles Ferguson, qui a contribué financièrement à la campagne présidentielle de Barack Obama.

Portrait très sombre

Inside Job trace aussi un portrait très sombre de Wall Street en relatant les pires moments de la crise financière. «Les services financiers sont une industrie malicieuse (a rogue industry), dit Charles Ferguson. Avant de faire le film, je savais qu'il y a eu des gens à Wall Street qui se sont mal comportés, mais jamais à une aussi grande échelle. Goldman Sachs a vendu des produits financiers visant à tirer profit de leurs déboires. Je croyais qu'en Amérique, on ne faisait pas ça. Mais oui, des gens sont prêts à faire ça. Ce qui m'inquiète encore plus, c'est que c'est légal d'agir ainsi...»

Parmi les pistes explorées par le film: l'influence de Wall Street dans les coulisses du pouvoir à Washington et dans les grandes écoles de commerce du pays. «Wall Street a une influence énorme sur les politiciens», dit Charles Ferguson.

L'acteur vedette Matt Damon prête sa voix à la narration du film, présenté au Festival de Cannes en mai dernier. «Matt appuie les thèses du film. Quand je lui ai fait remarquer que le film était très critique à l'égard de l'administration Obama, il m'a répondu qu'il était aussi très critique à l'égard d'Obama», dit Charles Ferguson, qui a entrepris une troisième carrière à Hollywood. Avant de fonder sa société de production, il a été consultant politique et entrepreneur en logiciels (il a vendu son entreprise à Microsoft en 1994 pour 133 millions US). Inside Job est son deuxième film. Tourné avec un budget de 2 millions US, le film a généré des revenus d'environ 350 000$ en deux semaines au box-office américain. Au Québec, le film est à l'affiche seulement à l'ACM Forum à Montréal.