Sans doute essoufflées par leur spectaculaire rallye des derniers mois, les Bourses de la planète ont fait une pause, hier. Les marchés américains ont reculé d'un pas pendant que le TSX, plombé une nouvelle chute du pétrole, a accusé une perte plus substantielle de 2%.

Que s'est-il donc passé pour effrayer les investisseurs?

«Disons que par les temps qui courent, ça ne prend pas grand-chose, répond Marc Dalpé, gestionnaire de portefeuille au Groupe Dalpé-Milette, Valeurs mobilières Desjardins. Avec la hausse des marchés - les 40 à 45% gagnés depuis six mois -, tout le monde s'attend à une correction. Alors, aussitôt qu'il y a une nouvelle qui n'est pas tout en fait en ligne avec les attentes, certains se disent: voilà la chance que j'attendais pour vendre. Et ç'a créé un effet boule de neige.»

Selon Pierre Lapointe, stratège boursier à la Financière Banque Nationale, ce sont les nouvelles statistiques sur les ventes de maisons aux États-Unis qui ont joué hier le rôle de déclencheur.

À la surprise générale, les reventes de maisons ont reculé pour la première fois en quatre mois aux États-Unis. Selon les analystes, la chute de 2,7% a envoyé le message que la relance immobilière se fera lentement.

«Ce n'est pas la fin du monde, ce n'est pas ça qui fait que la valeur de toutes les entreprises de la planète baisse subitement de 2%. Mais ç'a servi de catalyseur», dit M. Dalpé.

Le Dow Jones a reculé de 0,42%, hier, tandis que le S&P 500 a perdu 0,95% et que le NASDAQ a cédé 1,12%.

Le pétrole plombé à Toronto

À Toronto, la baisse a été amplifiée par une nouvelle chute du pétrole. Le TSX a reculé de 231,78 points, à 11 285,76 points, une baisse de 2,01%.

Sur le New York Mercantile Exchange, le baril de light sweet crude pour livraison en novembre a terminé à 65,89$US, en recul de 3,08$US par rapport à la clôture de mercredi.

En deux jours, le pétrole a baissé de plus de 8%.

«Le pétrole, en ce moment, réagit énormément au niveau des stocks et au dollar américain», note Gabriel Lancry, administrateur associé chez Scotia McLeod.

Or, avec l'once d'or qui a dépassé les 1000$US ce mois-ci, plusieurs investisseurs commencent à trouver que le précieux métal est cher. Et se tournent vers l'autre grande valeur refuge traditionnelle, le dollar américain.

Le billet vert gagne donc du terrain pendant que l'or en perd (il a clôturé à 884,79$US l'once hier, en baisse de près de 2%). Et comme tout est lié en ce bas monde, il y a un effet sur le pétrole. L'explication: le pétrole se vend surtout en dollars américains. Si celui-ci monte, les investisseurs qui paient en devises étrangères doivent débourser plus pour leur pétrole et s'en détournent.

Et quand le pétrole descend, c'est bien connu, la Bourse de Toronto écope. C'est ce qui s'est passé hier.

«Le potentiel de baisse du pétrole est bien moindre que celui de l'or», dit toutefois Pierre Lapointe, de la Nationale. Les spécialistes de la Bourse pointent un autre élément qui a pu échauder les investisseurs et expliquer les baisses d'hier: le discours prononcé mercredi par le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke.

M. Bernanke a affirmé qu'il allait redoubler de prudence pour s'assurer que la reprise est bien viable.

Selon Gabriel Lancry, de Scotia McLeod, le marché a pu interpréter le message comme un signe que l'économie «ne peut pas encore fonctionner par elle-même sans l'oxygène insufflé artificiellement par les gouvernements».