La marée noire dans le Golfe du Mexique fait dégringoler BP en Bourse, les investisseurs s'inquiétant de l'énorme impact tant financier qu'en terme d'image de cette catastrophe pour la compagnie, dont la réputation a déjà été entachée par plusieurs incidents aux Etats-Unis.

Depuis l'annonce de l'explosion, puis du naufrage de la plateforme Deepwater Horizon qu'exploitait le groupe dans le Golfe du Mexique, le cours de BP a chuté de 17% à la Bourse de Londres, ramenant mardi sa valeur boursière à environ 157 milliards de dollars, soit 119 milliards d'euros.

En moins de deux semaines, ce sont ainsi plus de 30 milliards de dollars de capitalisation boursière qui sont partis en fumée, alors même que le géant pétrolier britannique a dévoilé, entre-temps, des résultats trimestriels supérieurs aux attentes, avec un bénéfice ajusté en hausse de 135%.

Mais ces résultats ont été complètement effacés par la marée noire qui menace de provoquer une catastrophique écologique sans précédent dans le Golfe du Mexique.

Mardi, le groupe a évalué à «plus de 6 millions de dollars» par jour les travaux pour contenir la marée noire, mais les analystes craignent une facture finale bien plus élevée, suivant le temps qu'il faudra à la compagnie pour stopper le flot de pétrole brut s'échappant du puits creusé sous la plateforme.

«Les dernières estimations pour la facture de nettoyage tournent autour de 16 milliards de dollars», avançait mardi Sam Wright, courtier chez Spreadex.

Les autorités américaines ont haussé le ton ces derniers jours, sommant BP de tout faire pour contenir et nettoyer le pétrole, et la prévenant qu'elle devrait régler la note. BP, de son côté, a fait profil bas, reconnaissant sa responsabilité et promettant de payer «tous les coûts nécessaires et appropriés».

Mais plus largement, ce n'est pas tant l'impact financier, que le groupe a largement la capacité d'absorber, avec un bénéfice net de 16,6 milliards de dollars engrangé l'an dernier, que les conséquences pour sa réputation à long terme qui inquiètent, et les futurs contrats qu'il pourrait remporter aux Etats-Unis, soulignait l'analyste de Charles Stanley.

Cet incident intervient en effet au plus mal pour BP, qui se remettait à peine d'une série d'incidents aux Etats-Unis, qui ont gravement endommagé sa réputation : l'explosion de la raffinerie de Texas City, en 2005, qui avait fait 15 morts et 170 blessés, et une fuite de pétrole intervenue l'année suivante sur un oléoduc du gisement de Prudhoe Bay, en Alaska.

La marée noire est d'autant plus dommageable pour les affaires du groupe britannique que les Etats-Unis sont de loin son principal pays d'activité, depuis le rachat de la compagnie américaine Amoco en 1998, qui en a fait le premier producteur de gaz et de pétrole du pays.

C'est d'ailleurs à cette occasion que le groupe, alors appelé British Petroleum, s'était rebaptisé «BP Amoco», raccourci en «BP» deux ans plus tard.

Enfin, plus largement, la catastrophe pourrait remettre en cause les forages offshore aux Etats-Unis, où BP avait encore découvert l'an dernier un gisement géant, Tiber, à l'aide de la plateforme Deepwater Horizon.

«La perte de valeur boursière paraît disproportionnée au vu du coût financier potentiel», estimait ainsi mardi Tony Shepard, de la maison de courtage londonienne Charles Stanley, tout en soulignant qu'«il pourrait y avoir des conséquences à long terme pas seulement pour BP, mais pour d'autres compagnies, le Golfe du Mexique étant une zone d'exploration en pleine expansion».